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Numéro 173 - janvier 2004
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Au commencement était le logos..,
et le logos était Dieu

Nous connaissons tous très bien ce début du prologue de Jean et pourrions le réciter par cœur. Mais une question demeure : qu’est-ce que le logos ? Les traductions oscillent entre « le verbe » et « la parole. » Seul Chouraqui, d’habitude plus hardi, conserve prudemment le mot grec dans sa fameuse Bible traduite en français. En fait le mot logos a deux sens principaux, celui de parole, de discours et celui de raison, d’intelligence. Et les grands traducteurs de la Bible, qui n’aimaient pas beaucoup la raison, ont tous préféré se rabattre sur la parole. On ne voit pas bien, en effet, un pasteur ou un prêtre lire en chair le Prologue et dire : « Au commencement était la raison, … et la raison était Dieu » ! Si l’on se réfère à la philosophie grecque, et surtout au christianisme naissant très hellénisé et un peu gnostique, comme celui d’Alexandrie ou des milieux johanniques, le logos serait plutôt une sorte de pensée, de sagesse descendant de Dieu pour illuminer les hommes. Il est donc le lien entre Dieu et les hommes, la face de Dieu tournée vers le monde des vivants. Et ce lien se loge à deux niveaux : dans le discours, dans la parole qui lie les hommes les uns aux autres et leur permet de se communiquer leurs idées ; dans la raison, dans la sagesse, qui incite les hommes à vivre ensemble en bonne intelligence.

Mais le prologue va plus loin, ce lien raisonnable, non seulement vient de Dieu, mais est Dieu lui-même. La sage parole participe à l’être même de Dieu. Elle est Dieu atteignant les hommes. Et Dieu ne peut « être » sans cette relation de parole qui lie les hommes entre eux et à lui. Ainsi, dans les Églises johanniques, un peu gnostiques il est vrai, Dieu est perçu comme le principe qui, dès le commencement, permet la communication des idées raisonnables, celles qui rapprochent de Dieu et sauvent. Dieu est parmi nous parce que la parole existe et circule.

Mais de quel commencement s’agit-il ? De celui du monde peut-être. On a beaucoup dit que Jean faisait un clin d’œil au début de la Genèse. Mais aussi, et la suite du prologue le montre bien, le commencement est celui de l’ère nouvelle inaugurée par ce Jésus qui a prononcé tant de discours de sagesse et de raison. Et surtout qui a « assumé » ses discours, comme on dit aujourd’hui, jusqu’à leurs conséquences logiques et dramatiques. Le commencement, cela peut être aussi une nouvelle naissance, un nouveau départ. Chaque tournant de la vie est un commencement. Nous allons de commencements en recommencements : commencement d’une année nouvelle ; commencement d’une nouvelle équipe qui va s’occuper du journal et qui, justement voudrait faire circuler la parole, celle des hommes et celle que l’on attribue, un peu trop facilement à Dieu.

Car, paradoxalement, le Dieu-Parole n’est en fait qu’un trop long silence. Jusqu’à preuve du contraire, Dieu ne parle pas directement, mais n’a d’autre ressource que d’emprunter la parole des hommes. La Bible hébraïque ne s’y trompe pas lorsqu’elle écrit : « La parole vint au prophète de la part de Dieu et il dit : … » C’est donc bien le prophète qui parle et il n’y a de parole de Dieu que parole humaine, ce qui a bien intrigué K. Barth, mais aussi R. Bultmann. Ce dernier écrivait : « Par mes mots, Dieu dépend de moi, au lieu que je dépende de lui. » Ce paradoxe doit nous rendre mo-destes et nous faire simplement souhaiter qu’en ces nouveaux commencements, notre journal soit le véhicule d’une parole raisonnable qui a quelque chose à voir avec Dieu lui-même. feuille

Henri Persoz

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