Cest là
quon se trouve bien, quon se délecte... Cest
le paradis. Ce mot, on lutilise souvent. Mais quen est-il
au juste si lon sen tient à son acception religieuse?
Oui, la musique céleste, les fleurs, les beaux
anges, les belles images, la contemplation sans fin de Dieu, loubli
du monde terrestre aussi, avec ses souffrances et ses laideurs.
Mais un tel paradis est statique, rien ny advient,
tout est immobile ou presque, rien ne se passe que lémerveillement,
dont on ne se lasse pas, dêtre en face de Dieu pour toujours
et de tout savoir enfin...
Que veut dire ce toujours ? Le temps des vivants ne sécoule
plus dans ce lieu de béatitude. Quel ennui finalement ! Ceux
qui ont inventé ce concept ont-ils senti limpasse où
toute description ségare ? Cest un non-lieu, dans
un non-temps, pour un bonheur sans activité, dans une béatitude
sans consistance au fond. Le Moyen Âge, avec complaisance, a essayé
de dire ce lieu enchanteur, cette éternité de réalités
indicibles sur lesquelles Jean Delumeau sest en notre temps interrogé
: Que reste-t-il du paradis ? (Fayard 2000).
Le mot de paradis vient de la langue perse et désigne
à lorigine un beau jardin où le souverain se repose
et, surtout, où il chasse ; là il fait débauche
dactivité... Les Hébreux sen sont inspirés
pour décrire le jardin dÉden.
Quand jentends dans une cérémonie
lallusion au paradis, je me demande : de quoi veut-on parler ici
? Et quelle aspiration puis-je avoir pour ce paradis ?
Comme lenfer dont il est lopposé,
le terme signifie un lieu que notre esprit ne sait guère concevoir.
Alors, à quoi bon lemployer ?
Bernard
Félix