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Bach, un phénomène de dynastie

L'œuvre de Jean-Sébastien Bach (1685-1750) et de ses fils est généralement bien connue, même si elle avait subi une éclipse jusqu'à sa "relance" par Félix Mendelssohn Bartholdi aux alentours de 1830. En revanche, l'apport musical de ses ancêtres est moins familier au grand public. En fait, de nombreux musiciens, célèbres ou non, ayant le patronyme Bach, se rattachent à un phénomène de dynastie qui, de nos jours où la généalogie protestante représente une discipline de pointe, revêt un intérêt croissant.

Étymologie et généalogie

Le patronyme Bach a connu plusieurs variantes : Bac, Bach/Pach, Bachen/Pachen, Baach, Baachen. L'expression «die sogenannten Baachen» est utilisée pour désigner les "musiciens" de la ville (Stadtpfeifer). C'est dire à quel point les Bach symbolisent la pratique musicale locale. En fait, le dénombrement des ancêtres et la filiation de la famille Bach sont d'une importance insoupçonnée : quatre vingt dix Bach-musiciens -dont le petit-fils de Jean-Sébastien, Wilhelm-Friedrich Ernst Bach (1759-1845)- ont été très actifs jusqu'au milieu du XIXe siècle (et moins par la suite). La dynastie s'éteint en 1968, avec un Bach musicien-amateur, employé à la Poste. Tous les Bach ont largement contribué d'une part, au développement des formes musicales vocales (cantates, motets, chorals), instrumentales (préludes de choral pour orgue, fugues, toccatas, variations...), d'autre part, à l'évolution de l'esthétique selon les fluctuations du goût et de la mode et, d'une manière générale, à l'histoire des sensibilités et des mentalités religieuses en leur temps.

Statut social

Leur statut social est particulièrement diversifié : meunier, domestique, cuisinier, violoneux et jongleur, flûtiste, fifre, employé municipal, garde, veilleur (qui "sonnait" à chaque heure des chorals du haut des tours), musicien au service de princes, de villes, d'Églises, maître de chapelle, cantor, organiste et claveciniste, accompagnateur... ; d'autres ont été éditeur, marchand de musique, facteur d'instruments. Ils ont pratiqué de nombreux instruments à vent : trompettes, trombones... ; à cordes : violes, violons ; à claviers : orgue, clavecin, épinette, clavicorde, puis pianoforte.

Les membres de la dynastie ont pu considérer la musique comme "gagne pain", éventuellement à côté d'une autre activité ; comme vocation au service de l'Église calviniste et surtout luthérienne, comme une activité professionnelle (y compris l'enseignement) ou comme un passe-temps (tel le meunier qui, après son travail, jouait du cistre) ou encore pour les loisirs des Princes : musiques de table, de salon, de Cour, de circonstance (jubilés, mariages, obsèques, visites de sommités telles que l'Empereur), ou même à finalité politique, à la gloire de la Ville, du Conseil municipal, du Prince, du Roi. Certains ascendants ont vécu pendant la Réforme, la Contre-Réforme, la Guerre de Trente Ans (1618-1648), à l'époque dite baroque, à l'époque du Piétisme, de l'Orthodoxie, puis de l'Empfindsamkeit ou encore du Rationalisme, au Siècle des Lumières.

La dynastie comprend, entre autres, jusqu'à Johann Ambrosius (1645-1695), père de Jean-Sebastien Bach, un ancêtre inconnu qui a vécu à Wechmar, près de Gotha, à la fin du XVe et au début du XVIe siècle ; vers 1520, Hans Bach (mort après 1580), Veit (ou Vitus) Bach, boulanger de son état, qui a séjourné en Hongrie et est décédé avant 1578 ; Caspar Bach -sans doute fils de Hans-, qui a été fifre municipal à Wechmar est mort en 1619, sans descendance ; Johannes [ou Hans] Bach (1549/50-1626), fils de Veit, victime de la peste, était à la fois meunier et musicien, et jouait de la cithare après son travail. Christoph Bach, fils de Johannes (ou Hans), est né en 1613 ; il a été domestique et musicien à Wechmar, puis musicien de la Chapelle à Arnstadt ; il meurt en 1661. Son frère Heinrich Bach (1615-1692) sera actif dans ces deux mêmes villes. Johann Aegidius Bach a vécu Erfurt de 1645 à 1717, il y a exercé les activités de violiste, puis de directeur de la Ratsmusik et d'organiste. Enfin, l'année 1645 est celle de la naissance de jumeaux : Johann Christoph Bach (1645-1693), fils de Christoph Bach, a vécu à Erfurt et à Arnstadt, et son frère, Johann Ambrosius Bach (1645-1695), n'est autre que le père de Jean-Sébastien, qui exerça à Eisenach les métiers de violoniste, Stadtmusikant et de directeur de la Ratsmusik. La mère de Jean-Sébastien, Maria Magdalena Grabler eut huit enfants : Jean-Sébastien, né le 21 Mars 1685, étant le dernier.

Les Bach ne sont pas tous localisés en Thuringe et en Saxe, certains se sont déplacés à l'étranger : Italie, Angleterre, Suède... La "réception" des œuvres du Cantor de Leipzig, déjà démodées vers la fin de sa vie, a connu un nouvel essor au XIXe siècle, grâce à l'interprétation de la Passion selon Saint Matthieu dirigée à l'occasion du centenaire de la création de l'œuvre, en 1829, par Félix Mendelssohn Bartholdy, et, en 1843, son petit-fils, Wilhelm Friedrich Ernst Bach (1759-1845) a assisté -deux ans avant sa mort- à l'inauguration du monument Bach édifié à Leipzig par Mendelssohn. En l'an 2000, l'œuvre de Jean-Sébastien Bach, de ses ascendants et de ses descendants, sera très largement diffusée, non seulement dans les milieux luthériens, mais encore dans la communauté scientifique, hymnologique et artistique internationale.

Édith Weber
Professeur émérite d'Histoire de la Musique à l'Université de Paris-Sorbonne

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