Nous commençons
une enquête théologique qui s’étendra sur
plusieurs numéros, à propos de la question : “Dieu
a-t-il besoin de sacrifice ?” Divers points de vue seront exposés
dans cette recherche.Voici la première contribution.
Philippe Vassaux
La croix est-elle le choc décisif ?
Dans la mesure où la croyance cherche à s’imposer
d’elle-même et relève de l’ordre de la certitude,
je préfère vous dire ce que je pense qui relève
de la conviction.Bultmann affirme que la croix est un événement
de l’histoire que l’on peut situer et dater et que la résurrection
est un événement de la foi, symbole d’une victoire
sur la mort et les forces de destruction.Il me paraît indubitable
que la croix a été le choc décisif qui a permis
aux premiers chrétiens de comprendre qui était Jésus
de Nazareth et quelle était sa nature et sa mission.
Dire que Jésus est le Christ est une première confession
de foi. Jésus, le fils du charpentier, est le messie attendu
en Israël, l’envoyé de Dieu chargé de révéler
au monde sa volonté sainte.A la différence des prophètes
il n’y a qu’un seul messie.La divinité de Jésus-Christ
porte davantage, à mes yeux, sur sa mission que sur sa personne,
même s’il est vrai qu’il authentifie son action par
sa vie. D’après les témoignages du Nouveau Testament
Jésus a fait tout ce qu’il a dit, il a accompli tout ce
qu’il a promis.Il est allé jusqu’au bout de sa mission
en acceptant la mort pour faire connaître la bonne nouvelle
de la venue parmi nous et en nous du règne de Dieu.Je préfère
le mot règne à celui de royaume qui a une connotation
trop exclusivement géographique.
Il serait difficile d’imaginer Jésus se mariant, mourant
entouré de ses enfants et de ses petits-enfants en leur faisant,
en toute sérénité, d’ultimes recommandations,
un peu comme Calvin est représenté sur son lit de mort
au milieu de la compagnie des pasteurs de Genève ! La croix
a bien été le choc décisif qui a permis à
ses disciples de comprendre vraiment qui il était.Quand je
dis que Jésus est mort pour nous, je ne dis pas qu’il
est mort à notre place, mais qu’il est mort en notre faveur.
Bien entendu la mort de Jésus n’est pas due à
la volonté divine.Le sang de la croix n’est pas destiné
à apaiser la colère d’un dieu irascible et cruel
qui serait le contraire du Père qu’il nous a révélé
et qui, selon le mot de Voltaire, serait plus mauvais que le pire
des hommes.
La mort de Jésus relève de la responsabilité
de quelques hommes qui ont pensé se débarrasser à
jamais d’un personnage encombrant, prêt à remettre
en question leur autorité, leurs privilèges et leurs
entreprises malsaines.
Le calcul était faux.C’est l’inverse qui s’est
produit.
La croix au lieu d’être un gouffre inexorable est un
commencement nouveau.
La mort de Jésus a donc bien été, me semble-t-il,
le choc décisif qui a permis à l’Évangile
de se répandre à travers le monde comme une traînée
de poudre.C’est souvent lorsque l’un d’entre nous n’est
plus parmi nous que nous comprenons enfin ce qu’il représente
pour nous, ce qu’il continue à être malgré
tout au-delà de la vie et de la mort.Le Christ selon la chair
n’est plus parmi nous, le Christ selon l'esprit, c’est-à-dire
l’esprit du Christ est toujours présent pour garder, aider
et soutenir ceux et celles qui ont choisi de le suivre en toute liberté
parce qu’ils ont entendu un jour son appel pressant, le seul
qui soit en mesure de répondre aux questions, aux défis
et aux espoirs du monde présent.
Philippe
Vassaux