Demain, pourrons-nous fabriquer la
vie ? Je vois trois manières daborder cette question et
les problèmes quelle pose.
1 - Diable, Dieu perdrait-il lune de ses places fortes ? Premier
registre pour étudier cette question : celui de la théologie.
Si lhomme peut fabriquer et créer la vie, on peut penser
que Dieu perd lun de ses trois privilèges exclusifs : la
création de la vie (les deux autres étant la création
de lunivers et le don de la conscience à lhomme 2)
et donc lune des trois preuves de son existence.
En effet, on pourrait supposer que, si la vie reste une énigme
pour les hommes, si ceux-ci ne peuvent parvenir à la fabriquer,
cest que seul Dieu a pu la créer.Et donc, dit-on, cela
constitue une preuve de Dieu.En revanche, on pourrait supposer que,
si lhomme, par sa science peut créer et fabriquer la vie,
la science rend la foi caduque : Dieu perd sa raison dêtre.
Cest pourquoi, depuis que la science progresse, les croyants
ont battu en retraite par rapport à cette manière de justifier
leur foi et de prouver Dieu par les énigmes de ce monde.
Ils ont peut-être raison.Cest vrai, que la science progresse
ou non, quelle parvienne ou non à découvrir le secret
de la vie, peu importe, car la foi ne rentre pas en concurrence avec
la science. Mais ils ont aussi peut-être tort.Car, à mon
sens, si lhomme parvient à fabriquer la vie, cela a une
implication certaine sur ma foi.
La foi, cest une forme démerveillement.Et je peux
mémerveiller que la science puisse aussi parvenir à
comprendre le mystère de la vie et aussi que lhomme, par
ses techniques, puisse parvenir à fabriquer ce miracle. Ainsi
la foi ajoute une qualité denchantement à la découverte
scientifique et aux possibilités techniques que possède
lhomme.
Je peux louer Dieu parce que la vie mapparaît comme un
mystère insondable.Mais je peux ausi louer Dieu de mavoir
donné laptitude de créer la vie.
Une procréation artificielle me paraît aussi miraculeuse
quune procréation naturelle. Et même davantage.
Quand le prophète Elie redonne souffle au fils dune vieille
femme (I Rois 17, 17-24), il utilise le pouvoir que Dieu lui a donné.Il
ne concurrence pas Dieu 3.Il rend grâce à Dieu pour le
pouvoir de fabriquer de la vie que Dieu lui a donné.
2 - Décider en fonction de lintérêt de lenfant
à naître Deuxième registre pour étudier la
question demain, pourrons-nous fabriquer la vie ? : celui
de léthique ou de la morale.
Il faut distinguer trois formes de techniques 4 qui peuvent ou pourraient
(à plus ou moins long terme) sappliquer aux plantes, aux
animaux et aussi à lhomme.Chacune delles pose des
problèmes éthiques différents.
Les techniques de procréation artificielle (insémination
artificielle, fécondation in vitro...). Dans ce cas, il ny
a pas dintervention sur le patrimoine génétique.
Il ny a pas, à proprement parler, fabrication
de la vie.Même le clonage qui seffectue par division des
cellules (ce qui permet dobtenir plusieurs embryons ayant un patrimoine
génétique identique) nest pas à proprement
parler une intervention dans le patrimoine génétique.
La sélection en vue de lamélioration de
lespèce. La sélection consiste à utiliser
le fait que lévolution des espèces se fait naturellement
de manière capricieuse. Et elle dirige artificiellement cette
spontanéité. Dans ce cas, cest la Nature qui donne
et continue à donner la vie et les caractéristiques de
lespèce.Ce ne sont que les variations et les mutations
naturelles qui sont sélectionnées 5. Là aussi,
il ny a pas à proprement parler fabrication,
mais il y a eugénisme.
La seule technique qui soit réellement de lordre
du génie génétique 6, et que lon
puisse considérer comme une forme de fabrication
de la vie, cest la création programmée de nouvelles
espèces vivantes, ou la transformation du patrimoine génétique
dun individu par intervention directe dans le plan de sa construction
génétique.Cest ici que lon peut parler de
manipulation génétique.Ici il y a réorganisation
de lADN (le noyau de la cellule initiale de lorganisme
qui contient linformation qui sera transmise à la descendance).
La thérapie génétique relève de cette
troisième technique.Elle vise à enrayer un défaut
génétique non seulement sur la personne concernée
mais aussi sur tous les descendants 7. Certains contestent en soi le
droit dopérer cette chirurgie génétique.Mais
la plupart lacceptent si elle a un but thérapeutique (soigner
un défaut) et si elle ne vise pas à lamélioration
de léquipement génétique.Mais la limite entre
leugénisme négatif (suppression dun défaut)
et leugénisme positif (amélioration de léquipement
génétique) est imprécise, tout autant que celle
entre anormal et normal ou celle entre médicament thérapeutique
et médicament de confort. Tout le problème est de définir
quelles sont les améliorations non admissibles ! Même si
cela peut surprendre, cest le progrès qui est considéré
comme une faute.
Autre problème corollaire : on pourrait toucher à la
périphérie de lhomme, mais non pas à son
noyau. Mais ceci aussi pose des problèmes. A partir
de quand y a-t-il homme 8 ? Et quest-ce qui définit
le cur de lhomme et de son identité 9
?
La distinction entre les trois techniques (procréation
artificielle, sélection-amélioration de lespèce,
manipulation génétique) est importante. Dans le premier
cas on transplante la vie (et on soigne une stérilité
ou plutôt on remédie à ses effets), dans le deuxième
on améliore la vie, dans le troisième on transforme la
vie.
Mais ces distinctions sont-elles absolument étanches ? La thérapie
génétique, par exemple, est-ce une manière de guérir
ou une manière daméliorer ? Cest guérir
les maladies avant quelles ne se soient déclarées.Et
quel mal y a-t-il à cela ?
On peut aborder de plusieurs manières le problème moral
que posent ces techniques.
Y a-t-il un devoir de respecter la Nature, cest-à-dire
lordre naturel ?On peut considérer que lordre de
la Nature (les caractéristiques des espèces, leurs mutations
et leurs hybridations) est voulu par Dieu, ou du moins voulu par la
Nature elle-même, et quil a un caractère sacré.Et
ce problème du respect de la Nature et du sacré se pose
de manière encore plus aigüe quand on veut toucher à
lidentité de lhomme.
Ce qui est curieux et un peu paradoxal, cest que, au nom du
respect de la nature et de la dignité de lhomme, on refuse
ce que lon pourrait appeler une amélioration de cette dignité.Au
nom de cette dignité, on veut maintenir lhomme en dehors
du champ du progrès.
Parallèlement au problème du respect de lordre
de la Nature, se pose aussi celui du respect du Hasard.Dans le second
Faust de Gthe, le héros crée, grâce à
lalchimie, un petit homme artificiel et sur mesure, et il sécrie
: Nous pouvons désormais nous rire du hasard. Cette
main mise sur le hasard, cest le problème du clonage.En
effet, le clonage ne consiste pas en une modification de lADN
mais en une fixation des caractères acquis pour empêcher
ainsi la loterie de la reproduction.
Le troisième problème, cest celui de la
finalité de lutilisation des nouvelles techniques médicales
et en particulier des manipulations génétiques. Faut-il
les refuser quand elles visent à une amélioration des
capacités, de léquilibre et du plaisir ? Mais dans
ce cas ne faudrait-il pas refuser aussi tous les psychotropes et les
médicaments de confort ? Et ne faudrait-il pas refuser aussi
la chirurgie esthétique et le sport, bref tout ce qui nous améliore
?
Le quatrième problème, cest celui du droit
à la liberté et au bonheur et des limites de ce droit.
Jusquoù a-t-on le droit de se créer une santé
sur mesure, des états dâme à la commande (grâce
aux psychotropes) et des enfants sur mesure et à la carte ?
Cest vrai quil doit y avoir quelque part une limite, et
ce parce que 10 lon peut devenir esclave de sa liberté.
Mais ces limites, où les fixer ? Et qui a le droit de les instaurer
?
Ce qui me frappe à propos des cas de conscience
que pose la bioéthique, cest que lon nest pas
cohérent.
- Ainsi, par exemple, on se lance avec passion dans des querelles
byzantines sur lidentité de lembryon et sur les devoirs
que lon a à son égard, mais on néglige des
millions denfants qui meurent dabandon.
- Ainsi encore, on refuse 11 (sauf cas très précis)
la technique du diagnostic pré-implantatoire qui permet de sélectionner
des embryons sains parce que lon voit là une forme deugénisme
12. Mais, par ailleurs, on fonde le fonctionnement de notre société
quasi exclusivement sur la sélection sociale et lexclusion
des sujets à risque. La vérité, cest que
je ne comprends pas quil y ait besoin dune éthique
particulière pour des problèmes tels que la procréation
artificielle, les greffes, et même lutilisation du génie
génétique pour lhomme.On a limpression que
les bio-éthiciens se délectent dans une sorte
de nouvelle casuistique technico-éthique élaborée
au coup par coup sous forme de prescriptions et dinterdits formulés
sur les nouvelles modalités scientifiques possibles de la conception.
Il me semble que, sil faut légiférer, il vaudrait
mieux le faire à partir de ce seul critère : la qualité
de vie qui est prévisible pour lenfant à naître.
Cest pourquoi, à mon avis, la naissance des bébés
éprouvette dans un milieu familial fiable ne pose pas plus
de problème que ladoption et même plutôt moins
: ces enfants auront un père, une mère, des frères
et des surs. Ils ne seront pas plus traumatisés que les
enfants nés selon la procédure habituelle et naturelle
13.
En revanche, ce qui, à mon sens, pose un problème éthique,
cest le fait que des parents alcooliques, intoxiqués ou
atteints de maladies héréditaires, impossibles ou difficiles
à soigner, puissent, en connaissance de cause, engendrer des
enfants que lon sait malades davance 14.
Je situerai ma morale par trois remarques.
- Au lieu de brandir la menace de catastrophes techniques, morales
ou théologiques, il serait plus honnête de se réjouir
des découvertes dans le domaine de la procréation et de
la génétique et de penser aux souffrances quelles
peuvent résorber.La morale, ce nest pas seulement avertir,
cest aussi se réjouir et louer 15.
- Sil faut légiférer dans le domaine de la fécondation
artificielle et de la génétique, ce nest pas rapport
aux méthodes qui président à la conception, mais
cest, je lai dit, par rapport au projet de vie qui est en
puissance dans cette conception.Ce qui doit nous guider, dans nos choix
et dans le choix des limites à ne pas franchir, ce nest
donc pas tant le respect de la Nature puisque celle-ci peut
engendrer le mauvais comme le bon, ce nest pas tant non plus le
respect du Hasard puisquil peut imposer à une
personne une vie insupportable pour elle et pour les autres, mais cest
le critère de la vie à venir et de ce qui la fera vivre
16.
Engendrer la vie de manière responsable et morale, cest
en faire une promesse 17.
- Ce qui est inadmissible, cest dutiliser ces techniques
pour fabriquer des enfants-victimes.Et cest aussi de prendre le
risque que certains progrès thérapeutiques puissent déclencher
de nouvelles pathologies 18.
3 - Lapprenti sorcier et le vrai dictateur
Troisième registre pour étudier notre question : cest
celui du danger des manipulations génétiques.A partir
de quand devient-on un apprenti sorcier ? A partir de quand donne-t-on
prise à un vrai dictateur ?
A mon sens, il faut craindre plus encore le vrai dictateur que lapprenti
sorcier.La raison de lhostilité que suscitent les techniques
médicales nouvelles, et en particulier leugénisme,
cest quon les associe au nazisme et au bolchevisme 19.
Ce qui inquiète, dans ces techniques, ce nest peut-être
pas tant le fait quelles enfreignent les lois de la Nature et
du Hasard, mais cest bien plutôt le fait quelles puissent
être mises au service de la volonté de puissance de lhomme
20.
Mais, bien sûr, il se pose aussi un second problème
: celui de lapprenti sorcier.La technique (y compris la technique
génétique) émancipe lhomme, mais elle sémancipe
aussi de lhomme.Les créations de lhomme lui échappent.Il
nen nest plus maître.
Pour le scientifique et pour le médecin qui se sentent devenir
des apprentis sorciers, trois options sont possibles :
Celle de Jacques Testard, qui a arrêté volontairement
de faire de la recherche dans le domaine génétique.Comme
le dit Hannah Arendt, lorsque lon acquiert un pouvoir, on tend
à le rendre illimité.Il faut donc renoncer au pouvoir.
Celle de Pierre-André Taguieff 21 qui fait lapologie
de la suppression des interdits et des tabous quels quils soient
et qui considère que lon peut et que lon doit tout
tenter pour offrir aux générations futures la possibilité
davoir un patrimoine génétique non dégradé.
Et celle de Jean Bernard qui énonce que le progrès
est seul en mesure de corriger le progrès et de rectifier les
défauts et les erreurs engendrés par le progrès.
4 - Le miracle et le diable Revenons au registre théologique
et biblique, et ce sera notre conclusion.
Une question se pose : les lois de la nature sont-elles les
lois de Dieu ? Ce qui est en cause dans les problèmes de la bioéthique,
cest le droit de lhomme à transgresser les règles
de la nature et du hasard, cest-à-dire, semble-t-il, les
règles dun monde créé par Dieu. Mais cette
transgression ne devient un problème théologique que si
lon considère Dieu comme le Créateur des lois de
la nature.Et ce nest pas là la conviction de tous les théologiens.
En effet il y a deux manières différentes de définir
Dieu, et lune des deux seulement en fait le Créateur des
lois de la nature.
Dieu peut être défini comme le Créateur du monde
(auquel cas le monde, la nature et le hasard doivent être considérés
comme naturellement bons). Mais Dieu peut aussi être défini
comme le Rédempteur du monde (auquel cas le monde, la nature
et le hasard ne peuvent pas être considérés comme
naturellement bons puisque Dieu veut nous sauver en nous arrachant à
lempire de ce monde).
- Si Dieu est dabord Créateur, les lois de la nature
sont les lois de Dieu puisquelles sont créées par
Dieu. Et en conséquence, il ne saurait être licite de les
transgresser.Ainsi, dans cette optique, lengendrement ne peut
donc se faire que par la voie de la sexualité naturelle.
- Si Dieu est dabord le Rédempteur du monde, cest
que la nature et ces lois ne correspondent pas au projet de Dieu, puisque
Dieu veut nous délivrer du mal et de ce monde.Et
en conséquence, il serait licite et même salutaire daller
à lencontre des lois du monde, de la nature et du hasard,
si cest pour aller dans le sens du salut et de la libération
qui nous sont promis par le Dieu Rédempteur.
On peut aborder ce même problème par un autre
biais : celui des miracles.Si Dieu fait des miracles, il le fait en
contredisant les lois de la nature 22.Cest donc que celles-ci
peuvent aller à lencontre de sa volonté. Et la transgression
de ces lois pourraient aller dans le sens du projet de Dieu 23. Ainsi,
la procréation artificielle et les techniques de génie
génétique pourraient être considérées
comme des miracles de la science allant dans le sens du
projet de Dieu.Cette manière de voir serait dautant plus
acceptable que les miracles, dans la Bible, vont souvent à lencontre
de la stérilité et des maladies, quils sont presque
systématiquement effectués par lintermédiaire
des hommes, quils peuvent être effectués par lintervention
de techniques 24 et quils apparaissent souvent en contradiction
avec les lois religieuses et légales des autorités religieuses
en place 25.
Mais il nen reste pas moins que les miracles, dans la
Bible, apparaissent souvent ambigus et quil est quelque fois difficile
de distinguer les miracles de Dieu des miracles du Diable 26. Le propre
du Diable, cest de susciter la confusion entre le bien et le mal,
entre le miracle et le sortilège.(Extrait de 7 questions pour
le 21ème siècle)
Alain
Houziaux
Conférences de lEtoile Nov. Décembre 2000,
54 av. de la grande Armée 75017 Paris
1 Schleiermacher, Discours sur la religion, Aubier-Montaigne, 1944
2 Dans le récit de Genèse 1, le verbe barar,
qui caractérise de manière spécifique une création
effectuée par Dieu seul, est employé pour la création
du ciel et de la terre (Genèse 1,1), pour la création
de la vie, (Genèse 1,21) et pour la création de lhomme
(Genèse 1,27).
3 Cf. Ambroise Paré : Je le pansais, Dieu le guérit.
4 Cf. Hans Jonas, Technique, Morale et génie génétique,
in Biologie et Morale, Revue Communio, Novembre-Décembre 1984.
5 Cette sélection, en ce qui concerne lespèce
humaine a été appelée leugénique.Elle
consiste à améliorer lespèce humaine en
limitant le droit à la reproduction aux meilleurs sujets.Cette
doctrine est non seulement dangereuse (cf. lexemple de lAllemagne
nazie), mais elle est aussi éronnée car on constate
que cest souvent le métissage qui est fructueux.
6 On entend par génie génétique une intervention
ciblée dans le patrimoine génétique dun
être vivant par le biais dun échange, dun
prélèvement ou de lintroduction dun ou plusieurs
gènes. Commission Nationale Suisse Justice et Paix, Ethique
chrétienne et médecine moderne, Labor et Fides 1999,
page 37.
7 Ceci seffectue et ce en supprimant le défaut génétique
sur ses ovules non fécondés ou sur ses spermatozoïdes
ou encore sur lovule fécondé.Ainsi on supprime
le défaut par une intervention relevant du génie
génétique soit sur lovule fécondé
in vitro, soit sur les testicules produisant les spermatozoïdes.
8 Cest tout le problème de lembryon, mais aussi
celui de lutilisation des cadavres.
9 Cest le problème des greffes.
10 Et je noublie pas que la désobéissance dAdam
et Eve a été justement de vouloir se nourrir du fruit
de lArbre de la Connaissance, ce qui devait leur donner la possibilité
dêtre comme des dieux.Ainsi, la désobéissance,
cest de vouloir méconnaître les limites.
11 Loi du 29 juillet 1994.Le Diagnostic pré-implantatoire
(D.P.I.) est réservé aujourdhui aux maladies génétiques
dune particulière gravité et reconnues
comme incurables : La mucoviscidose, certains myopathies et
certaines formes de retard mental.Cf. Le Monde du 5 octobre 2000 à
propos du D.P.I. effectué aux Etats-Unis (et qui ne laurait
pas été en France) ayant permis de sélectionner
un embryon pour créer un enfant apte à soigner
sa sur leucémique.
12 Cf. Le Monde du 5 octobre 2000.
13 Et si les bébés éprouvette devenus grands
ont des questions sur leurs origines, ce sont eux qui inventeront
la réponse et non pas les bio-éthiciens.Cf. O.Abel,
Contre la bioéthique, Autres Temps, Eté 1987.
14 Je sais que ce propos suscitera des réactions.Nous trouvons
normal que lon interdise à une personne en état
divresse de conduire parce quelle risque dattenter
à la vie dautrui.Mais par contre le droit dengendrer
en état de maladie transmissible et quels que soient
les risques pour lenfant à naître, nest jamais
remis en cause.Et ce parce quil relève dun droit
que lon dit naturel, celui dengendrer.Mais
à côté de ce droit, il y a aussi le droit de lenfant
à naître.Lenfant à naître a droit
à une vie normale.
Et ce que lon peut constater, cest que, dans certains
cas, on accepte que ce droit de lenfant prime sur
celui des parents, et que, dans dautres cas, on est beaucoup
plus réservé.Ainsi, par exemple ce droit de lenfant
(qui doit primer sur celui des parents) est reconnu dans les procédures
de divorce où la garde est décidée dans
lintérêt de lenfant, et ce au détriment
du droit du père ou de la mère à exercer sa paternité
ou sa maternité. De même, cest aussi, semble-t-il,
ce droit de lenfant que lon prend en considération
lorsque lon refuse à un couple dhomosexuels davoir
des enfants (lenfant de ce couple serait, dit-on, handicapé
par rapport à un enfant ayant deux parents de sexe différent).
Pourquoi donc accepte-t-on de mettre en avant le droit de lenfant,
cest-à-dire lintérêt de lenfant,
dans certains cas et pas dans tous les cas ?Je soupçonne que
lon navance lintérêt de lenfant
(et en particulier de lenfant à naître) que lorsque
cela nous arrange.Mais, en fait, ce que lon défend et
continue à défendre, cest le droit naturel.On
a tendance à toujours accepter les conceptions naturelles
quel que soit leur risque.Et on a tendance à toujours refuser
les conceptions hors norme mêmesi elles ne présentent
que peu de risques.
15 André Dumas, Morale et Procréation, Autres Temps,
Eté 1987
16 Deutéronome 30 : Jai placé devant toi
et la vie et la mort, et ce qui est en bénédiction et
ce qui est en malédiction. Choisis la vie afin que tu vives
toi et ta postérité.
17 Cf. Actes 2,39 : La promesse est pour vous et pour vos
enfants.
Dans la Bible, la loi nest pas au service de la Nature, mais
au service de laccomplissement dune promesse et dune
espérance.Et cest pourquoi elle sexprime au futur
en disant, par exemple, dans le Décalogue, tu ne tueras
pas, et on pourrait ajouter tu nengendreras pas
une vie qui sera une malédiction pour celui qui la vivra.
Cf. également chez Luther (Traité de la liberté
chrétienne) : la distinction entre les préceptes et
les promesses recoupe celle entre Loi et Evangile.
18 Un peu comme dans laffaire du sang contaminé.
19 Cest ailleurs à propos du procès de Nuremberg
que fut édicté le Code dit de Nuremberg qui comporte
dix règles visant à protéger lindividu
en tant quobjet dexpérimentation.
20 Modification des gènes humains à des fins de domination,
fabrication artificielle de sous-humains, fabrication
de souches de bactéries hautement pathogènes...
21 Retour sur leugénisme, Esprit, Mars-avril 1994.
22 Bien que M. X ait été déclaré inguérissable,
il est guéri à Lourdes ; bien que Sarah, la femme dAbraham
soit stérile, elle donne naissance à un enfant.
23 Dieu souhaite la guérison de tous ; le fait denfanter
un enfant bien portant est une bénédiction.
24 Jean 9,6 ; Marc 8,23
25 Cf. Jésus guérissant le jour du Sabbat.
26 Les miracles sont aussi considérés comme des tentations
(Exode 17,1-7, Matthieu 12,38-40), ils peuvent être réclamés
par le diable (Matthieu 4,1-11) et imputés au diable (Marc
3,22).