logo d'Évangile et Liberté

Archives

( liste des articles archivés)

AMOUR ET COMPASSION
Es. 49, 14-16a - Jean 21/15-17 -1 Jean 4/7-12 - Matthieu 5,7

Au-delà des politesses de rigueur et des ronds de jambes obligés, je commence par vous dire d’emblée et bien franchement, combien je suis émue et honorée d’être aujourd’hui invitée à… non pas "présider" (le terme est un tantinet lourd), mais à partager avec vous, au milieu de vous, le risque de la Parole.

Risque de la Parole, d’ores et déjà livrée aux aléas de la temporalité : au moment où j’écris ces mots, je suis dans l’aujourd’hui de mon travail, de ma réflexion. Et je ne puis faire autrement que de me projeter dans un autre aujourd’hui, celui de maintenant et déjà souvenir pour ceux qui lisent ces lignes…

J’avais- comme vous tous, pris connaissance des diverses interventions de ces Journées Libérales. Ce que j’écrivais - sera t-il - est-il a t-il été en phase avec ces interventions, ou décalé, ou redondant ?? Mais n’imitons pas l’âne de Buridan qui, ayant à la fois très faim et très soif, mourut d’inanition entre son baquet d’eau et son picotin.Il faut se lancer dans l’aventure du choc des temporalités, avec l’idée que d’un choc peut naître... une étincelle.

L’AMOUR À TOUTES LES SAUCES.

Amour et Compassion, donc ! L’ Amour, si bibliquement présent, et surtout, indispensable fondement du Testament du Christ, Pierre Angulaire du Sommaire de la Loi, Résumé ultime de tout commandement. L’Amour est, sous nos climats, ravalé à un terme bien galvaudé. La langue française a laissé s’appauvrir le vocabulaire du sentiment au-delà même du dessèchement : quasi jusqu’à l’absurde. On avait pourtant le choix : amour du goût, du penchant, une attirance, de la prédilection, et même, ce mot charmant et suranné des galants de Molière pour une belle cruelle, de l’inclination !

Mais on ne fait plus qu’aimer ! Devrions-nous le déplorer, alors qu’en testament, Jésus nous lègue le commandement nouveau : aimer tant et plus, de tout cœur et sans relâche ! Las ! Il s’agit bien de cela… Car on aime tout pêle-mêle : ses copains, Mozart, le jaune, les promenades sur la plage, les chats, le melon… et Dieu. Dieu que seul, on adorait. ‘Confusion des sentiments", érosion, et même, perversion de la valeur des mots : on a adoré un film, une eau minérale (St-Y…, j’adore ! Diable, on a les saints qu’on peut…) ; on brade l’amour dans son expression suprême pour quelques bulles de gaz ; sans compter qu’on a dégoté à la brocante du coin un amour de petit bibelot, forcément… adorable.

Maintenant que les jeunes préfèrent "craquer", voire"flasher", il se profile peut-être un espoir pour que le vrai Amour récupère un peu de ses droits et de son terrain. Pauvre Amour, comparable au sel de la terre qui a perdu son goût , jeté au caniveau, piétiné par la foule versatile, indifférente et cruelle. Pauvre Amour, vieux tissu qu’on a fait tellement craquer de partout que l’on chercherait désespérément quelqu’endroit encore sauf où coudre une pièce neuve.

Pauvre Amour, mis à toutes les sauces, dépouillé de sa vigueur, de sa richesse, de sa splendeur ; il me fait venir à l’esprit l’image des Prophètes, décrivant Jérusalem prostituée. Jérusalem la Belle, la Fiancée d’Election, la Princesse des nations.

L’AMOUR DANS L’EVANGILE DE JEAN

Nous sommes devenus si pauvres à exprimer avec justesse comment aimer, que ce passage essentiel de l’Evangile de Jean, dans ce curieux chapitre 21, seconde fin artificiellement plaquée sur la première finale du chapitre 20, que ce passage, donc, est devenu plat, insignifiant et dépouillé de sa substantifique moelle. La fine pointe du texte échappe (sauf aux hellénistes et biblistes ferrés à glace, corporation qui ne court pas les rues, sauf bien sûr, entre ces nobles murs...). "Pierre, m’aimes-tu ?" Mais bien sûr que je t’aime !

Apparemment, deux personnes "en phase", qui se comprennent 5/5, et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais au fond, dans l’essence de l’expression linguistique, un malentendu profond et révélateur d’une communication piégée par les lacunes du vocabulaire.

Parce que nous ne savons plus nuancer l’Amour.Les Grecs parlaient en Erôs, Philè, Agapè. Les Latins en Dilectio et Amor.Lorsqu’on fait le tour de nos traductions françaises de la Bible, le dialogue entre Jésus et Pierre tourne toujours court. Même notre regrettée et subtile France QUERE, dans sa "LECTURE DE L’EVANGILE DE JEAN" ne fait pas la différence entre l’Agapè proposée par Jésus et la Philè revendiquée par Pierre. Si je devais traduire ce passage, en tant que libérale convaincue, je privilégierais, bien-sûr, l’esprit du texte. Mais en l’occurrence, s'en tenir au seul verbe "aimer", n’est-ce pas aussi trahir aussi la lettre, puisqu’il faudrait deux verbes différents pour traduire deux notions différentes ? "Pierre, me chéris-tu ?". Oui, Seigneur, tu sais bien que je suis ton ami, ton copain !". A la troisième demande, : "Pierre, es-tu mon ami, mon copain ?". "Mais cela fait 3 fois que je te le répète…". Le disciple pense tristement que le Maître est devenu un peu dur d’oreille, ou distrait… Alors que c’est lui-même qui est dur, non d’oreille, mais de cœur, lui qui n’a pas su entendre l’offre d’Agapè. Pierre a beau être, dans ce chapitre supplémentaire établi sur le troupeau du Christ il ne peut accéder à la qualité secrète qui lie intimement le DISCIPLE BIEN AIME au Christ ; le partenaire d’élection au nom à jamais secret, dont la seule définition est le qualificatif d’"AGAPETOS", celui qui a atteint le niveau de l’excellence de l’Amour.

LES MOTS DE L’AGAPE : compassion, sympathie, pitié, charité, miséricorde.

Voici un rapide bilan des heurs et malheurs de l’Agapè. Quant à la compassion ?Elle porte elle aussi pas mal de cicatrices. Pourtant, elle est moins employée que l’Amour, et donc, devrait être moins usagée. Quoique, dans les grandes épreuves, dans les deuils, elle sert souvent d’expression passe-partout quand on ne sait que dire : "Vous avez toute ma sympathie". Sympathie/Compassion, deux parfaites jumelles gréco-latines pour dire le "souffrir avec". La sympathie est devenue chose frivole, perdant sa finale en même temps que sa force : c’est sûr qu’il ne nous viendrait pas à l’idée de plaindre le "petit bistrot sympa" du coin de la rue. Et le "compatir" est parti aux oubliettes en même temps qu’un mot si simple, si beau, et pourtant hélas, maintenant regardé avec méfiance, et pris avec moult pincettes : la pitié.

La pitié, doublet de la piété, toutes deux filles de la pietas latine.Un bien beau couple, qui rendait si parfaitement le Sommaire de la Loi. De l’Homme à Dieu, Piété.Puis de Dieu à l’Homme et de l’Homme à l’Homme, Pitié.Et enfin cette superbe notion de l’Homme qui a pitié de Dieu crucifié avec les souffrances du monde : juste et noble retour des choses, ainsi formulé par le pasteur Dietrich BONHOEFFER, dans son poème "Chrétiens et païens":

"Des hommes vont à Dieu dans sa misère
Le trouvent pauvre et méprisé, sans asile et sans pain
Le voient abîmé sous le péché, la faiblesse et la mort.
Les chrétiens sont avec Dieu dans sa Passion"
(In : Résistance et soumission, L&F, Genève, 1973, p. 361).

En un mot, les hommes sont invités à "Com-passionner" avec Dieu. La pitié/piété, c’est aussi la figure de la pieta, une mère qui pleure, le cadavre de son enfant sur les genoux. Femmes d’Algérie, de Bosnie, du Rwanda et d’ailleurs, ni saintes, ni vierges, simplement hélas des pietà, victimes de l’éternel massacre des innocents : "Une voix s’est fait entendre à Rama, des sanglots, des larmes amères. Rachel pleure sur ses fils ; elle refuse d’être consolée sur ses fils" (Jr 31.15).

Et pourtant, par les temps qui courent, la pitié est synonyme de mépris, de condescendance. Un autre beau mot, très proche, est devenu incontestablement péjoratif : la commisération. Et pourtant, quelle haute vertu que de se réclamer partie prenante de la misère d’autrui ; Cependant, on évite la pitié comme une pestiférée ; on la refuse comme un os jeté à un chien : je n’ai que faire de votre pitié !

La pitié est devenue synonyme d’une gifle, d’un outrage rajouté aux outrages de la misère physique et/ou morale. On fait la manche dans le métro, on accepte l’argent, mais pas la pitié. Du reste, on fait la manche, mais surtout, on ne demande pas la charité ! Pauvre charité elle-aussi tristement vilipendée : "vous faites cela par charité, parce que vous voulez m’humilier"… Quant à l’aumône, n’en parlons pas ! Et pourtant… A l’origine, le verbe grec eleein, éprouver de la pitié, de la miséricorde. On le connaît peut-être par l’invocation "Kyrie Eleison" ; mais sait-on bien que c’est le verbe de la 5ème Béatitude : "Heureux les miséricordieux…" ? Alors la Béatitude signifiant vraiment "Heureux les apitoyés, car vous serez objet de pitié", "Heureux les faiseurs d’aumône (et pourquoi pas les aumôniers ?), car vous recevrez, aux jours difficiles, ne serait-ce que l’aumône d’un sourire, d’un regard… compatissant". Où sont là le mépris, l’avilissement et la dérision du pauvre ?

Mais là, Amour et Charité se donnent la main dans une commune damnation : et pourtant, dans l’esprit de la Bible, dans l’esprit de Paul, ils ne font qu’une seule et même chose : l’Agapè ; celle qui surpasse la Foi et l’Espérance, et qui ravale tous les talents au magasin des accessoires (1 Co. 13). Il est, donc, long et affligeant, l’inventaire des noms de l’Amour bradé et saccagé. Commisération, salie d’un sourire méprisant ! Miséricorde, reléguée au rayon desséché du vocabulaire religieux, à la rigueur inusable question à 1000 francs, en tant que repose-fesse pour moine assoupi…

L’AMOUR SE SUFFIT A LUI-MÊME ?…

Hélas, Amour, Compassion, Agapè, Philè, vous avez tous en commun d’être les victimes de terribles contresens. mais gardons-nous cependant de vous mettre dans le même panier, car si vous êtes tous frères, vous êtes loin d’être jumeaux. Aimer, Amour, peuvent à la limite, se passer de complément.On aime, un point, c’est tout ! Sentiment absolu qui peut presque se passer d’objet ; lorsque, justement, dans son expression la plus extrême, il peut abolir la notion de sujet et d’objet, transgressant les frontières du JE et du TU.

Je me souviens d’avoir lu avec étonnement cette maxime, au plafond d’une église d’Allemagne : "AMOUR UERUS SEIPSO CONTENTUS" : le véritable amour se satisfait de lui-même. Serait-ce une superbe déclaration d’égoïsme, de rayonnante auto-suffisance ?Une sorte de "parthénogénèse du sentiment" où le monde extérieur est renommé superflu ?Orgueilleux, exclusif tête-à-tête, à la limite moins avec l’Aimé qu’avec son propre sentiment.Amour-narcisse qui rit à mort de se voir si beau en ce miroir Du serpent qui se mord la queue, au cercle parfait verrouillé sur soi-même, au "COR INCURUUM IN SE", cœur recroquevillé, effondré sur soi, le grand Péché aux yeux de Luther, il n’y a qu’un pas.

L’Amour, même à deux, peut-être une passion dévorante. Certes, qui ne s’est un jour attendri de surprendre le regard des amoureux : autour d’eux, le monde peut crouler, qu’importe ! Il n’existe que la bulle magique qui les fait planer "loin de la foule déchaînée". Ils s’unissent dans ce regard extatique où l’un se fond en l’autre. Cette expérience d’amour exclusif et brûlant ne se limite pas au couple humain, dans la mesure où elle a tant de fois servi à décrire l’ineffable contemplation entre le mystique et Dieu.

AMOUR ELAN MYSTIQUE

Si l’on parle en termes amoureux pour décrire l’élan mystique, voici, d’emblée, deux femmes : les deux Thérèse, d’Avila et de Lisieux, deux virtuoses en la matière. Mais beaucoup ne se privent pas d’ironiser sur le "transfert", la frustration de l’homme idéalisé en Dieu, les "noces mystiques"… Et de gloser, l’oeil brillant, sur la nature de l’extase entre jouissance et souffrance qui convulse le visage de la sainte transpercée, dans le groupe de marbre "La Transverbération de Sainte-Thérèse" du Cavalier BERNIN.Voire ! Le mysticisme n’est pas toujours une perversion sexuelle. Jean de la Croix, Pierre d’Alcantara (franciscain, 1499-1562), et les mystiques rhénans, Henri Suso, Tauler et, last but not least, Maître Echkardt, ne sont pas des nonnes énamourées !

"Réjouissez-vous, je suis devenue Dieu", osait écrire la bienheureuse Angèle de Foligno, mystique franciscaine du XIIIème siècle. Moi et Toi, Je et Tu, se fondent dans une surprenante dépersonnalisation. L’Amour total consiste-t-il à abolir son "je" pour se laisser docilement coloniser par le "tu" ? Est-ce un service à rendre à l’autre que de jouer à la mante… religieuse? Je t’aime, donc je tue et en retour, je me laisserai tuer, absorber, évanouir en toi.L’Amour ne peut-il se prouver sans allégeance, phagocytose et sacrifice ? N’est-il pas écrit : "tu aimeras ton prochain comme toi-même" ? Impossible si l’un des deux est mangé. Moi et l’Autre, Je et Tu, ne peuvent s’aimer et s’aider que dans la reconnaissance mutuelle des différences. Ce n’est pas, comme disent les enfants : "Moi, c’est moi, et toi, t’es toi (tais-toi !)", mais "moi je reste moi, et toi, que dis-tu?".

Le flamboiement exclusif de l’amour a certes un côté divin, mais si divin, que peut-être, un peu étranger à notre humanité. Reprenant Blaise PASCAL, pourquoi ne pas accepter le "divertissement", non comme une échappatoire facile à la contemplation et ses risques, mais un sain retour de nos extases vers un vécu plus terre-à-terre, mais humble, comme nous… ?

AMOUR ET COMPASSION ENSEMBLE

Mais sans doute ne faut-il pas différencier Amour et Compassion de façon trop caricaturale. L’Amour n’a pas la caractéristique exclusive d’aspirer vers le haut, d’être un sentiment fort, divin, une passion. Tandis que la compassion serrait un sentiment tendre, humain, partagé… L’Amour n’implique pas nécessairement la souffrance, même si aimer véritablement amène tôt ou tard à souffrir. Tandis que la Compassion naît implicitement d’un regard jeté sur la souffrance de l’autre. Ainsi, l’un tendrait vers le haut, la seconde vers le bas. Mais ces élans divergents ne les renvoient pas dos-à-dos, mais bien plutôt face-à-face. Non adverses, mais complémentaires. l’envers et l’avers de la même médaille.

Peut-être quelque chose à chercher du côté du symbole du Yin et du Yang, qui s’interpénètrent, se contrebalancent, s’équilibrent ? Ce pourrait être l’image de l’humain, capable des plus nobles élévations et des plus terribles abaissements. Haut/bas, Yin/Yang, Soleil/Lune, Feu/Terre nourricière, Ish et Ishah ("mâle et femelle il les créa", Gen. 1,27). Et pour nous, image du Christ, si hautement divin et humblement humain, image attestée par le Prologue de Jean, chantre du Verbe incarné, et l’Hymne de Philippiens 2 : "Il n’a pas retenu comme une proie à arracher d’être égal à Dieu, mais il s’est "vidé" lui-même, prenant la condition d’esclave…" (Ph. 2,6-7).

A cette image du Christ humilié, la compassion pourrait être, en quelque sorte, une "kénose" de l’Amour. La compassion rééquilibre la contemplation amoureuse, et même, elle la crédibilise. La Bible entière résonne de cette mise en garde contre une foi "cérébrale" qui ne mettrait pas la main à la pâte. L’Epître de Jacques, "l’Epître de paille" qui fâchait tant Luther, n’est pourtant pas mal fondée à recommander :

"Si un frère ou une sœur sont nus, et manquent de la nourriture de chaque jour, et que l’un d’entre vous dise : Allez en paix, chauffez-vous et rassasiez-vous ! Sans lui donner ce qui est nécessaire au corps, à quoi cela sert-il ?" (Jc 2, 15-16)

Maître Eckhardt, évoqué tout-à-l’heure y pensait peut-être en écrivant :

"Si quelqu’un était dans un ravissement, comme ST-Paul, et savait qu’un malade attend qu’il lui porte un peu de soupe, je tiendrais pour bien préférable que, par amour, tu sortes de ton ravissement, et serves le nécessiteux dans un plus grand amour" (in : Instructions Spirituelles). C’est, bien sûr, la Multiplications des Pains, où Jésus invite ses disciples à prendre soin des corps après l’instruction des esprits. Parce que Jésus, au sens propre de l’Evangile, est "pris aux tripes" (traduction garantie), par la détresse des hommes. La compassion, ce sont les "entrailles de Dieu", de… Notre-Mère qui es sur Terre" !!

AMOUR : CIEL ET TERRE

Si nous étions assez hardis pour concevoir Dieu sans catégories d’âge, de race, de couleur, et même de sexe, peut-être (réflexion passagère et nullement agressive), certains chrétiens seraient plus proches d’un Dieu pas nécessairement vénérable potentat toujours courroucé ; et peut-être seraient-ils plus authentiquement et efficacement proches de Marie, simple femme de Nazareth, hasardeuse et blessée, sans recourir à une Déesse-Mère antédiluvienne, très Sainte, Très vierge et très Mère, et surtout très lointaine de moi, pauvre mortelle. Au-delà de la proclamation si profonde dans sa provocation "I met God, she is black !" (J’ai rencontré Dieu, elle est noire !), on rejoint l’intuition d’Esaïe (49,14-16a) d’un Dieu maternel, et pour reprendre l’expression superbe d’André CHOURAQUI, un Dieu "matriciel".

L’Amour ne nous invite à contempler vers le haut que pour mieux regarder en bas. Jean l’Evangéliste joue sur le mot "élever de terre", pour le Christ à la fois glorification et pendaison sur la croix : la croix, point de jonction entre le sublime et l’atroce à l’état pur. La croix : lieu où nous sommes conviés à élargir la géographie de notre cœur, non seulement à la hauteur et à la profondeur, mais aussi à la longueur et à la largeur (cf Eph. 3,18). Aucune dimension, aucun point cardinal n’échappe ainsi à la parfaite géométrie de l’amour parfait allié à la parfaite compassion.

On peut avoir des réserves quant à la formulation des diverses confessions de foi. Dans celle de l’Eglise Réformée de France, j’aime à retrouver ce mouvement, qui en préambule "fait monter son cri vers le Père des Miséricordes", puis affirme manifester sa foi par "la lutte contre les fléaux sociaux". Dans cet esprit, le mouvement du Christianisme Social a bien su lier la gerbe d’Amour et Compassion.

Un jour, une dame, fort avancée dans l’ordre Rosicrucien, m’a donné son interprétation du symbole de l’étoile de David, et j’en suis restée frappée : l’étoile comporte deux triangles ; l’un s’enracine de toute sa base dans le terrestre pour s’élever en pointe vers le haut, figure de l’élan vers le Divin. l’autre triangle, prend sa source en haut et descend, s’affinant, vers le bas, pénétrant l’autre. Le triangle viril aux larges épaules, féconde le triangle féminin aux larges hanches. Lequel est Amour ? Lequel Compassion ?Le triangle qui monte est celui qui est lourd de ses racines terrestres ; celui qui descend semble avoir contemplé les choses d’en-haut… Au triangle terrestre, il n’est pas refusé de monter comme une flamme vers ces choses ; tandis que le triangle céleste ne dédaigne pas de pousser sa pointe plus bas que la base de l’autre.

Et leur géométrie complémentaire s’inscrit dans la figure parfaite du cercle. Et ce cercle, né de la fusion des deux entités, pourrait être, non plus une bulle d’égocentrisme stérile, mais un œuf, gros de l’espoir des lendemains du monde, que nous tenterons de faire chanter en nous rappelant ceci "N’ayez pas peur !".

Récit Christine Durand 18/10/98 - Sète.
Journées Evangile et Liberté

haut


Accueil

Pour s'abonner

Rédaction

Soumettre un article

Évangile & liberté

Courrier des lecteurs

Ouverture et actualité

Vos questions

Événements

Liens sur le www

Liste des numéros

Index des auteurs

dernier N° complet


Vous pouvez nous écrire vos remarques, vos encouragements, vos questions