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Sainte Cène, symbolique et nouvel-âge

Associer Sainte Cène et Nouvel Age peut sembler à beaucoup de lecteurs un non-sens. Si la Sainte Cène, préfiguration du Royaume, partage et rappel du repas du Seigneur, est depuis toujours inscrite au coeur de nos pratiques cultuelles, le Nouvel Age, quant à lui, porte en son sein une idée de gnose nous rappelant que ce mot définit une pensée jugée comme hérétique par l'Eglise. Aujourd'hui, le Nouvel Age est critiqué parfois très sévèrement, surtout par ceux qui n'en perçoivent que les exagérations que nous transmettent les médias ; il est apprécié, au moins en partie par ceux qui l'ont rencontré. Le Nouvel Age se définit comme une soif -et donc une recherche passionnée- de spiritualité dans un monde trop matériel. Cette recherche a toujours existé depuis que l'homme pense ; elle va dans tous les sens, s'exprime de multiples manières, puise dans la méditation antique, extrême orientale, annexe les derniers résultats de la science physique, de la psychologie ; elle s'alimente à toutes les mystiques, philosophiques...etc... pour pousser un cri, parfois désespéré, pour nous appeler à vivre une spiritualité forte, une communion avec le créé, avec les autres et avec nous-mêmes, pour unir tout ce qui est brisé et séparé. Le Nouvel Age est sûrement porteur d'amour. Même si nous ne sommes pas toujours d'accord il me semble fondamental aujourd'hui de rencontrer le Nouvel Age, cette "nébuleuse mystico-ésotérique" comme le dit F. Champion. La Sainte Cène, notre communion, comme son nom l'indique, est bien elle aussi acte d'amour, moment d'intense spiritualité et d'union avec Dieu et entre nous. Les lignes qui suivent, veulent traduire la Sainte Cène en langage du Nouvel Age. Cette traduction passe par le déchiffrage du symbole. Le symbole est communion, union des morceaux, reconnaissance et renaissance. Le symbole peut nous faire vivre l'inexprimable. On ne peut que regretter amèrement d'avoir vu nos églises se vider de certains symboles et d'avoir vidé le sens de ceux qui restent. Que signifient le bâtiment lui-même, la chaire, la table, la croix, la musique, la disposition des participants...etc.. Regrettons de ne plus savoir lire les symboles, d'y être étranger. Il n'y a que très peu de commentaires bibliques nous offrant une lecture symbolique et mystique des Ecritures et nous abandonnons cela aux courants de la "nébuleuse mystico-ésotérique" qui parfois s'y perdent mais qui aussi y atteignent des sommets de spiritualité.

Traduire la Sainte Cène en langage Nouvel Age, c'est vouloir montrer qu'il est possible de vivre un "christianisme New Age" ou "Mystico-spirituel et holiste" ; c'est-à-dire dans l'unité du créé et du père sans être une uniformité. Parce que nous nous plaçons ici dans un christianisme New Age, nous gardons la notion d'un Dieu Personnel - le Père- et nous abandonnons la notion trop "panthéiste du grand Tout".

La Sainte Cène commence par une invitation. Une demande du Christ à venir partager le pain et le vin. Comme chacun le sait, ce n'est pas l'officiant qui invite mais le Christ lui-même. Comment, aussi bien dans le catholicisme que dans le protestantisme, a-t-on pu décréter qu'un tel ou un tel n'était pas digne de participer au repas du Seigneur ? Si la cène est ouverte à quelqu'un, c'est bien à celui qui en est le moins digne et qui en a donc le plus besoin ou à l'exclu qui doit être réintégré dans le monde. Le Christ n'a jamais demandé à quiconque un bilan de sa vie pour le rencontrer. Le Nouvel Age a une mentalité résolument ouverte et accueillante ; il ne comprend pas l'exclusion surtout dans le domaine spirituel. Il est vrai que la Cène telle que la pratiquent les protestants est "ouverte" mais nous nous posons la question de savoir si les non baptisés peuvent y être admis. Question vide de sens dans le Nouvel Age.

L'adepte du Nouvel Age, baptisé ou pas, répondra à l'invitation telle qu'il la ressentira dans son for intérieur à travers la liturgie de la Cène. Il viendra participer à une vérité et une réalité spirituelle par les symboles et par sa spiritualité. Nous ferons une double lecture du symbole.

1) Le cercle cosmique ou la danse sacrée :

Ayant répondu à l'invitation, nous formons le cercle autour de la table sur laquelle se trouvent le pain et le vin, la Bible (théoriquement ouverte) et parfois la croix. Le cercle symbolise le cosmos dans ses limites, il est englobant. Dans la Cène nous englobons le monde. A ce moment il prend symboliquement forme, il a du sens. Nous englobons le monde dans une chaîne dont chaque participant est le maillon. La chaîne est signe de solidarité, de complémentarité et d'union. Elle est service et amour quand nous servons notre voisin. La chaîne ne peut être complétement fermée ; il y faut au moins trois places en plus des présents visibles : celle de Jésus, homme parmi les hommes et présent parmi eux, celle de l'absent fatigué, malade ou décédé qui n'a pu venir et est là présent en esprit ; et enfin celle d'un éventuel retardataire. Signe de la chaîne du monde, action de partage et d'accueil en signe d'amour, il manque la méditation qui pour le Nouvel Age s'exprime en terme de “vibrations” ou “d’ondes” émises par nos corps en harmonie avec nos cœurs. Dans la méditation, chacun met ses vibrations en relation avec celles des autres.Il ne peut y avoir qu’harmonie et accords, que la musique accompagne, pour la danse sacrée.David danse devant l’arche, anges et chérubins chantent et bougent, la danse est l’expression corporelle primitive de la joie. Et c’est bien avec notre corps aussi bien qu’avec notre esprit que nous célébrons notre Dieu, que nous vivons de sa présence. La chaîne Cosmique, la danse et la nourriture spirituelle partagée fondent le vécu du Royaume. Nous sommes en harmonie vibratoire les uns avec les autres et avec le Jésus de l’histoire au delà du visible.

La danse sacrée n’est pas le chaos car le centre structure l’ensemble.Le centre est le Christ cosmique, véritable axe du monde, qui relie tous les points du cercle entre eux par les rayons qu’il tisse par son énergie. Cette énergie nous est communiquée, c’est la grande énergie cosmique, principe vital.C’est elle qui nous fait saisir l’au-delà de nous mêmes, l’éternité.Le regard matérialise cette énergie.Le regard sur les symboles fait vivre. Regard sur la table signe d’accueil, de nourriture et de partage ; regard sur la croix, arbre décharné de la mort et de l’amour ; regard sur la Bible ouverte qui livre la Parole ; regard sur le pain et le vin, signes du travail, de la promesse de la récolte, de la nourriture de base. Regard aussi sur tous les visages qui constituent le cercle. Car un cercle, quand on se situe sur sa limite, tourné vers l’intérieur est la figure géométrique qui ne laisse jamais une image en dehors du champ visuel.En bref, regard sur la Vie, sur les vies qui, ensemble, posent l’identité dans sa spécificité mais aussi dans la complémentarité et la dépendance. La Cène nous révèle à nous-mêmes, nous invite à la méditation intérieure et à l’ouverture sur les autres et sur l’Autre, toujours révélateur.

2) Le Jardin d’Eden :

Outre ce que dit le christianisme classique sur le Royaume, le mémorial et “l’anamnèse”, le New Age, très écologique, a au cours de la Cène une vision du Royaume étendue à la Création par la symbolique de l’arbre. La Cène, ronde cosmique, devient image du Jardin d’Eden. La Création achevée, la Genèse nous présente le Jardin d’Eden jardin d’arbres où se trouve Dieu, jardin royal avec ses deux arbres centraux, celui de la connaissance et celui de la vie.L’arbre se retrouve partout dans la Bible : l’Arche de Noé en bois, le chêne de Mambré, l’échelle de Jacob, la branche d’amandier, le sycomore de Zachée, la croix, l’arche de vie dans la Jérusalem céleste de l’Apocalypse et combien d’autres encore ! Pourquoi cette symbolique de l’arbre dans l’Ecriture ? Parce qu’elle nous révèle l’homme comme lieu de communication. L’arbre est un cosmos avec ses racines qui plongent en terre, le tronc qui passe par la surface du monde et relie l’arbre aux cieux, domaine de Dieu. Il y a communication entre la Sève qui monte de la terre, force intérieure et télurique, et la lumière qui attire et vient d’en Haut. Les branches en tous sens montrent l’universalité de la communication. Cette communication est absolue sur la Croix qui “dit” Dieu. Les hommes eux-mêmes sont des arbres, les membres inférieurs sont les racines posées au sol et y puisant l’énergie de la terre.Le tronc est le même mot que pour l’arbre ! Les bras et les doigts désignent bien les branches et les rameaux.La tête et l’intersection du tronc et des bras désigne le lieu de l’échange des énergies. La symbolique va jouer sur plusieurs plans. La Cène rend l’image de l’Eden : nous sommes les arbres, l’arbre de vie étant bien là au centre, dans la lumière divine comme la décrit la vision de la Jérusalem de l’Apocalypse. La Cène devient lieu d’échange des esprits, de la terre, des hommes, de Dieu. Elle est lieu de communication, donc de Parole. Ici le New Age -qui n’est pas nouveau finalement !- rejoint le Christianisme pour l’enrichir. La Cène, préfiguration du Royaume par la présence spirituelle du Christ saisie à travers le pain et le vin, devient réalité par les symboles qu’elle véhicule, par l’appel à la connaissance et à la spiritualité. Cette Communion au créé par l’image de l’arbre, à la terre par les pieds et les jambes, à l’esprit des morts, à celui des absents, à l’Esprit divin nous projette hors du temps, dans un moment d’éternité, dans un nouvel Eden.

La Cène est un sujet inépuisable et nous resterons toujours en deça des mots et des impressions pour en sonder l’insondable mystère. Chacun peut y puiser la vérité à sa manière.Beaucoup verront dans ces lignes écrites ci-dessus des évidences, certains seront peut-être choqués.Dans tous les cas, une approche de la Cène marquée par “l’esprit Nouvel Age” nous rappelle ceci : l’Amour doit conduire à l’accueil inconditionnel de l’autre. Par les vibrations harmonisées des consciences cosmiques terriennes humaines et divines (nous sommes là hors du christianisme classique), l’analyse New Age de la Cène nous dit que la communion intègre toute la Création : passée, présente et future.Enfin ce type d’analyse insiste sur le rôle de la symbolique, rôle hélas trop souvent perdu. Tous ces enseignements sont là pour enrichir notre spiritualité, pour nous permettre de nous situer et pour nous faire saisir davantage l’Amour de Dieu.

Vincens Hubac

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