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articles du N° 170 - Octobre 2003

( sommaire )

Éditorial
Bible et liberté

L'étude honnête et lucide de la Bible conduit à des convictions de grande liberté intellectuelle. C'est mon expérience personnelle.

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Dans la Bible on découvre deux récits différents de la Création (Genèse chap. 1 et 2), deux histoires des rois d'Israël (Samuel-Rois et Chroniques), 4 récits différents de la résurrection de Jésus (à Jérusalem et en Galilée, Evangiles).

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Des doublets se retrouvent dans les Psaumes. Des styles littéraires présentent leurs affirmations : récits d'auteurs, poêmes, paraboles, contes, réflexions, mythes évidents (géants, fils de Dieu unis aux filles des hommes héros, Genèse 6 /4). Nous avons affaire à une collection de textes, une multiplicité d'approches spirituelles d'une richesse extraordinaire et d'époques très variées. On trouve ainsi plusieurs théologies juxtaposées. Il y a des traditions (continuité dans le dire et le vivre) opposées et contradictoires.

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Des correspondances s'établissent entre la Bible et les littératures anciennes du proche Orient : Déluge, Sagesse, Divinités, rites...

Moïse aurait été instruit de toute la science des Egyptiens. Les Cananéens, indigènes sédentaires, ont marqué la mentalité et la piété des croyants de la Bible, vivant sur la Terre de Canaan.

On ne peut pas dire « La Bible affirme que... » en citant un verset isolé coupé de son contexte et de l'ensemble des livres de cette bibliothèque. Les versets ne sont pas des billes de jeu séparées les unes des autres comme dans un tiroir (chapitres ou livres). Quand on lit la Bible il faut se situer dans son contexte littéraire et historique. En public cette mise en place devrait toujours être donnée avant toute la lecture. Il faut situer un extrait dans son cadre. C'est l'honneteté ! La Bible est une mosaïque.

Dans le cours des siècles, des idées ont évolué : conception qu'on se fait de Dieu (du nationalisme à l'universalisme), la vie après la mort (du Shéol à la resurrection individuelle), la foi, les rites religieux... Les textes ont été écrits non par des journalistes munis de magnétophones portatifs, ni de camescopes, mais par des croyants parfois 5 ou 6 siecles après les évènements qu'ils rapportent (par exemple Josué et les Juges).

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Mais dans ces textes passe un souffle de sincérité, de vérité et de foi qui gonfle les voiles de notre aventure humaine et nous entraine dans l'orientation de notre vie. Une révélation nous ouvre sur des horizons d'une infinie beauté. Une Parole nous interpelle et nous convainc. Nombre de lecteurs attentifs ont été bouleversés. Leur vie a été transformée et le sens de leur existence. En 1535 sur la première page de la Bible qu'il a été le premier à traduire des textes hébreu et grec Olivetan cite

« Escoutez cieulx
et toy terre preste l'aureille :
car l'Eternel parle » Esaïe 1

Christian Mazel

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Textes divers

Les croyants, juifs et chrétiens partagent le même Premier Testament

Shema Israël, « Ecoute Israël »

Ecoute, Israël, l'Eternel notre Dieu est Un.

Béni soit-il !

La gloire de son règne est éternelle.

Tu aimeras l'Eternel ton Dieu de tout ton coeur,

de toute ton âme et de tout ton pouvoir.

Que les paroles que je prescris aujourd'hui

soient gravées dans ton coeur.

Tu les inculqueras à tes enfants,

tu en parleras en demeurant dans ta maison,

en allant en chemin, en te couchant

et en te levant.

Imprime-les sur ton bras,

grave-les entre tes yeux,

inscrits-les

sur les poteaux de ta maison

et sur tes portes.

C'est la profession de foi, par excellence, du judaïsme. Le matin avant toute activité, puis le soir, le juif adulte s'enveloppe d'un châle, se tourne vers Jérusalem et le Temple et récite à haute voix cette prière, que nous pouvons retrouver dans la Bible, au livre du Deutéronome (chapitre 6, versets 4 à 9). Le « Shema » met l'accent sur le devoir d'aimer le Seigneur intégralement et radicalement.

L'Esprit de la Bible

Ce qui confirme - ce qui scelle en moi, disait Calvin - l'autorité de l'Écriture Sainte, c'est que l'Esprit qui parle en moi tient le même langage que l'Esprit qui parle dans la Bible ; l'Esprit témoigne à mon esprit que ce que dit la Bible est vrai et mérite créance.....

En fait, lorsque nous lisons la Bible, nous nous apercevons que l'Esprit redit en nous à la deuxième personne du singulier ce que la Bible dit à la troisième personne. La Bible parle de l'homme ou de certains hommes; elle ne parle pas de vous ou de moi personnellement; mais c'est l'Esprit qui me dit: " Toi aussi, tu es pécheur " ; il individualise pour moi ce que la Bible rapporte des autres. De même que dans la Bible Dieu parle à des hommes concrets, de même l'Esprit me parle à moi personnellement, et il m'applique précisément ce que dit la Bible du péché de l'homme, de sa repentance, du pardon qui lui est promis, du salut qui lui est offert. "Cet homme, c'est toi".

A. N. Bertrand

« L'autorité de la Bible »

La Bible à la diète de Worms (1521)

À moins d'être convaincu par le témoignage de l'Écriture et par des raisons évidentes -car je ne crois ni à l'infaillibilité du pape ni à celle des conciles (il est manifeste qu'ils se sont souvent trompés et contredits) -, je suis lié par les textes bibliques que j'ai apportés, et ma conscience est prisonnière de la Parole de Dieu. Je ne puis ni ne veux rien rétracter, car il n'est ni sûr ni salutaire d'agir contre sa conscience. Que Dieu me soit en aide ! Amen !

(Martin Luther, 1483-1546, réformateur allemand, moine puis pasteur et docteur en théologie. Déclaration lors de sa comparution à la diète de Worms le 17 avril 1521)

Qui fait l'autorité de la Bible ?

La Confession de foi des Eglises réformées de France (1559) affirme que les livres qui composent la Bible sont « canoniques et règle très certaine de notre foi, non tant par le commun accord et consentement de l'Église, que par le témoignage et persuasion intérieure du Saint-Esprit qui nous les fait discerner d'avec les autres livres ecclésiastiques » et que « la parole qui est contenue en ces livres est procédée de Dieu, duquel seul elle prend son autorité, et non des hommes » (art. 4 et 5).

Témoignages sur la Bible

Notre héritage

Dans l'Épitre à tous amateurs de Jésus-Christ et de son Évangile (1535), préface à la traduction française du Nouveau Testament par Olivétan, Calvin exprime clairement cette revendication :

« Or nous sommes tous appelés à cet héritage sans acception de personnes, mâle ou femelle, petit ou grand, serviteur ou seigneur, maître ou disciple, clerc ou laïc, Hébreu ou Grec, Français ou Latin, nul n'en est rejeté ; quiconque par certaine fiance recevra ce qui lui est envoyé embrassera ce qui lui est présenté, bref, qui reconnaîtra Jésus-Christ pour tel qu'il est donné du Père. Et pourtant, tous et toutes qui portons le nom de chrétiens et chrétiennes, nous laisserons-nous ravir, cacher et corrompre ce Testament, lequel si justement nous appartient, sans lequel nous ne pouvons prétendre à aucun droit au royaume de Dieu, sans lequel nous ignorons les grands biens et promesses que Jésus-Christ nous a faites. la gloire et la béatitude qu'il nous a préparées ? »

Jean Calvin (1509-1564)

Un livre terrible

Je pense toujours que la Bible est une somme de richesses, une bibliothèque en soi, mais aussi un livre terrible où les intégristes et toutes les espèces d'illuminés peuvent trouver un miel qu'ils changent en fiel. Pour ma part, à vingt ans, elle m'a conduit vers le socialisme et l'acte révolutionnaire dans l'espoir de protéger les classes opprimées et de lutter contre toutes les exclusions. Je continue cette résistance. Je mets l'Évangile en actes, de l'infime geste au plus grand. Le gouvernement nous annonce que la morale s'arrête au seuil de la raison d'État. Cette formule a 4000 ans !

La plupart des gens trouvent inutile de se battre contre les horreurs de notre monde, puisque Dieu en terminera quand il le voudra. Le fatalisme est pratique, il démobilise les énergies. Certes, ce ne sont pas quelques manifestations ou pétitions qui feront cesser l'esclavage, les ventes d'enfants, la faim, la grande misère, les diverses exclusions. Mais de telles perpétuelles tragédies ne peuvent qu'inciter à l'action pour exprimer notre désaccord et, ainsi, sauver l'honneur.

Théodore Monod (1902-2000)
docteur en sciences naturelles
professeur et naturaliste

Devenez prophètes !

Prédicateurs de l'Évangile, devenez prophètes, car c'est à cela que vous avez été appelés par votre vocation. Ne vous contentez pas de réciter interminablement une Parole mise en pages, mise en conserve il y a bien longtemps. Ayez foi en Dieu. Il veut parler aujourd'hui à nos contemporains, membres ou non de nos Eglises et il compte sur vous pour cela. La foi apprend à déchiffrer l'Ecriture par l'Esprit pour qu'elle devienne l'authentique Parole de Dieu qui interpelle et change le monde. Et la foi apprend aussi à déchiffrer les signes du temps, à interpréter les évenements proches ou lointains et tout cela vous pouvez, vous devez le faire. Réciter, c'est à la portée de n'importe qui avec un peu de talent. Et badigeonner de plâtre toutes les fissures, toutes les crevasses, tout ce qui est menacé d'effondrement (et pourtant nous avons déjà connu beaucoup d'effondrements). Pour réciter et dorloter les paroissiens, oui c'est à la portée de presque n'importe qui avec un peu de talent et de générosité. Mais il s'agit de tout autre chose. Il s'agit de la Parole de Dieu aujourd'hui. Commencez vous-mêmes par écouter « ce que l'Esprit dit aux Églises » et apprenez à vos paroissiens à en faire autant. Certes vous connaîtrez des difficultés, d'autres l'ont su avant vous. Mais cela vaut mieux que de mourir dans son lit. Pour réciter nul besoin d'avoir recours à « l'Esprit saint ».

Roger Parmentier
21/10/2002

P.S. Oui, vraiment : Assez de prédications « rétro », intemporelles, infantiles ! Assez de lectures de la Bible naïves, crédules, volontairement ignorantes ! Vos auditeurs (et vous-mêmes) méritez mieux que ça... Dans les drames que nous affrontons aujourd'hui et ceux qui nous attendent demain, Dieu veut autre chose ! Allez, un peu de courage spirituel !

R.P.

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Pour le dialogue interreligieux
jalons pour un dialogue vif et stimulant

Nous aimerions ici proposer cinq principes qui autorisent une approche positive des autres religions sans pour autant dévaloriser et dénaturer la foi chrétienne.

Le premier principe est d'ordre théologique. Il souligne le simple fait que Dieu ne se laisse jamais réduire à ce que nous en disons et à ce que nous croyons à son sujet. Dieu demeure insoumis à tout ce qui cherche à le définir et le limiter à travers des discours, des dogmes, des institutions. Il ne se laisse jamais réduire aux projections que nous en faisons ; il est toujours aussi autre chose que ce que nous en disons. Ce principe est important pour valoriser la différence religieuse comme le témoin de la richesse infinie de Dieu. Les autres religions nous font découvrir des aspects du divin que notre foi, notre culture et nos systèmes théologiques ne peuvent pas intégrer car ils ne peuvent précisément pas épuiser la totalité de Dieu. L'autre nous révèle que nos théologies et notre foi ne sont pas les seules possibles parce que Dieu n'est pas réductible à une seule foi, à une seule expression théologique.

Le deuxième principe est d'ordre philosophique. Il rappelle la nécessité de l'autre dans la construction de nos identités. Les sciences humaines nous ont bien montré combien sont importantes les influences que nous subissons. Si nous restions totalement isolés les uns des autres nous aurions vite fait de dépérir... Ceci nous autorise même à penser que ce qui structure réellement notre identité dépend justement de la manière de faire le tri parmi toutes les influences reçues. L'autre apparaît ici comme un élément constitutif de notre identité. La relation à celui-ci est une source constante de créativité, de stimulation, de mise en question, d'encouragement... La différence relève ainsi d'une véritable né?ssité. Plus les différences sont nombreuses, plus les possibilités de renouvellement et de transformation de chacun sont fécondes.

Le troisième principe est d'ordre religieux. Il pointe la nécessité spirituelle du dialogue avec les autres religions. Ce que nous venons d'affirmer au sujet de nos identités peut l'être aussi au sujet des religions. Une religion qui resterait imperméable aux autres risquerait de se figer dans le temps, de se fermer à toute discussion et de devenir une forme d'absolu pour celui ou celle qui s'y réfère. La rencontre nous permet en effet de ne pas sacraliser nos convictions, de ne pas transformer nos images de Dieu en idoles. Le dialogue inter-religieux enrichit aussi la théologie d'une possibilité extrêmement féconde de créativité. Il confronte nos théologies à des perspectives différentes qui peuvent en retour questionner et transformer nos convictions et nos pratiques. Dans ce sens, le dialogue offre aux religions la possibilité de s'enrichir de tout ce qu'elles ne croient pas encore au sujet de Dieu.

Le quatrième principe est d'ordre christologique. Il souligne le fait que si la référence au Christ doit rester constitutive de la foi chrétienne, il ne s'agit pas de faire de ce Christ une source d'exclusion. Contre une approche « théocentrique » de la foi chrétienne qui inviterait celle-ci à se dessaisir d'une référence normative au Christ pour se recentrer sur le Dieu supposé de tous, il nous semble nécessaire, pour éviter le relativisme et par fidélité à la foi chrétienne, de valoriser cette référence au Christ comme la spécificité irréductible du Christianisme. Le maintien de cette référence implique cependant un véritable travail christologique. Si le Christ doit rester au centre, il serait en effet incongru et contradictoire par rapport à la prédication de Jésus-Christ, d'en faire un instrument d'arrogance et de refus de l'autre. A la suite du théologien Paul Tillich ou des théologiens du Process, nous pourrons par exemple rappeler ici la nécessaire distinction entre Jésus et le Christ. Si « Jésus » désigne une personne historique, le terme de « Christ » désigne lui une fonction, celle d'être « oint », choisi par Dieu. Dire de Jésus qu'il est le Christ revient donc à confesser que nous reconnaissons que cet homme Jésus a pour fonction de servir de Christ. Cette fonction ne lui est pas réservée et peut donc déborder le cadre limité du Christianisme. Si Jésus est, pour les Chrétiens, l'incarnation emblématique et exemplaire de cette fonction Christ, celle-ci peut désigner la présence agissante et créatrice de Dieu dans toute l'histoire de l'humanité, indépendamment de Jésus.

Le cinquième principe est d'ordre métaphysique. Il fait du pluralisme une véritable conviction théologique. De même que nous avons besoin des autres pour nous structurer dans nos identités, nous aimerions affirmer ici que Dieu lui-même a très certainement besoin de nos différences pour poursuivre son ?uvre créatrice. C'est ici un point central de la théologie du Process. Dieu ne crée pas à partir de rien mais se doit toujours de composer avec ce qui est déjà là. Dieu crée en se servant des données du monde déjà existantes, en les associant pour les transformer et les ouvrir à de nouvelles possibilités d'existence. Plus les différences qui composent le réel sont fortes, plus les potentialité de combinaisons et de transformation sont riches. Un monde homogène, uniforme, où tout serait semblable, serait un monde fermé à toute relation innovante. Dieu a donc besoin de la pluralité du monde pour y inscrire son action créatrice !

Raphaël Picon

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Penser librement !

Le snobisme sévit très fort dans la pensée contemporaine: thèmes à mettre en avant, orientation des arguments avancés, censure des points de vue différents, informations unilatérales et souvent déformées, art d'inciter au consensus... Face à cette « pensée unique » fabriquée par les médias et notre actuel mode de vie qui englobe la société et les Églises, nous avons publié les réflexions des pasteurs Florence Taubmann Florence Couprie (No 169) sur cette question. Il est curieux d'observer combien souvent les Eglises se modèlent sur les types politiques et sociaux du moment. Sur cette difficulté à penser librement, nous proposons ici les expériences d'un psychothérapeute, du pasteur de la cathédrale Saint Pierre de Genève et d'un pasteur de Nîmes.

Christian Mazel

Elle avait décidé de faire du droit. « ça plaisait à maman » et papa lui avait dit un jour : « je te verrais bien magistrat ». Comment et pourquoi avait-elle retenu ces deux injonctions parentales pour orienter son avenir professionnel ? Presque dix ans d'études... et pour faire plaisir à qui ?!

Elle avait osé divorcer. Le jour de son mariage, elle se souvient du maire qui plaisantait sur le verbe aimer qui se conjugue si difficilement : « imparfait au passé, conditionnel au futur, pas simple au présent ! » Elle en avait souri, elle ne pensait pas qu'elle en pleurerait un jour.

Issue d'une famille bourgeoise, Sylvaine avait programmé sa vie comme un choix libre qui en fait reproduisait des modèles familiaux d'une famille installée, même si dans la forme elle avait renouvelé sa façon de vivre, de décorer son intérieur ou qu'elle exerçait un métier, ce que ne faisait pas sa mère.

Aujourd'hui Sylvaine est en crise et s'interroge : « qu'a t-elle fait de sa vie ? » Elle se questionne sur sa liberté de penser et d'exister Qu'a t-elle vraiment décidé ? En quoi a t-elle été libre ? Elle a relu les stoïciens en s'énervant sur cette forme de fatalisme développé par Sénèque qui voudrait que si l'univers nous a placé esclave ou roi, nous n'avons pas à changer de condition, mais accepter et remplir pleinement cette place qui nous est confiée dans l'ordre et l'intelligence du monde.

Elle ne comprend rien à ce paradoxe de Luther qui dit que l'homme est déterminé à être libre. Elle se sent libre de penser, mais incapable de penser librement.

Une pensée sans action lui parait un luxe dérisoire. Penser demande toujours de prendre en compte son environnement, ses enfants, elle-même, les nécessités matérielles.

Alors elle se raccroche au présent, à l'instant, à l'ici et maintenant, à tout ce qu'elle sent et observe d'elle-même et des autres. Dans ces moments, qui lui demandent une qualité de présence et d'attention à elle-même et aux autres, elle se sent libre. En fait, non, elle se sent juste avec elle-même pour accepter ou refuser cette invitation. Juste pour exprimer ses sentiments, ses convictions, et penser sa vie autrement. Libre de penser ? Cela ne l'intéresse pas vraiment. Mais être dans la justesse avec elle-même et dans son rapport aux autres c'est là qu'elle se sent vivante et actrice de son existence.

Jean-Paul Sauzède

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Il n'y a liberté de penser que dans le risque de se perdre !

Ma liberté de penser. Autant le dire tout net, et n'en déplaise à Florent Pagny : cette revendication est une utopie.

Une utopie au sens littéral d'u-topos, à savoir « un lieu qui n'existe pas ». Car nous sommes à jamais soumis à trois tyrannies : l'évidence, l'apparence et l'ego. Tyrannies des évidences, des apparences et de l'ego qui seules semblent avoir désormais le droit de citer. Ne pas savoir cela, c'est rester à jamais dupe des toutes les idoles, scotcher à sa subjectivité captive de son ego.

La première tyrannie est celle de l'évidence

Elle consiste à croire en la possibilité d'une pensée objective absolue. C'est le piège de l'immédiateté. Réduire la réalité à sa surface immédiatement accessible, sans faire le travail de la mise en perspective, de la profondeur, de la complexité, de l'ambiguïté. C'est le piège de la pensée dogmatique comme celui de l'idole, c'est aussi celui de la pensée naturelle. Ainsi, il y a un deuil à faire : celui de l'objectivité possible. Il importe de prendre conscience de la subjectivité indépassable de la pensée afin de jouer avec elle et d'en prendre recul, chaque fois que cela sera possible.

Toute pensée, tout acte de penser seront toujours situés et contingents.

Pourfendre la pensée unique n'est pas faire acte de liberté, mais bien une autre manière de faire acte d'allégeance à l'hégémonie intellectuelle, conceptuelle, éthique, théologique d'un moment. Simplement en réaction, et non pas en création !

La seconde tyrannie est celle de l'apparence

Nous ne pouvons penser qu'à partir de présupposés, fait d'images rapportées, de propos colportés, bref d'informations, et c'est là que la chose se révèle quasi impossible. Car l'information est devenue l'un des lieux emblématiques de la consommation et donc l'un des lieux les plus sujets au marché. Il faut absolument relire Bourdieu lorsqu'il dénonce « un champ lui-même de plus en plus dominé par la contrainte commerciale qui impose sa contrainte aux autres univers » (1). Un monde qui pense en boucle, soumis à des impératifs qui lui commandent son discours. Et croire pouvoir s'en extraire est illusoire. Ce n'est pas la pensée unique, mais bien plutôt la pensée fragmentée, instrumentalisée, prostituée.

La troisième tyrannie est celle de l'ego

C'est certainement celle qui nous est la plus familière, celle dans laquelle nous aimons à nous vautrer, celle de la pensée vertueuse. Je veux dire par-là que l'ennemi premier est de confondre « penser » avec le fait de se draper dans l'expression de sa vertu. Trop souvent nous ne pensons pas, nous légitimons nos convictions, qui, si elles n'acceptent pas la confrontation, se révèlent comme « idoles ». C'est le piège de la pensée vertueuse. C'est le piège ultime, inconscient, qui filtre les données, trie les élans de la pensée, hiérarchise et rejette. Le mouvement se fait en amont de la réflexion alors qu'il devrait avoir lieu en aval. S'en extraire est illusoire et impossible. Tout juste nous est-il possible de tenter d'en mesurer les effets.

De sorte qu'il n'y a pas de liberté de penser, il n'y a que l'acte de penser qui s'arrache d'une triple tyrannie : celle de l'évidence (le piège de l'objectivité), celle d'apparence (le piège de l'information-consommation), et celle de l'ego (le piège de la pensée vertueuse).

Ce qui me conduit à formuler une conclusion, provisoire bien sûr : il n'y a liberté de penser que dans le risque de se perdre.

Cela est vrai pour celui qui écrit ces lignes, bien entendu. Précisons donc le cadre de ma pensée : elle se situe dans la lignée de celle de Bonhoeffer, qui affirmait qu'il n'y a de vraie liberté que dans l'obéissance : « l'obéissance sans liberté est esclavage, la liberté sans obéissance est arbitraire » (2).

Obéissance à celui-là seul qui est pour moi la liberté, et qui nous ouvre à la liberté comme un appel, un horizon, un chemin possible.

De sorte qu'il nous est donné d'entendre l'utopie non plus comme une malédiction, mais aussi comme une ouverture, un indispensable élan qui veut et peut nous permettre d'aller au-delà de la tyrannie des apparences, des évidences et de l'ego.

L'utopie sera donc aussi une brèche, une subjectivité assumée et délivrée de la tyrannie de l'ego. L'acte qui seul peut faire brèche réside certainement dans une sorte de « doute méthodologique », un soupçon systématique qui devient créateur d'un mouvement de la pensée.

Il faut reconquérir non pas une liberté de penser illusoire, mythique et par-là dangereuse puisque se croyant au-dessus de la mêlé des subjectivités partisanes mais, pour reprendre un mot de Bourdieu - encore ! - une « autonomie de penser ».

Autonomie entendue par Bourdieu comme un champ à l'intérieur duquel on se juge, on se critique, on s'affronte avec des techniques, des méthodes.

Il n'y a liberté de penser que dans le risque de se perdre.

Il faut que nous le sachions alors : point ici de place pour le pur et l'impur. Le champ de la pensée « autonome » est à l'image de celui de l'évangile où il faut laisser pousser ensemble le bon grain et l'ivraie. Il n'est pas à nous de faire la moisson et de dire le bien du mal. Nous retrouvons Bonhoeffer, lorsqu'il pose la responsabilité comme un « risque libre » : « elle renonce à toute auto-justification valable, à sa connaissance dernière du bien et du mal » (3).

Il n'y a liberté de penser que dans le risque de se perdre.

Je voudrais citer encore ces mots du rabbin Marc Alain Ouaknin :

« Tout tient au chemin : nous sommes plus près du lieu recherché quand nous sommes en chemin que lorsque nous nous persuadons être arrivés à destination et n'avoir plus qu'à nous établir.

Le mot chemin n'a pas nécessairement une signification spatiale ; il n'évoque pas quelque promenade champêtre ou forestière de la pensée vagabonde (...) Il est passage de la pensée elle-même.

Le chemin met en mouvement, met en cause, en balance. Il invite et inquiète ; incite et sollicite. Être homme(femme) du chemin, c'est en tout temps être prêt à se mettre en route : exigence d'arrachement, affirmation de la vérité nomade » (4).

Il n'y a liberté de penser que dans le risque de se perdre.

Cynique et désabusé ? Non pas, car j'en ai la ferme assurance : un Autre s'en vient à notre rencontre, qui ne saurait nous laisser perdu.

Jean-François Breyne

(1) Pierre Bourdieu, Sur la télévision, suivi de L'emprise du journalisme, Paris, 1996, Liber édition, p. 65.

(2) In Ethique, Genève 1969, Labor et Fides, p. 206.

(3) In Éthique, Genève 1969, Labor et Fides, p. 203.

(4) in Les symboles du Judaïsme, Paris, 1999, Éditions Assouline, p. 28-30.

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Paroles d'hommes paroles de Dieu !

La Bible n'est pas tombée du ciel. En dehors de quelques esprits réticents, tout le monde a fini par l'admettre. Elle est donc parole humaine - et ne peut être entendue qu'en tant que telle. Comment peut-elle alors être considérée comme parole de Dieu ?

L'« année de la Bible » encourage à une meilleure connaissance du texte biblique. Dans quel but ? Comment la connaissance biblique peut-elle aider à la foi et non pas simplement justifier nos idées ?

Une collection de témoignages d'époques différentes

Le christianisme est une « religion du livre », dit-on - comme le judaïsme, voire l'islam. Or, si la Bible est devenue une sorte de texte fondateur, il s'agit là d'un phénomène récent - les protestants ayant, il est vrai, vulgarisé la Bible plus rapidement que les autres. Le contenu de la Bible - le « Livre », traduction du mot grec biblos - s'est constitué progressivement. Il est largement l'expression d'enseignements et l'aboutissement de traditions orales.

Extraordinaire collection de livres, la bible se trouve constituée de documents d'époques différentes et de milieux variés, tant au sein du judaïsme du premier millénaire avant Jésus, que de la sphère de développement du christianisme du premier siècle et début du 2e siècle.

Aucun livre n'a été écrit pour servir dorénavant et jusqu'à ... la fin des temps comme livre normatif considéré par certains comme absolument irremplaçable. Chacun de ces ouvrages est le résultat d'un travail effectué par un auteur pour une communauté, plus rarement pour une personne. Au temps de leur composition, quelques uns seulement savaient lire. Afin que le contenu de ces textes puisse être connu, il fallait qu'ils soient lus à d'autres. Le livre écrit, l'est avant tout pour une élite et, à travers elle, s'adresse au peuple. Il acquiert progressivement une notoriété telle qu'on se met à le recopier et le traduire, jusqu'à pouvoir le diffuser plus largement, à partir du 16e siècle par la voie de l'impression - et là encore leur lecture publique reste nécessaire pour toucher le plus de monde possible.

Une compréhension du texte pour une foi vécue

Une compréhension judicieuse nécessite l'utilisation de quelques outils d'approche. Il en va de l'honnêteté intellectuelle, en particulier pour un théologien et tous ceux qui ont pris soin de se former en la matière, de prendre en compte les résultats de la recherche la plus scientifique possible tant au niveau de l'analyse critique des textes, qu'en matière de connaissance du milieu, du travail de l'auteur, de l'archéologie, etc. On ne prendra plus le texte au pied de la lettre, mais on cherchera à en comprendre le langage, souvent symbolique. La Bible exprime des opinions variées. Il faut bien relativiser l'importance de certains textes, en adapter éventuellement d'autres. Nous nous garderons de « diviniser » la Bible !

L'écho que le texte biblique trouve en nous fait appel à notre sensibilité, notre culture, notre vécu, notre environnement, notre histoire. Les questions que nous posons au texte sont nécessairement liées à l'évolution de la société, voire du devenir du monde.

Nous passerons à côté de grandes richesses, si nous cherchons dans la Bible uniquement les réponses à nos seules questions. Il est facile de s'arrêter là, où nous trouvons les réponses que nous souhaitons trouver ! Enfin, certains textes, s'ils sont intéressants pour la compréhension d'une époque avec ses pratiques religieuses, n'ont guère d'intérêt pour notre foi dans le contexte d'aujourd'hui.

Une parole qui naît en nous

La Bible est un livre difficile ? Oui ! Et il me paraît même impossible de le « consommer sans modération », sans recourir à des indications, ni commentaire avertis.

C'est un livre unique, si nous savons le comprendre comme une palette d'expressions extrêmement variées, de témoignages d'hommes et de femmes qui nous montrent comment ils se sont situés dans la vie, et comment ils ont appréhendé des situations ou des problèmes existentiels avec l'aide de leur foi en Dieu.

Prenons le temps de l'apprivoiser et d'utiliser quelques instruments de lecture accessibles - par exemple, la traduction oecuménique de la Bible (TOB) augmentée d'introduction aux livres bibliques et de notes, comporte des informations très précises pour aider à la compréhension du texte.

C'est un livre « utile » si nous savons y trouver l'invitation à vivre notre vie dans le vis-à-vis avec Dieu, avec notre foi et nos doutes, convaincus que le sens de la vie et le sens de l'histoire, s'il est largement imposé, est aussi passionnant à construire. L'important est alors cette parole qui naît en nous, la parole suscitée par nous, - parole de Dieu si elle nous aide à vivre aujourd'hui !

Ernest Winstein
l'Ami n°278 (07. 2003)

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Femmes violentées

Dans le numéro de septembre (169, p. 8), nous avons fait connaitre la situation de beaucoup de femmes dans le monde. Nous relatons maintenant une histoire vécue, exemple parmi tant d'autres. Les faits s'appuient sur une mentalité souvent basée sur la religion. Cet état d'esprit doit être révisé et combattu dans ses effest pervers.

Christian Mazel

Aïcha

Aïcha a été mariée pendant dix ans avant d'avoir le courage de quitter un mari brutal. Elle s'est réfugiée auprès d'un organisme qui aidait les femmes à prendre une décision et à subvenir à leurs besoins. Elle n'a communiqué ses coordonnées ni à son mari ni à sa famille.

Cet organisme l'a mise à l'abri en lieu sûr, lui a donné quelque argent pour lui permettre de commencer un petit travail et l'a envoyée en formation. Elle y est restée cinq mois. Puis, on a pu lui permettre de retrouver ses enfants et de vivre avec eux dans une maison en location où on pensait qu'elle serait en sureté. Elle y a vécu avec eux durant les quatre années suivantes sans être harcelée par sa famille on sa belle-famille.

An bout du compte, elle a estimé que les choses allaient bien et qu'elle avait acquis son indépendance, elle a demandé le divorce.

Vint le jour de l'audience. Le tribunal était plein de monde. En entrant, Aïcha a vu que son mari était présent, avec deux de ses frères ; il y avait là également sa mère à elle, avec son frère. Elle a été bouleversée lorsque sa mère est venue vers elle, les larmes aux yeux. Elle l'a serrée dans ses bras en la remerciant pour sa compréhension.

Alors qu'elle se dirigeait vers sa place, son oncle s'est approché, un pistolet à la main. Il l'a visée, il a tiré, elle a été tuée sur le coup. Sa mère s'est levée et elle est sortie, suivie de son mari et de son frère. Aïcha, morte, gisait sur le sol, baignant dans son sang.

On a relâché l'oncle le jour suivant. Le juge aurait dit qu'il ne pouvait pas le déclarer coupable étant donné que n'importe qui dans cette ville pouvait comprendre son acte. N'importe quel homme aurait fait la même chose pour rétablir l'honneur et la dignité du nom de sa famille.

Extrait de UPDATE
Publication de l'Alliance Réformée Mondiale Vol 13

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Choix de livres

La Bible dévoilée, les nouvelles révélations de l'archéologie - Israël FINKELSTEIN et Neil Asher SILBERMAN - Bayard Editions, 2002 - 432 pages - 24 e.

D'après cet ouvrage, oeuvre de deux archéologues juifs, dont un israëlien, le récit biblique a commencé à être écrit sept siècles avant Jésus-Christ. Les découvertes archéologiques récentes ne confirment pas la littérature biblique des théologiens. Il y a conflit de dates et de règnes. Par exemple, la tradition biblique parle de travaux forcés imposés aux enfants d'lsraël qui auraient été employés sur le chantier de « Ramsès », quinze siècles avant J.-C. ; or le premier pharaon à porter ce nom ne montera sur le trône qu'en 1320 avant J.-C., et Ramsès II règnera de 1279 à 1213 (pp. 74-75).

La conquête de Canaan fut très progressive et il ne s'agit même pas, à proprement parler, d'une conquête, mais d'une transformation progressive de la société du pays (pp. 91 -117). Le royaume de David avec ses conquêtes guerrières et ses héros de combats légendaires, ainsi que celui de Salomon et sa vocation de constructeur prestigieux, n'ont pas laissé de traces archéologiques ou de vestiges historiques qui y correspondent (pp. 149-174).

Le carbone 14, outil de datation testé d'abord sur des sites pharaoniques dont on connaît l'origine par des inscriptions en hiéroglyphes, a été ensuite employé par les archéologues sur les sites bibliques qui subsistent aujourd'hui avec des méthodes d'emploi bien plus fiables qu'il y a vingt-cinq ans. Or la datation obtenue ne confirme aucunement les écrits bibliques.

Certaines des contradictions les plus frappantes viennent des fouilles de la cité de Megiddo. Contrairement à ce que semble indiquer le Premier Livre des Rois (IX,15), le système d'adduction d'eau dans cette cité et dans celle d'Haçor est attribué par les archéologues à la dynastie des Omrides (de même que les portes des palais de ces cités), et non pas au règne de Salomon qui se situe chronologiquement avant elle (pp. 212-216)(1). Le texte de la Bible tend à mettre en valeur le règne de Salomon au détriment de ceux des Omrides.

Le livre de la Loi, version originelle du Deutéronome, fut composé au VIIe siècle avant J.-C., immédiatement avant ou pendant le règne de Josias (639-609), il ne serait pas un document plus ancien découvert alors par hasard dans le temple de Jérusalem (comme ceci se trouve raconté dans le Deuxième Livre des Rois (XXII, 8 et suiv.) et dans le Deuxième Livre des Chroniques (XXXIV 14 et suiv.). Qui plus est, « le Deutéronome n'est pas non plus sans rappeler la littérature grecque primitive, dans l'expression de l'idéologie (...), dans la manière de bénir et de maudire, dans les cérémonies qui consacrent la fondation de nouvelles implantations » (p. 319 ).

La Bible reste cependant un ouvrage unique et remarquable, remanié dans le temps par des hommes de talent, très observateurs, analystes perspicaces, connaissant et reconnaissant leurs semblables avec leurs forces et leurs défauts: l'imagination y fait le reste et comble les « trous ».

Note

(1) Les quatre rois de la dynastie des Omrides régnèrent sur le royaume d'Israël (alors séparé du royaume de Juda) de 884 à 842. Son fondateur fut Omri, à qui succède son fils Achab (marié à la princesse phénicienne Jézabel qui fit mettre à mort le prophète Elie), puis ses deux petits-fils Ochozias et Joram (marié à Athalie, celle qui fait l'objet de la tragédie de Racine). « Les Omrides comptent parmi les dynasties les plus honnies de l'histoire biblique (...) Fort heureusement - pour la première fois dans l'histoire d'Israël -nous possédons un certain nombre de sources historiques extérieures à la Bible, qui permettent de voir les Omrides sous une perspective différente » (Finkelstein et Silberman, op.cit, pp. 199 et 205). Voilà un exemple caractéristique de la révision en cours sur tout le passé biblique.

Roger Sshneeg

En complément à cette présentation, signalons encore un autre ouvrage succinct, mais de très bonne vulgarisation, développant aussi ces positions désormais très critiques des spécialistes (exégètes, historiens et archéologues) à l'égard de la stricte historicité de la Bible : Jean-Louis Ska, Les énigmes du passé. Histoire d'Israël et récit biblique, Éditions Lessius, diffusion Cerf, 2001 (144 pages). Cet ouvrage est d'autant plus remarquable que son auteur est un jésuite et qu'il a même obtenu l'imprimatur de Rome.

Dans un petit volume (abondamment et très joliment illustré) de la collection Découvertes (Gallimard), Moïse, paru à l'automne 2002 (128 pages), Thomas Römer doyen de la Faculté de théologie protestante de Lausanne, se montre très catégorique : « Les premiers textes (concernant Moïse) ont été écrits un bon demi-millénaire après. La réalité historique de l'Exode est tout aussi incertaine que celle de Moïse (...) De manière plus générale, il n'existe à ce jour aucun document en provenance d'Égypte qui mentionnerait des événements ou des personnages pouvant être mis directement en rapport avec les récits bibliques » (p. 56).

Par ailleurs, selon deux chercheurs de l'Université catholique de Fribourg-en-Brisgau, Othmar Keel et Christoph Uehlinger, une déesse, Ashéra (et peut-être plusieurs), aurait été adorée en Judée et à Jérusalem même, jusqu'en 600 environ avant J.-C.

Ils en ont retrouvé des centaines de petites figurines en terre cuite au cours de leurs fouilles archéologiques. Cette déesse aurait même peut-être été associée à Yahvé avant d'être farouchement éliminée, à l'époque de l'exil à Babylone (587-538 avant J.-C et immédiatement après), par les tenants d'un monothéisme pur et dur. Les deux chercheurs ont présenté les résultats de leurs travaux dans un volumineux ouvrage, comportant plus de 400 illustrations (dont beaucoup de ces fameuses figurines), intitulé Dieux, déesses et figures divines. Les sources iconographiques de l histoire de la religion d'lsraël (Éditions du Cerf, Paris, 2001, 489 pages; l'édition originale, en allemand, date déjà de 1992).

G.L.

Lettre des Amis (Quakers) n°77

L'Europe protestante aux XVIe et XVIIe siècles - John Miller - Ed. Bel in de Bock 1967 - 362 pages

Décrit le monde du protestantisme tel qu'il s'est élaboré, bouleversant une grande partie de l'Europe pour des choix spirituels dont les caractères sont demeurés nets jusqu'à aujourd'hui. Des spécialistes originaires de tous les horizons ont participé à la rédaction de cet ouvrage, ce qui facilite la confrontation des points de vue et le partage des acquis de la recherche sur les réalités historiques qui ont forgé l'identité de l'Europe.

Jacques Fromental

Les protestants - Sébastien FATH - Ed.Le cavalier bleu ; diff.Harmonia mundi, 2003 - 125 pages

A conseiller à tous, et notamment aux jeunes qui ne veulent pas se satisfaire des idées reçues. C'est à partir de celles-ci que l'auteur apporte un éclairage distancé et approfondi sur la réalité actuelle du protestantisme, dont l'héritage culturel, la forte présence internationale et les multiples facettes marquent toujours l'esprit de nos contemporains.

Jacques Fromental

La pierre et l'oiseau (Journal spirituel 1994-2000) - Nicolas Dieterlé - Editions Labor et Fides diffusion en France COFEDIS, Paris - 11 x 21 - 199 pages

L'auteur (1963-2000), connu pour son oeuvre journalistique et picturale, se définit lui-même par la polarité de la pierre (sentiment de pesanteur) et l'oiseau (aspiration à la verticalité et la lumière). Ce recueil de textes est une quête spirituelle intime sur le cheminement de sa pensée et de sa foi marquées par un profond mysticisme. Nicolas Dieterlé a été très influencé par Simone Weil (« La pesanteur et la grâce »), Etty Hillesum et Novalis. Ce journal perçoit que ce qui le crucifie est en même temps ce qui le sauve. Malgré des tendances suicidaires et la conscience des progrés de la maladie s'exprime un désir de vivre. « Jusque dans la mort, je bénis la vie qui surpasse la vie ». « Mon but: retrouver le Visage, c'est-à-dire mon moi profond, réel, indivisible. Sophia m'y aidera. Elle est la réalité intime du monde ». Michel Cornuz a écrit la préface. Des dessins accompagnent les textes.

Christian Mazel

Prière et unité chrétienne (Testament oecuménique) - Paul Couturier - Editions du Cerf - 93 pages - 13,5x17 - 12 e.

L'équipe Unité chrétienne de Lyon donne dans ce petit livre une bonne biographie de l'abbé Couturier avec son itinéraire spirituel (ouverture sur d'autres Eglises chrétiennes, et mésaventures 1881-1953). Nous pouvons ensuite relire avec émotion et grand profit de réflexion le texte publié en 1944, sans signature et « ad usum privatum » (sans engager l 'Eglise Catholique). Il réédita ce texte légèrement remanié en 1952, l'hiver qui précéda sa mort. Il vit intensément la « communion des saints ». Dans ce testament oecuménique, il porte la prière multiforme des Eglises chrétiennes. La prière est proprement « l'âme » des rencontres fraternelles. L'unité chrétienne pour laquelle le Christ vient prier en nous, est le « devenir christique du cosmos ».

Christian Mazel

La fin des haricots et autres mystères des expressions françaises - Colette Guillemard - Editions Bartillat - 277 pages - 12,5x20 - 20 e.

Des expressions bien connues qui font partie du langage courant sont d'origines complètement ignorées. Présentant souvent plusieurs possibilités d'interprétation, l'auteur - d'une grande culture littéraire - expose dans un style humoristique et un ton plaisant, l'histoire de ces expressions et propose des clés très intéréssantes et instructives pour la compréhension. Environ 130 mystères sont dévoilés : se ronger les sangs, dorer la pilule, mesures draconniennes, mettre son grain de sel, aller à vau-l'eau, tomber de Charybde en Scylla, promettre monts et merveilles, jouer la mouche du coche, l'école buissonnière, tirer les vers du nez, la boite de Pandore, tirer à boulets rouges, passer du coq à l'âne, montrer patte blanche... Excellente ouverture sur les originalités pittoresques de la langue française.

Christian Mazel

Histoire intérieure du FLN 1954-62 - Gilbert Meynier Ed. Paris, Fayard 2002 - 812 pages

Une somme. Peut-on résumer 800 pages de graphiques, de texte, fort bien écrit au demeurant, en peu de lignes ? Retenons quelques grandes articulations :

L'insurrection algérienne fut aussi formidable que la vendéenne de 93 ; cela, la gauche française militante le perçut mal et mieux vaut ne pas parler de ses chefs moins compromis : Mitterrand, Mendès. Le mouvement plongeait ses raçines dans la révolte mâtée, non de 45... de 1916.

Les dirigeants du front n'étaient pas des déclassés; ils venaient de la petite bourgeoisie rurale.

Des 57, la militarisation était là, prélude au putch militaire de 65. Et la démocratie avait vécu. La Chine aida plus que les pays « frères » arabes. Dès 54-55, le MNA messaliste, était élimioné en Algérie. En France c'était fait en 58, et Messali se rallia à la France. En 6 ans, le parcours d'un P. Laval algérien. 250 000 morts au compte de français, 50 000 sans doute, au débit du front, dont 10 000 harkis. La défaite militaire, point totale cependant (il restait des maquis) obligea le FLN à négocier. Le bilan ? La « machine » FLN mit en place en 62, un despotisme éclairé sans beaucoup « d'éclairage » (p 670) ; la grande médiocrité des réalisations économiques, sur fond « d'obscurantisme » (p 701) religieux et culturel...

Jean Georgelin

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Le monde des religions

Condamnation de Rome après le Kirchentag de Berlin

En marge du Kirchentag oecuménique de Berlin fin mai, nous avons fait connaître que 2000 personnes avaient assisté le 29 mai à un service de communion dans l'église protestante de Gethsémani à Berlin-Est. Des groupes catholiques qui réclament une réforme de l'Eglise Romaine concernant l'interdiction du Vatican aux catholiques de partager l'Eucharistie, avaient organisé ce service commun. Nous avons signalé (cf. le Monde des Religions, dans le numéro de septembre 2003) que le prêtre Bernhard Kroll avait été sanctionné par son évêque. Le 17 juillet le prêtre Gotthold Hasenhütti, professeur émérite de théologie à l'Université de Saarbrüken a reçu de son évêque Reinhardt Marx de Trêves l'interdiction d'enseigner et de célébrer l'Eucharistie. ll a fait recours au Vatican. Lors du Kirchentag le coprésident catholique Hans Joachim Meyer, avait salué le rassemblement comme « un grand pas sur la voie de l'oecuménisme chrétien ». Aujourd'hui le Cardinal Ratzinger a déclare que « le rassemblement manquait de profit », et le cardinal Joachim Meisner, de Cologne, estime que l'évènement à conduit à la confusion dans de nombreuses paroisses catholiques. L'Eglise Catholique d'Allemagne s'interroge sur la tenue d'un autre Kirchentag oecuménique dans 5 ou 6 ans. Sur les 200 000 participants, 70 000 étaient catholiques. Mais aussi 40 évêques catholiques et parmi eux 5 cardinaux. sont venus à Berlin pour cet evènement.

Dans une interview diffusée sur la chaîne de TV ZDF, le président Rau a réagi fortement à la suspension du théologien. Pour lui, le Kirchentag oecuménique était un signe que les institutions sont en train d'évoluer. « Il est d'autant plus effrayant pour moi de voir cette sanction à l'encontre d'un prêtre; je ne peux pas la comprendre en tant que chrétien évangélique », a soutenu Johannes Rau.

Le cardinal Lehmann a affirmé que lui et ses autres confrères évêques se sont sentis « très blessés » par les propos du président allemand à l'égard de l'Eglise catholique.

Christian Mazel

Palestine : islam, religion d'État ?

Plusieurs responsables chrétiens de la Terre sainte ont appelé l'Autorité Palestinienne à ne pas faire de l'islam la religion officielle d'un futur État indépendant palestinien. Ils s'opposent à l'article 6 d'un projet de constitution préparé par la Commission consti-tutionnelle de l'Autorité palestinienne qui stipule : « L'islam sera la religion officielle de l'État. Les religions monothéistes seront respectées. »

Les croyances parallèles reculent en France

Des croyances en baisse, un catholicisme qui se maintient, des religiosités parallèles qui s'effondrent. Telles sont les grandes tendances qui se dégagent d'un sondage CSA réalisé pour Le Monde et l'hebdomadaire La Vie.

62 % des Français se déclarent de confession catholique (67 % en 1994). Les personnes se déclarant de religion musulmane passent de 2 % en 1994 à 6 %. Le nombre de personnes se réclamant du bouddhisme reste inférieur à 1 %.

La pratique religieuse s'érode, mais faiblement : 12 % des interrogés disent aller à la messe ou à un office religieux une ou plusieurs fois par semaine (14 % en 1994). 10 % affirment n'y aller jamais, contre 7 % en 1994.

De manière significative, 32 % des personnes interrogées se disent en accord avec la proposition : « Maintenant, je recommence à croire » (13 % en 1994). Retour du religieux ?

Fait le plus marquant de l'enquête, l'effondrement des croyances parallèles. L'astrologie ne fait plus recette : 37 % y apportent crédit, contre 60 % en 1994. Pire encore pour les voyantes (23 % y croient contre 46 % en 1994) ou pour la sorcellerie (21 % contre 41 % en 1994).

(adapt. d'un article paru dans Le Monde)

Allemagne : suppression de postes pastoraux

L'Eglise protestante en Bavière va supprimer d'ici à 2012 environ 300 postes sur un effectif total de 2 800 pasteurs, en vue de consolider ses finances plombées par les baisses de rentrées d'impôt sur le culte. Elle entend ainsi économiser quelque 25 millions d'euros par an. La baisse de l'impôt sur le culte, facultatif, va obliger l'Eglise protestante bavaroise à réduire ses dépenses de 90 millions d'euros par an d'ici à 2006.

En Allemagne, les Eglises prennent en charge des missions que l'État n'assume pas, notamment dans les domaines social et éducatif, et sont donc autorisées à prélever un impôt pour financer leurs activités.

Elles gèrent par exemple des hôpitaux, des foyers pour handicapés, des maisons de retraite, des crèches et des jardins d'enfant, ainsi que des centres assurant les consultations obligatoires préalables aux interruptions volontaires de grossesse. (Apic)

France : la rentrée du Conseil français du Culte musulman

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) est prêt à démarrer ses travaux à la rentrée après s'être doté de onze commissions.

Des proches de la Mosquée de Paris devraient présider deux des commissions chargées de réfléchir sur la pratique du culte, et assurer la co-présidence d'une troisième avec la Fédération nationale des musulmans de France.

Malaisie : Bible interdite

Le ministre fédéral se l'intérieur de Malaisie, soucieux de l'ordre public a publié une liste d'ouvrages interdits parmi lesquels la Bible traduite dans la langue du peuple autochtone Iban. la décision gouvernementale a suscité de vives protestations. En fait, remarque l'agence de Nouvelles Eglises d'Asie, I'intervention du ministère de l'Intérieur s'inscrit dans un processus où depuis plusieurs années des groupes musulmans protestent contre l'utilisation de la langue nationale par d'autres que les musulmans lorsqu'il s'agit de religion.. L'interdiction est à présent levée à condition que chaque bible porte une croix et une mention spécifique relative à la traduction.

Danemark : un pasteur libéral contesté

Le pasteur Thorkild Grosboell, qui officie à Taarbaek, charmant petit port de pêche au nord de Copenhague, avait clamé, dans un entretien à un hebdomadaire qu'il ne croyait pas en Dieu créateur du monde, pas plus qu'en la résurrection corporelle de Jésus, ni à la vie éternelle. Son évêque de tutelle, une femme, Lise-Lotte Rebel, n'avait pas tardé à le relever de ses fonctions, dans l'attente d'explication et, surtout, d'excuses.

Au terme d'une longue période de réflexion entrecoupée de trois rencontre, les deux intéressés ont finalement publié, le 23 juillet une déclaration commune censée mettre fin à la controvese qui a provoqué un débat dans le royaume et un élan de solidarité avec le pasteur.

Thorkild Grosboell y présente également ses excuses pour « tout propos qui, par sa grossièreté provocante, a faussé le dialogue ». Un acte de contrition lui vaut de voir sa suspension levée par l'évêque de Helsingoer. Et si les deux signataires du texte estiment qu'« il est important que l'on puisse continuer à discuter (...) du christianisme et de sa signification », ils précisent que ce débat doit se dérouler « d'une manière objective et ordonnée ».

Les déclarations du pasteur, condensé d'un livre sorti en avril (Un caillou dans la chaussure, un essai sur la civilisation et le christianisme) ont résonné largement au-delà du diocèse de Helsingoer, lieu où Hamlet s'interrogeait, prémonitoire, sur « être ou ne pas être »...

Théologien de formation comme son père, connu pour son franc-parler et sa farouche indépendance, le pasteur ne passe pas pour un original ou un être assoifé de publicité. Sa popularité auprès de nombreux paroissiens n'a fait que grandir après la sortie de son livre et de l'entretien incriminé, publié le 23 mai par Weekend Avisen un hebdomada1re de qualité.

Certains n'ont pas tardé à emboîter le pas à Thorkild Grosboell. D'après un sondage réalisé en juin auprès des quelque 2 000 pasteurs du pays, 15 % des 183 personnes ayant accepté de répondre estiment qu'il est possible d'exercer cette fonction sans croire à la résurrection corporelle.

Trois quarts d'entre eux considèrent même q'un pasteur peut très bien « douter » de Dieu. En face, les tenants d'une ligne traditionnelle se mobilisent.

Christian Mazel
d'après le Monde 13.8.2003

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Corruption
les dérives du monde associatif

Le Service central de prévention de la corruption (SCPC) fête ses dix ans. Son rapport, rendu public mercredi, pointe les dérives financières du monde associatif et livre des éléments de réflexion sur les « artifices comptables » à l'origine de scandales financiers comme celui d'Enron.

La France compte aujourd'hui 880 000 associations qui gèrent un budget cumulé de 47 milliards d'euros. Elles comptent près de 20 millions de membres, emploient 1 650 000 personnes et sont animées par 11 millions de bénévoles.

Le monde associatif, note le rapport, est la proie de nombreuses dérives et irrégularités, fruits de l'inadéquation de la législation française et de la mondialisation du mouvement associatif.

Principales irrégularités constatées par le SCPC : les détournements financiers directs ou indirects.

Dans le premier cas, il est souvent difficile de différencier la personne du directeur qui ordonne les dépenses et du comptable. « Les détournements servent, principalement, au règlement de dépenses somptuaires et à l'enrichissement personnel du dirigeant ».

Un autre moyen consiste à utiliser des organisations d'entraide pour faire passer des fonds terroristes. Ce que semblent avoir fait les réseaux d Al-Quaïda.

Le rapport dénonce par ailleurs les risques d'utilisation des organisations non gouvernementales (ONG) par des organisations terroristes ou mafieuses. Selon le SCPC, il est aisé d'utiliser des comptes bancaires "dormants" de particuliers ou d'ONG pour transférer des sommes sans courir de risques majeurs.

Pierre Patrick Kaltenbach
Associations Familiales Protestantes

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Forum d'idées à débattre

A propos de l'article « Peut-on se changer ? » (A. Houziaux)

Affirmer et dire ce qu'est un « vrai Dieu », me semble un peu présomptueux. Cela fait plus de 50 ans que je cherche à le découvrir. J'ai quelques réponses, mais je n'oserai jamais affirmer ce qu'est un « vrai Dieu ». « Je suis Celui qui est » reste la seule réponse à mes interrogations, mais je n'ai jamais pu définir le sens et la vérité de ce qui est, surtout à travers l'humain.

Agnostique alors ? N'est-ce pas ce qu'avec modestie et humilité nous devrions tous être ?

Par contre, j'admets fort bien l'existence d'un Principe créateur qui n'a rien d'abstrait puisque je fais partie de la création que je respecte et à laquelle je suis partie prenante et participante.

Et la foi ? Mais qu'est-ce que la foi sinon l'intime conviction d'être et de faire partie d'un Tout, d'être momentanément dépositaire d'une étincelle de. conscience sur cette terre, plein d'espérance avant de rejoindre cette Conscience universelle et absolue à laquelle j'aspire ?

Jean-Daniel Nessmann
68040 Ingersheim

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Coin de l'humour

Le pasteur Marc Boegner a été une personnalité reconnue du protestantisme français durant de longues décennies. Président de l'Eglise Réformée et de la Fédération Protestante, reçu à l'Académie Française, il connaissait les familles protestantes de père et fils et avait la mémoire des généalogies. Il avait l'habitude de dire à ceux qu'ils rencontrait : « J'ai bien connu monsieur votre père ».

On raconte qu'après sa mort, en arrivant au ciel il fût reçu par Jésus-Christ.
Et il lui dit : « J'ai bien connu monsieur votre Père ».

.

Au cours du culte, le pasteur annonce d'une seule haleine "Au Psaume 42 nous allons chanter « comme un cerf altéré brame ». Se rendant compte tout-à-coup de ce que cette invitation avait d'équivoque, il ajoute : « un peu mieux tout de même ».

C.M.

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