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Numéro 178-179
juin-juillet 2004
( sommaire )

Combattre

Le pasteur Christine Durand Leis, aumônier des hôpitaux de la Région Parisienne, nous rappelle en quelques lignes l'urgence qu'il y a à ne pas oublier toutes celles et ceux qui souffrent, combattent l'indifférence et se battent pour être plus efficaces... il y a là des enjeux vitaux.

Des portes ouvertes à l’hôpital

Matthieu 25,36 : ça vous dit quelque chose ? Mais si : « J'étais malade, et vous m'avez visité… » Ce texte a beaucoup à nous apprendre – même si nous croyons le connaître (presque) par cœur – entre autres, et ce n'est pas le moindre, que le choix final entre élus et réprouvés ne s'opère nullement à partir d'une foi ou d'une pratique religieuse, mais uniquement en fonction de l'attitude diaconale envers des frères éprouvés : maladie, faim, prison, pauvreté, exil… Revenons plus spécialement aux malades. Certainement, nous connaissons bien ces versets… trop bien peut-être ? Si bien qu'en répétant avec insistance la nécessité salutaire (au sens fort) de ne pas négliger cette forme de diaconie, on semble parfois enfoncer une porte ouverte. Mais à force d'être largement et trop évidemment ouvertes, il arrive que des portes, peu à peu, se referment dans… l'indifférence, et il n'est pas inutile d'aller, de temps à autre, en vérifier l'ouverture !

bassin dans la cour d'un hôpitalÀ Judas qu'indigne le gaspillage du vase de parfum (Jn 12,5), Jésus répond : « vous avez toujours les pauvres avec vous. » Cela est tristement vrai. Jésus aurait pu le dire des malades, car nous en avons aussi toujours avec nous, et ce n'est pas l'aumônier que je suis qui dira le contraire… Il faut sans doute se réjouir de ce que les progrès de la médecine, et pour une certaine part, de la couverture sociale (encore que…) leur permettent de recevoir des soins dans les hôpitaux où je les rencontre. Mais ces malades ne sont pas que des objets de soins. Ils sont aussi des sujets dont la maladie bouleverse l'histoire plus ou moins profondément. On a beaucoup dit à quel point le milieu médical devenait de plus en plus technique et froid, oublieux de ce « dialogue singulier » où le médecin prend le temps d'entrer un peu dans cette histoire : encore une « porte ouverte » à réenfoncer.

Pour accompagner le choc de la maladie, les psychologues sont là. Il y a aussi les aumôniers, les visiteurs, qui n'ont pas le même rôle, partenaires discrets mais non superflus dans un parcours hospitalier : car le malade traverse une crise pas seulement physique, et la question du sens se pose, aiguë, angoissante : une présence, une écoute, une parole partagée, permettent l'expression de ces « besoins spirituels » dont nous sentons bien qu'ils sont un fondement de nous-mêmes, au-delà même des religions particulières (troisième « porte »).

La maladie fait peur : aux malades, bien sûr, mais aussi aux soignants, confrontés quotidiennement à la question de la souffrance et de la mort : même s'ils se « blindent » souvent, ils sont autant, voire plus fragilisés que les patients, et eux aussi ont besoin d'écoute et de parole partagée… La maladie fait peur… et ce n'est peut-être pas volontiers que l'on s'imagine en train de faire des visites à l'hôpital. Cependant, il ne faudrait pas que cette peur, alliée à la grande technicité des hôpitaux, creuse un fossé irréparable entre les malades et les bien-portants. Réenfonçons donc cette quatrième porte : attention à ce que certains lieux ne soient pas coupés de la vie telle qu'elle continue, quand on n’est pas « affamé, assoiffé, étranger, nu, malade, en prison », cf. Matthieu.

Il est donc nécessaire de s'attacher, comme un but à atteindre, à tisser et retisser inlassablement ces liens qui font que l'hôpital et ses occupants ne sont pas comme un bateau qui dérive loin de la terre des vivants. Il faut créer de nouvelles amarres : des visiteurs, qui depuis le double lieu de leur église et de leur foi, viendront témoigner que l'Évangile, loin de marginaliser les faibles, ne cesse au contraire de les désigner à notre soin, ne serait-ce qu'en partageant un verset, une prière… L'aumônerie auprès des malades ne doit pas non plus partir avec le bateau, mais aider à accueillir et former tous ceux qui désireraient devenir des amarres : ces accueils, ces formations existent déjà, offrant des années de pratique et de réflexion. Nous vous invitons à venir voir comment on y crie, non pas « larguez les malades », mais « Terre en vue ». feuille

Christine Durand Leis

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