
Numéro 185 - Janvier 2005
( sommaire
)
Regarder, Écouter, Lire
Livre : L’Évangile redécouvert
Ce petit recueil rassemble trois
conférences prononcées au Temple de Boisfort en Belgique,
à l’initiative de paroisses catholiques et protestantes.
Un parcours à travers l’histoire nous est proposé,
montrant comment était considérée et lue la Bible
à différentes époques. La première conférence
va du XIVe au XVIe siècle. Elle montre comment l’humanisme
chrétien a redécouvert le texte biblique par lecture
directe au détriment des commentaires préexistants.
Nouvelle lecture qui a conduit à la rupture de la Réforme.
La seconde, écrite par notre collaborateur et ami le pasteur
Louis Seban, couvre les
XVIIe et XVIIIe siècles et nous explique comment la Bible fut
progressivement réduite à un livre comme les autres,
se répandant dans la culture profane. Enfin la troisième
conférence évoque les temps modernes et post-modernes.
Elle nous montre bien l’origine et la montée des divergences
entre biblisme, libéralisme et évangélisme.
Une bonne synthèse, parfois savante, mais riche d’explications
et de détails peu connus. 
Henri Persoz
Madeleine Hue-Braekman, Jean-Loup Seban, Ghislain Nazé,
L’Évangile redécouvert, causeries œcuméniques
à l’occasion de l’Année de la Bible. Les
cahiers de la Colombe. N°1, 2000. On peut se procurer gratuitement
ces cahiers en écrivant à L. Gagnebin, 67, rue de
l’Aqueduc, 75010 Paris. Joindre un timbre de 70 cents.
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Livre : Avant Schweitzer
On
associe en général uniquement le nom d’Albert Schweitzer
à celui de l’hôpital de Lambaréné
sur la rivière de l’Ogooué, dans ce qu’on
appelait autrefois le Congo. Le mérite du livre Avant Schweitzer,
d’Othon Printz, en dépit de quelques erreurs dues sans
doute à une correction trop rapide, est de nous faire connaître
les noms et la vie des pionniers qui, avant le célèbre
médecin et théologien, ont vécu, dans cette région,
une vie consacrée à l’éducation des Africains
et à leur évangélisation, tout en étant
appuyée sur une importante pratique médicale. Trois
figures se détachent : celles de l’Américain Robert
Nassau, celle, touchante, de l’Alsa-cienne Valentine Lantz, qui
a poursuivi la mission où s’était épuisé
son mari, celle du Suisse Maurice Robert. Mais, à nos yeux,
un des intérêts indirects du livre est de montrer aussi
l’évolution spirituelle de ces missionnaires qui, en général
issus de milieux orthodoxes, voire piétistes, ont modifié
leurs conceptions religieuses au contact du continent africain et
se sont mis à professer de plus en plus un protestantisme libéral
qui les a mis en difficulté au sein de la Société
des Missions de Paris. 
Bernard Félix
Othon Prinz, Avant Schweitzer, Do Bentzinger éditeur, 2004.
ISBN 2-849600-14-8 • 18 €.
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Livre : Les protestantismes
Le
pasteur Michel Leplay signe là un petit livre synthétique
et bien documenté sur l’histoire du protestantisme, ou
plutôt des protestantismes. Il peut permettre à un vaste
public de saisir la nature profonde de ce grand mouvement issu de
la Réforme, avec ses tâtonnements, ses recherches, ses
diversités, et toujours dans son désir d’être
fidèle à l’Évangile.
Ce livre n’est donc pas un exposé sur les différents
protestantismes d’aujourd’hui, mais plutôt un retour
sur leur histoire commune. Sauf en ce qui concerne l’œcuménisme,
le XXIe siècle n’est pas très factuellement abordé,
ce serait un autre livre. En montrant d’où les différents
protestantismes viennent, ce qu’ils ont été et
ce qu’ils ont suscité, l’auteur nous montre ce qu’ils
sont. Et l’on voit aussi que les débats d’aujourd’hui
ne sont pas toujours nouveaux !
On peut d’ailleurs penser que ce petit livre, écrit
avec élégance, est l’un de ceux qui permet le mieux
de parler du protestantisme. On évite en effet l’exposé
dogmatique tentant d’enfermer le protestantisme dans des principes
figés et dans une vision unique et idéaliste, ce qui
est bien réducteur. L’histoire permet, elle, de comprendre
la démarche vivante des mouvements issus de la Réforme.
Elle impose aussi une certaine ouverture et un appel à la tolérance
dans la mesure où il y a toujours eu différents mouvements
dans ce protestantisme sans cesse pluriel, en évolution et
en recherche. 
Louis Pernot
Michel Leplay, Les protestantismes, Armand Colin, 2004, 128 pages
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Cinéma : Le père douloureux
C’est
un homme simple, cet in-structeur menuisier, un homme du Nord, pas
démonstratif, plutôt taciturne. Mais il faut dire qu’il
y a cinq ans, son tout jeune fils a été assassiné
(étranglé) par un voyou qui en voulait à son
autoradio. Depuis, la vie s’est disloquée, sa femme l’a
quitté et s’il continue à vivre, c’est en
se raccrochant à son métier : inculquer à une
nouvelle génération de menuisiers, l’amour du travail
bien fait. Voilà qu’on lui propose un nouvel apprenti
dont le nom l’atteint comme un coup de poing : il s’agit
du jeune assassin de son fils, sorti de prison après cinq ans.
Pourtant, il l’accepte. Pour se venger ? pour comprendre ? ou
pour sentir encore la présence de son fils dans le sillage
de son meurtrier ?
Maître de son émotion, il traite le nouveau venu à
l’égal des autres. Mais malgré son mutisme, son
approche de plus en plus serrée du jeune apprenti nous fait
craindre un dénouement tragique.
Un dimanche, il invite le jeune homme à l’accompagner
pour chercher des planches dans une scierie au fond des bois. Le trajet
en voiture se mue en véritable jeu du chat et de la souris
: l’adulte essaie d’obtenir un aveu sans toutefois donner
l’éveil, le garçon, guère plus di-sert,
tente avec innocence quelques rapprochements envers ce professionnel
qu’il admire, de la partie de baby-foot à la demande d’être
son tuteur. Vient enfin, la révélation de la vérité
: « Ce gamin que tu as tué, c’était mon fils.
»
S’en suit une angoissante poursuite à travers la scierie,
puis à travers les bois, où l’issue du drame semble
inévitable. Lorsque l’adulte rattrape l’enfant et
le plaque au sol, il lui serre le cou de ses larges mains et l’on
se dit : c’en est fait. Mais, très lentement, dans un
silence interminable, les mains se desserrent et se plaquent de chaque
côté du visage du jeune, terrorisé. Le corps massif
emprisonne encore l’apprenti, les regards s’affrontent.
Alors, de longues minutes de silence s’égrainent où,
dans les yeux du père brisé, on déchiffre tour
à tour la colère, la haine, la peur, puis la lassitude,
la compassion et enfin, lorsqu’il se relève et s’en
va, seul, le pardon. 
Arlette Welty-Domon
Le Fils (Belgique, 2002) de Jean-Pierre et Luc Dardenne.
Disponible en DVD, Arte Vidéo.
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Disque : De Venise à Dresde
Voilà
un premier disque, consacré à Heinrich Schütz (1585-1672),
pleinement réussi par un jeune ensemble musical, la Chapelle
Rhénane dirigé par Benoît Haller. Les onze motets,
tirés du deuxième Livre de Symphoniae sacrae paru en
1647, sont ainsi mis en valeur avec beaucoup de talent par ces jeunes
chanteurs et instrumentistes ; ils nous révèlent un
Schütz marqué par ses voyages à Venise et ses différentes
rencontres avec Gabrieli en 1609 et Monteverdi en 1628. Schütz
bénéficia d’un enseignement sis à la croisée
des chemins, Gabrieli illustrant une esthétique mise en cause
par un Monteverdi, et sut pleinement transcender ces influences pour
développer un langage personnel et neuf dans cette Allemagne
ravagée par la Guerre de Trente ans : il fut ainsi le premier
à écrire un oratorio moderne de langue allemande, ainsi
qu’un opéra allemand.
Aujourd’hui apparaît un Schütz qui
ne correspond pas à l’image austère que l’on
peut parfois s’en faire. Outre la musique elle-même –
soumise à une exigence d’expressivité la plus grande
par rapport au texte – et l’interprétation soignée
des musiciens, les choix réalisés par l’ensemble
quant à l’instrumentation expliquent aussi cette «
surprise » (toute relative) à l’écoute ;
en effet, l’instrumentarium correspond à celui adapté
à la musique italienne : les cornets alternant avec les violons
et la basse continue étant étoffée, en sus de
l’orgue, par violoncelle, violone et théorbe. En résumé,
un disque à recommander !
Matthieu Baboulène-Fossey
Heinrich Schütz : Symphoniae Sacrae par la Chapelle Rhénane,
sous la direction de B. Haller, 1 CD K61763.
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