logo d'Évangile et Liberté

Numéro 204
Décembre 2006
( sommaire )

Résonner

François Cheng, académicien d’origine chinoise, naturalisé français, a fait paraître un livre sur la beauté au printemps dernier. Robert Serre y trouve une méditation sur Dieu et sur la relation des hommes à Dieu.

À propos de Cinq méditations sur la beauté de François Cheng

François Cheng écrit que « la beauté est toujours un advenir, un avènement, pour ne pas dire une épiphanie et plus concrètement un “apparaître-là” ». Cette présentation de la beauté ne correspond-elle pas à celle du Royaume de Dieu tel qu’aurait pu le décrire Albert Schweitzer, peut-être parce que la beauté tout comme le Royaume de Dieu relève de l’absolu, de l’insaisissable, de la transcendance ? Ainsi, il me semble qu’on peut lire les propos de François Cheng sur la beauté comme une méditation sur la vie, sur Dieu. De plus, cet écrivain chinois passionné par la culture de la vieille Europe, perçoit dans une œuvre d’art la touche délicate à la fois du qui-yun – le souffle rythmique – et du shen-yun – la résonance divine –, deux termes qui, associés, rappellent le rouha hébreu ou le pneuma grec – le souffle, l’esprit mais aussi l’inspiration – et l’inspiration est à la fois la source des œuvres d’art et source divine elle-même. Ces termes grec ou hébreu figurent dans Ez 37,14 « je mettrai mon souffle en vous pour que vous viviez », dans Ap 11,11 « un souffle de vie, venu de Dieu, entra en eux », tout comme dans 2 R 19,7 « sous mon inspiration, il [le roi Ézékias] retournera dans son pays ». La beauté est un reflet de la source divine perceptible dans un paysage, dans une fleur, dans une œuvre d’art, chez une personne. Cette perception se situe quasiment toujours dans un moment très privilégié, éphémère, furtif, tout à fait subjectif, un kairos (moment propice) où une relation profonde s’établit entre le sujet de la beauté et l’observateur, tout comme cette relation peut s’établir entre le croyant et l’infini divin.

En clair, on pourrait trouver une analogie entre la relation au beau et la relation à Dieu : un lien, terme fondamental dans une vie, peut-être plus fondamental que le sens d’une vie, comme le suggère Régis Debray. François Cheng exprime en d’autres termes cette intuition : « La vraie transcendance est dans l’entre. » La beauté est dans « l’entre » – par exemple entre l’œuvre d’art et l’observateur – et Jésus déclare aussi à ces disciples en Mt 18,20 : « Car, là où deux ou trois se trouvent réunis, je suis au milieu d’eux. »

Le Royaume de Dieu, lui qui est dans « l’apparaître-là », ne se conçoit-il pas surtout dans « l’entre », dans la relation profonde entre Dieu et les hommes et entre les hommes entre eux, comme nous invite à le méditer François Cheng : « La beauté implique un entrecroisement, une rencontre entre les éléments qui constituent une beauté, entre cette beauté présente et le regard qui la capte. De cette rencontre, si elle est en profondeur, naît quelque chose d’autre, une révélation, une transfiguration, tel un tableau de Cézanne né de la rencontre du peintre avec la Sainte-Victoire. […] Dans l’amour comme dans la beauté, tout vrai regard est un regard croisé. Dans une authentique expérience d’amour et de beauté, toute créature n’est-elle pas élevée à la dignité du créateur, tant il est vrai que les regards échangés font naître l’un et l’autre, et les font être. »

L’art est une création qui aide à rejoindre Dieu. feuille

Robert Serre

haut

 

Merci de soutenir Évangile & liberté
en vous abonnant :)


Vous pouvez nous écrire vos remarques,
vos encouragements, vos questions



Accueil

Pour s'abonner

Rédaction

Soumettre un article

Évangile & liberté

Courrier des lecteurs

Ouverture et actualité

Vos questions

Événements

Liens sur le www

Liste des numéros

Index des auteurs


Article Précédent

Article Suivant

Sommaire de ce N°