Le baptême dHenri
de Navarre a fait partie de ces erreurs : né le 13 décembre
1553, et non le 14 comme on la dit, lenfant est baptisé
en janvier 1554, et non en mars, autre erreur.
450 ans plus tard quelle importance attacher à
une différence de jour ou de mois ? Celle de toute histoire familiale
à respecter, et celle de lexigence scientifique de lHistoire,
pour une date de naissance ou de bataille.
Après le baptême, combien dautres
légendes et erreurs fleuriront autour dHenri de Navarre,
enfant vif et intelligent, puis autour dHenri IV responsable de
ses choix, resté fidèle à une rigueur toute huguenote,
jusquà sa dernière abjuration de 1593.
« Dernière », car que dencre
mêlée de fiel pour les uns, de moqueries pour les autres,
a coulé autour des abjurations dHenri, sans jamais aller
jusquau bout des textes ou sans reprendre la chronologie de ces
abjurations : 1560, 1562, 1563, 1572, 1576, 1593.
Six changements de religion Pourquoi ? Jeanne
dAlbret, convertie à la Réforme à Noël
1560, élève Henri, né « catholique »
dans la nouvelle religion, face à son époux Antoine de
Bourbon qui, hésitant, finira par choisir, avec le parti des
Valois, le catholicisme. En effet en 1562 il enlève Henri pour
le confier à la cour où désormais lenfant
assistera à la messe, contraint et forcé.
Honoré Daumier : "Une
séance de l'Union électorale"
|
À la mort dAntoine de Bourbon, en 1563, Jeanne
dAlbret na de cesse de retrouver Henri quelle ramène
en Béarn, et quelle éduque à nouveau dans
la Réforme. Ce nouvel épisode huguenot, vécu pleinement
et de toute bonne volonté par Henri, se poursuit jusquen
1572 : les « noces vermeilles », le 18 août, du prince
de Navarre avec sa cousine Marguerite de Valois catholique, nentament
pas la position réformée du prince ; noces que Jeanne
dAlbret a dû accepter, mais quelle ne verra pas, morte
en juin 1572, de maladie et non dempoisonnement, comme on sest
plu à le dire. Une semaine plus tard, le 25 août, au massacre
de la Saint-Barthélemy, Henri de Navarre est épargné,
davantage grâce à son rang à la cour, que grâce
à son abjuration comme on la colporté. Mais sil
a été prudent de revenir, apparemment, au catholicisme,
Henri nen est pas moins prisonnier de la cour, et le reste jusquen
1576. Cette date importante voit la cinquième abjuration du nouveau
roi de Navarre : cette même année, sans doute avec des
complicités de Ligueurs, Henri séchappe et chevauche
vers le sud, sarrête à Niort, et là revient
à la Réforme, publiquement et officiellement, seul responsable
de ce choix dont il dira « la religion se plante au cur
des hommes par la force de la doctrine et de la persuasion, et se confirme
par lexemple de vie et non par le glaive ».
Cet « exemple de vie » est dès lors
la conduite dHenri devenu roi de France en 1589, roi huguenot
que le XVIe siècle ne peut concevoir.
Henri IV est trop fin politique pour ne pas compren-dre
que la paix civile de son royaume, avec la fin des guerres de religion,
lui coûtera cher : le prix dune ultime abjuration ; celle
de 1593 qui fait de lui le roi « très-chrétien ».
Cependant, le roi catholique par politique ne cachera ni ne balaiera
jamais, par son « exemple de vie », léducation
de sa mère, dans son métier de roi, comme en famille.
LÉdit de Nantes davril 1598 (dont on cherche en vain
le jour car seul le mois était noté et non le jour), pour
avoir été attaqué nen a pas moins apporté
la paix après quarante ans de guerres civiles ; Édit inspiré
par les idées contenues dans le volume « Discours politiques
et militaires » dun autre grand huguenot, mort au combat
en 1591 et ami dHenri IV, François de la Noue.
Derrière la vérité du fait historique,
ladhésion dHenri IV au catholicisme en 1593, rien
ne peut interdire lhypothèse fondée sur des faits
et des actes que le roi est resté un homme de la Réforme
cédant à la politique du XVIe siècle pour que cessent
de sentretuer ses sujets. Tous chrétiens.