
Numéro 186 - Févier 2005
( sommaire
)
Regarder, Écouter, Lire
Livre : Une source d’informations
en théologie pratique : les Cahiers de
l’IRP
La théologie pratique est
la branche de la théologie qui s’intéresse en priorité
à ce qui se passe concrètement dans les Églises
et parmi les chrétiens : problèmes d’organisation,
de liturgie, de prédication, de cure d’âme, d’enseignement
religieux, de relation avec les arts et les diverses formes de culture
contemporaine, etc.
Longtemps, la théologie pratique fut un peu le parent pauvre
de la théologie. Mais ces vingt ou vingt-cinq dernières
années, les représentants de cette branche de la théologie
ont fait de gros efforts pour renouveler leur réflexion et
la mettre à la portée des principaux intéressés.
C’est ainsi qu’a été fondée, en 1991,
une Société internationale de théologie pratique
(d’expression française), et que les publications se sont
multipliées, sous forme de livres ou d’articles de revues.
L’une
de ces dernières est précisément spécialisée
en théologie pratique : les Cahiers de l’IRP. Il s’agit
de petits cahiers, édités à raison de trois numéros
par an, par l’Institut romand de pastorale actuellement domicilié
à la Faculté de théologie de l’Université
de Lausanne.
De format A5, réalisés à moindres frais, ces
Cahiers de l’IRP existent depuis mai 1989 et en sont à
leur 49e livraison. Leur contenu, très varié d’une
livraison à l’autre, est en général de nature
à intéresser un lectorat bien plus large que celui des
seuls spécialistes. Les conseillers presbytéraux et
autres personnes intéressées par la vie concrète
de nos Églises peuvent y trouver largement de quoi satisfaire
leur curiosité ou leur besoin d’informations. Les auteurs
des articles sont presque toujours protestants, rattachés à
l’une ou l’autre des Facultés de théologie
de France, de Belgique ou de Suisse romande. Mais la voix du terrain
s’y fait aussi entendre, par des contributions de pasteurs ou
de laïcs à l’œuvre dans tel ou tel secteur d’activité.
L’abonnement annuel pour trois numéros est de 9,00 Euros.
Adresse : Institut romand de pastorale, BFSH 2, CH-1015 Lausanne.
Commande en ligne : www.unil.ch/irp.

Bernard Reymond
haut 
Livre : Histoire de Jésus
? Nécessité et limites d’une enquête, livre
d'Étienne Nodet
Étienne Nodet est dominicain
et polytechnicien, et l’un des chercheurs les plus en vue à
l’École Biblique de Jérusalem. Mais son attachement
à l’Église s’efface très rapidement
devant les résultats de ses recherches, et c’est avec
une grande liberté intellectuelle qu’il nous livre là
un regard extraordinairement neuf sur le Christ, en réexaminant
ce que l’on sait de lui dans les Évangiles par rapport
aux découvertes les plus récentes concernant le judaïsme
du premier siècle.
C’est ainsi qu’il nous fait apparaître des enjeux
que l’on ignorait dans la prédication du Christ et dans
certains de ses gestes. Dire que Jésus était juif n’est
pas nouveau, mais on découvre aujourd’hui que le judaïsme
du temps de Jésus ne se limite pas au Talmud et au Midrash,
mais était une véritable nébuleuse avec des espérances,
des combats, des options très variés. C’est à
partir de cela qu’Etienne Nodet relit l’Évangile
en nous donnant des clés de lecture inédites. Si l’on
regarde la Cène, par exemple, non plus à partir du repas
pascal, mais à partir d’un rite essénien où
ce genre de repas annonçait l’entrée dans l’eschatologie,
alors beaucoup de choses s’éclairent...
Voilà un livre certes de niveau plutôt universitaire
et difficile, mais d’une lecture très stimulante et recelant
ici ou là de vrais trésors.
Louis Pernot
Étienne Nodet : Histoire de Jésus ? Nécessité
et limites d’une enquête. Cerf, 2003, 244 p., 19 €.
haut 
Livre : Le pasteur Samuel
Vincent à l’aurore de la modernité. 1787-1857
Au début du dix-neuvième
siècle, le pasteur Samuel VINCENT a eu le souci du renouveau
spirituel, théologique et intellectuel d’un protestantisme
français sorti très affaibli d’un siècle
de clandestinité. Il traduit des ouvrages de l’anglais
et de l’allemand,
publie une revue de théologie, présente le protestantisme
au grand public, répond aux attaques de Lammenais. Ce précurseur
du libéralisme veut penser la foi dans le cadre de la modernité
naissante. On vient de publier les actes d’un colloque qui lui
a été consacré à Nîmes en 2003.
On y trouve le meilleur comme le pire : d’excellentes communications
situent bien l’œuvre de Vincent et ouvrent des perspectives
nouvelles ; d’autres superficielles, parfois mal informées,
sont de bien mauvaise qualité. On regrette qu’on n’ait
pas fait un tri pour la publication et que l’impression, artisanale,
soit médiocre (présentation peu soignée, nombreuses
coquilles). C’est dommage. Il n’en demeure pas moins que
s’il faut l’utiliser avec discernement, il y a beaucoup
à glaner dans ce volume. Signalons, entre autres et comme particulièrement
bienvenus, les textes de nos collaborateurs André Gounelle
et Bernard Reymond.
Laurent Gagnebin
Collectif, Le pasteur Samuel Vincent à l’aurore de la
modernité, 1787-1857, Société d’Histoire
du Protestantisme de Nîmes et du Gard, 3 rue Claude Brousson,
30000 Nîmes, 359 pages, ISBN 2.950 8651
haut 
Cinéma : "Amen"
Les wagons de la honte de Costa-Gavras
On a beaucoup reproché
au réalisateur Costa-Gavras d’avoir un peu trop insisté
tout au long de son film Amen sur le même train de marchandises
traversant la campagne. Mais c’est ne pas remarquer que ces plans
répétitifs ne sont qu’apparemment identiques. Un
peu plus d’attention montre que certains trains traversent l’écran
de droite à gauche et d’autres de gauche à droite,
que d’aucuns passent toutes portes ouvertes et vides et d’autres
entièrement fermées. Cette image insistante est en fait
la colonne vertébrale du film, son leitmotiv métaphorique
: le charroi quotidien de centaines et de milliers de juifs vers les
fours crématoires.
Ce qu’a
voulu de toute évidence l‘auteur, c’est impressionner
notre regard en faisant défiler à toute vitesse ces
wagons prétendument « à bestiaux » dans
l‘espace paisible de nos insouciances. Il a voulu inscrire dans
le temps et la durée la persistance de ce mouvement incessant
et de ce bruit obsédant. Cette obsession de l’image et
du son est sa manière à lui de dire à chacun
: souviens-toi !
Hélas, comme nous l’avons appris depuis, trop de prudence
et d’hypocrisie frapperont de cécité les populations
et la majorité de leurs représentant spirituels.
Pourtant, deux individus, deux chrétiens vont se battre au
nom de l’Évangile contre l’horreur.
Chacun apparaît dans cette fiction étonnamment conforme
à sa tradition théologique :
Le protestant, qui de l’intérieur même du système
– il est officier SS –, dénonce le crime à
tous les niveaux par sa parole et tente de saboter la cadence de production
du gaz mortel.
Le catholique, prêtre jésuite, proche du Vatican, ne
trouve pas d’autre issue devant le silence de ses pairs que le
Sacrifice de sa vie en se faisant embarquer, l’étoile
jaune cousue sur sa soutane, dans un de ces trains maudits, que la
caméra nous révèle tout à coup, grouillants
de femmes, d’enfants et de vieillards.
Jean Domon
Amen de Costa-Gavras
haut 
Écouter : Pour un
libéralisme musicologique...
Évangile et
liberté vous parle souvent de libéralisme théologique.
Les avancées que la théologie a pu connaître avec
les libéraux et certains des travers qui en découlèrent
se retrouvent dans le domaine musical.
Il y a maintenant une vingtaine d’années
qu’un regain d’intérêt pour la musique baroque
s’est fait jour. Les gens qui y participaient viennent d’horizons
très différents, de Harnoncourt, violoncelliste éduqué
dans la grande tradition viennoise à Herreweghe, psychiatre
gantois qui lance en autodidacte le Collegium Vocale, choeur, amateur
à l’origine, dont la qualité n’a plus à
être vantée (CDHarmonia Mundi). Tous deux, avec G. Leonhardt,
participent à une pierre miliaire dans ce travail, l’intégrale
des Cantates de Bach (CD Teldec). Et voici qu’apparaît
un travail d’« exégèse historico-critique
» des traités anciens qui dormaient dans les bibliothèques.
Peu d’écrits cependant destinés
à un public général si on fait exception des
2 volumes de Le Discours musical (1. Monteverdi, Bach, Mozart ; 2.
Pour une nouvelle conception de la musique, tous 2 dispo. chez Gallimard).
Curieusement une science aussi peu exacte génère rapidement
des intégrismes de chapelles qui se couvrent mutuellement d’anathèmes,
nouvelle dispute des Anciens et des Modernes, des baroqueux et des
romantiques, on pourrait dire des orthodoxes et des libéraux…
Heureusement les choses semblent changer, les écrits
de R.Taruskin (en anglais, Oxford University Press) et les récents
enregistrements de Strauss dirigés par Harnoncourt à
la tête de l’Orchestre Philharmonique de Vienne, tout récemment,
Bruckner sous la baguette de Herreweghe ou encore Minkowski qui dirige
Offenbach au Châtelet (Févier 2005) en sont des signes encourageants…
À suivre…
Louis Catala
haut 
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