Né le 8 septembre
1497 à Dieuze (Lorraine), Musculus, fils de tonnelier, entreprend
des études à Ribeauvillé. Il rejoint l’école
latine de Sélestat où il s’imprègne de tradition
humaniste. Il est accueilli comme novice par les bénédictins
de Lixheim, et il est ordonné prêtre à 15 ans.
Dès 1518, Musculus s’imprègne des
écrits de Martin Luther. Il en défend les thèses
auprès de ses frères moines. Devenu prieur, il quitte
son abbaye et, en 1527, s’installe à Strasbourg avec Margareta
Barth qui deviendra son épouse. 
Le couple vit dans la précarité. Musculus
apprend le métier de tisserand. Est-ce Martin Bucer, qui, par
amitié ou par compassion, l’introduit auprès du Magistrat
de la ville ? Toujours est-il que Musculus est chargé de la prédication
de l’Évangile à Dorlisheim. En 1529, il revient à
Strasbourg pour prendre les fonctions de diacre en la cathédrale.
Parallèlement, il poursuit ses études de théologie,
étudie l’hébreu en compagnie de Capito et Bucer et
publie un dictionnaire et une grammaire hébraïques.
Son œuvre se déploie à Augsbourg
et Berne
Envoyé en Souabe en 1530, il sera prédicateur
à Augsbourg, un an après que Charles Quint a repoussé
définitivement les textes qui deviendront la « Confession
d’Augsbourg ». Son engagement et ses qualités théologiques
le rendent acteur de premier rang dans le processus de la Réforme.
Délégué d’Augsbourg, il participe à
l’élaboration des accords de Wittenberg en 1536, en 1540
aux discussions de Worms, en 1541 aux débats aboutissant à
l’ « Intérim de Regensburg » destiné
à appliquer les décisions du Concile de Trente et ramener
les « évangéliques » dans l’enceinte
catholique romaine. En 1547, Charles Quint décrète l’
« Intérim ». Musculus qui s’y était opposé
ouvertement quitte la ville le jour même du décret, le
15 mai 1548.
Il est accueilli à Zurich, mais doit en repartir
rapidement, les autorités craignant de déplaire à
l’empereur. Il trouve asile à Bâle. Sa femme et ses
enfants l’y rejoindront. Mais il est obligé de s’enfuir
de la ville assiégée par les Espagnols, et s’installe
à Saint-Gall. Une perspective plus digne s’ouvre enfin :
le Conseil de la ville de Zurich l’invite ! Il n’y reste que
peu de temps et s’installe à Berne, où il accepte
la chaire d’exégèse en 1549.
Musculus y développe une activité intense
de recherche, d’enseignement, de publication. Il traduit des œuvres
grecques en latin, rédige des commentaires bibliques. Il correspond
avec Jean Calvin et les plus grands humanistes de son temps – dont
Érasme. Ouvert aux questions de son temps, Musculus suit l’évolution
de la Réforme, est attentif aux menaces que font peser sur elle
les événements politiques. Il publie, en 1550, un texte
sur la situation de la Hongrie dominée par les Turcs, intervient
en faveur des protestants persécutés d’Augsbourg
et sa maison est un lieu d’asile pour de nombreux réfugiés.
Musculus décline l’invitation de l’évêque
de Canterbury en 1551, pour succéder à son ami Martin
Bucer. Il refuse aussi celle de Strasbourg et Augsbourg, et d’autres
pour Heidelberg, Marbourg et Cassel… Il meurt à Berne le
30 août 1563 en laissant une œuvre considérable.
Témoin et acteur du protestantisme naissant,
malgré lui.
L’homme de conviction que fut Musculus nous interpelle
autant que l’érudit. Sans doute parce que l’enseignant
qu’il fut ne se plaisait pas à asséner des vérités,
mais partageait avec l’auditeur et le lecteur le goût de
la recherche. Prônant la tolérance, cet enseignant questionne.
S’il fallait lui trouver un qualificatif, nous appelerions
« chercheur de vérité » cet ancien bénédictin
qui se souvenait : « Je suis sorti des Ordres parce que ceux-ci
ne m’ont pas transformé ! »
Ainsi compris, Musculus restera toujours un exemple à
suivre ! 
Ernest
Winstein