Résurrection
de la chair, des corps : bien des confessions de foi les affirment.
On se rappelle ces innombrables œuvres picturales
figurant de manière à la fois suggestive et naïve
ce moment de la vie future.
Il m’est certes complètement indifférent
de savoir si mes orteils, mon foie, mon nez, mon nombril, par exemple,
vont ressusciter.
La résurrection des corps correspond à une
réalité invraisemblable et inimaginable, alors que croire
à l’immortalité de l’âme semble infiniment
plus crédible.
Ces deux expressions différentes, quoique parfois
conjuguées ensemble, coexistent dans les Écritures.
De toute façon, nous ne savons rien des modalités
de la vie éternelle, mais je reste convaincu que nos manières
de l’exprimer nous apprennent quelque chose sur notre façon
de considérer notre vie présente.
Affirmer la seule immortalité de l’âme
peut nous conduire à une aliénation religieuse où
nous pensons devoir sacrifier ce qui est terrestre, matériel,
physique, voire historique, à la souveraineté sans partage
d’une spiritualité exsangue et atemporelle.
Le christianisme est une religion de l’incarnation.
Il professe un matérialisme bienvenu ; il ne fuit pas le monde
corporel ni ne le dévalorise au profit d’un exclusivisme
désincarné niant l’importance des « nourritures
terrestres ».
Parler de la résurrection des corps peut alors
vouloir dire que nous prenons au sérieux le monde actuel dans
toutes ses composantes spirituelles et matérielles.
Cela nous invite à comprendre combien la vision
sémitique et biblique d’un être humain corps et âme
est décisive pour notre manière de vivre concrètement
notre foi.
Rien de véritablement évangélique
ne se dit et ne se fait dans le mépris de notre condition humaine.

Laurent
Gagnebin