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Numéro 220
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Hieronymus Bosch, Chemin de croix. Musée des Beaux-Arts de Gand. Photo D.R. |
Aujourdhui, on différencie « Éthique » et « Morale ». Le philosophe Paul Ricur écrit : « Je réserverai le terme d éthique pour la visée dune vie accomplie sous le signe des actions estimées bonnes (héritage aristotélicien), et celui de morale pour le côté obligatoire, marqué par des normes, des obligations, des interdictions caractérisées à la fois par une exigence duniversalité et par un effet de contrainte (héritage kantien). » Si Ricur affirme la primauté de léthique sur la morale, il affirme aussi la nécessité dobligations, de lois, pour la même raison qui faisait dire à Paul (Rm 7,19) : « Je ne fais pas le bien que je veux et je fais le mal que je ne veux pas. » Cependant, de lapplication des lois à des cas concrets découlent parfois des conflits qui ne peuvent être résolus que par une « sagesse pratique ». Aristote lavait remarqué : « La loi est toujours quelque chose de général et il y a des cas despèce pour lesquels il nest pas possible de poser un énoncé général qui sy applique avec certitude. » Leuthanasie en est un bon exemple.
Une citation de Paul Ricur complète la réflexion :
« La pensée spéculative est tirée en arrière vers lorigine : Doù vient le mal ?, demande-t-elle. La réponse non la solution de laction, cest : Que faire contre le mal ? Le regard est ainsi tourné vers lavenir, par lidée dune tâche à accomplir, qui réplique à celle dune origine à découvrir. »
Axel Kahn, médecin généticien, a publié
en février 2008, en collaboration avec Christian Godin, philosophe,
LHomme, le bien, le mal, chez Stock. Axel Kahn est président
de luniversité Paris-Descartes et Directeur de lInstitut
Cochin ; il a été membre du Comité consultatif
national déthique de 1992 à 2004. Le 3 février
2008, il a donné une conférence au Foyer de lÂme
à Paris, sur cette question du bien et du mal. Le texte qui
suit est la retranscription de cette conférence daprès
un enregistrement, et son style reste « oral ». Mais
la qualité de son contenu est telle quil nous a semblé
intéressant de le publier tel quel.
Marie-Noële et Jean-Luc Duchêne
Francisco Goya y Lucientes,
Caprice. |
On connaît le texte de lEcclésiaste : « Vanité des vanités, tout nest que vanité ; tout ce qui a été sera. » Comment le scientifique qui sait quil construit lavenir, un avenir qui na jamais été, qui sera différent de tout ce qui a été, reçoit-il cette sagesse ? Est-il étonné ? Est-il perplexe, voire même irrité par cette circularité de la pensée ? En réalité non, parce que cest une des données importantes de la manière dont on peut envisager le futur, et notamment le futur de lhomme. Ce futur de lHomme est caractérisé par une ambiguïté.
Dune part, comme le scientifique que je suis vous la dit, en effet demain sera différent daujourdhui. Demain les connaissances se seront encore accrues, et le rythme de laccroissement des connaissances aura continué de ne connaître sans doute aucune pause. Un accroissement exponentiel de la connaissance permettant de développer des techniques, de développer des moyens mis au service de lacquisition de la connaissance. Ces techniques changeront le monde. Pour le meilleur nous lespérons, pour le pire nous le craignons. Et nous ne savons pas très bien ce que sera ce monde dans lequel nos petits-enfants, nos arrière-petits-enfants auront notre âge.
Et pourtant dun autre côté en effet la Bible à raison. Le texte de lEcclésiaste dit vrai. Aujourdhui comme du temps de Platon, comme du temps du roi David et comme demain, comme dans cent ans, comme dans cinq siècles, il y aura des femmes et des hommes qui aimeront, qui haïront, qui connaîtront lenvie, le désir, la jalousie, la fureur, le désir de puissance, qui connaîtront également des grands enthousiasmes, des grandes pulsions de générosité.
Et là, en quelque sorte, est dressé le tableau, dans
sa singularité, qui est celui de notre avenir. Un homme qui crée
un environnement intellectuel de connaissances techniques, laissant
une empreinte profonde sur tout ce que nous faisons, sur tout ce que
nous voyons, sur les milieux où nous vivons, et dun autre
côté, un homme qui est dune immuabilité dâme
totalement étonnante. Comment cet homme immuable arrivera-t-il
à faire son affaire de ce monde dans lequel ses puissances auront
plus que décuplé ? Cest bien sûr la vraie
question qui se pose et notamment aujourdhui...
(l'article complet sera en ligne en janvier 2009)
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Numéro 220 |
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