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Numéro 221
août-septembre 2008
( sommaire )

Cahier : Vauban, modèle de tolérance ?,
par Sylvie Rachet

Tolérance et liberté

Évangile et liberté pourrait-il s’appeler Évangile et tolérance ?

Vincens Hubac écrivait (E&L no 196), à propos du protestantisme libéral : « Nous défendons la liberté, nous prônons la tolérance et l’accueil de la pensée d’autrui. » Trois affirmations nécessaires !

Tour Vauban à Camaret-sur-Mer. Photo D.R.

Tour Vauban à Camaret-sur-Mer. Photo D.R.

Le libéralisme (du latin liber : libre) consiste à autoriser et garantir à chaque individu une certaine liberté : liberté économique d’entreprendre, dans le domaine politique ; liberté de croire, et de pratiquer un culte sans contrainte dogmatique dans le domaine religieux.

La tolérance (du latin tolerare : supporter) est une qualité nécessaire pour arriver au libéralisme. Mais elle n’est pas suffisante, bien qu’elle ait souvent ouvert la voie à la liberté.

En 1789, le pasteur Rabaud Saint-Étienne proclamait devant l’Assemblée constituante : « Ce n’est pas la tolérance que je réclame, mais la liberté », soulignant ainsi que la liberté est une exigence plus fondamentale que la tolérance.

Définie comme la possibilité d’agir sans contrainte, la liberté, place tous les hommes sur un pied d’égalité, alors que la tolérance sous-entend la notion de « vérité ». Je tolère que mon prochain se trompe, mais j’espère qu’un jour, il sortira de l’erreur. Jankélévitch écrit : « La tolérance est un moment provisoire. Elle permet à ceux qui ne s’aiment pas de se supporter mutuellement, en attendant de pouvoir s’aimer. »

Rabaud Saint-Étienne continuait : « La tolérance… je demande qu’il soit proscrit à son tour, et il le sera, ce mot injuste qui ne nous présente que comme des citoyens dignes de pitié, comme des coupables auxquels on pardonne. » Mais Jean Baubérot souligne au contraire (Colloque de Genève, oct. 1994) : « Il y a peut-être la nécessité d’une dialectique, d’une tension entre liberté et tolérance, la tolérance étant l’acceptation que l’autre puisse avoir tort, donc qu’on ne mette pas entre parenthèses le problème de la vérité. Cela implique qu’on refuse une liberté indifférente où les diverses opinions se valent. »

Sylvie Rachet, professeur d’histoire, nous présente, dans le cahier de ce mois, un aspect peu connu de Vauban. En effet, ce fidèle serviteur de Louis XIV, d’origine modeste, ne s’est pas contenté de fortifier les frontières. Il s’est élevé contre la révocation de l’Édit de Nantes, prenant la défense des protestants, contraints à l’exil en 1685, s’ils n’abjuraient pas, comme il prit celle des paysans, écrasés d’impôts.

Vauban était-il libéral ? Le libéralisme n’est certes pas une spécificité du protestantisme, mais Vauban est probablement plus réaliste que libéral. Car il n’agit pas tant par conviction philosophique ou religieuse que par souci d’efficacité pour le royaume.

Il n’en reste pas moins qu’il a été un jalon important vers le siècle des Lumières, en prônant une tolérance dont l’époque n’était pas coutumière. feuille

Marie-Noële et Jean-Luc Duchêne

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Vauban, modèle de tolérance ?
par Sylvie Rachet

Portrait de Vauban

Portrait de Vauban

De famille noble et pauvre, Sébastien le Prestre, marquis de Vauban est né en 1633 en Bourgogne, à Saint-Léger de Foucherets, aujourd’hui Saint-Léger-Vauban, près de Vézelay. Fidèle sujet de Louis XIV après la Fronde, surtout connu pour sa carrière militaire et les travaux de fortifications menés aux frontières du royaume, il servira le roi durant 53 ans, mais ne sera élevé à la dignité de maréchal de France qu’en 1703, quatre ans avant sa mort.

Au-delà de sa carrière d’ingénieur du génie et de soldat, Vauban s’est intéressé à de multiples sujets et nous a laissé des études remarquables par leur style et leur pertinence, notamment sur l’économie et les finances du pays. Il a toujours été préoccupé des intérêts du royaume, et de ses sujets, dont il cherche à améliorer un sort bien souvent misérable. Lors de la Révocation de l’Édit de Nantes, il est un des rares contemporains de l’événement à s’élever contre cette décision royale en rédigeant son « Mémoire pour le retour des huguenots », s’érigeant ainsi contre les idées prédominantes en ce XVIIe siècle de grande intolérance.

L’étymologie de « tolérer » est latine : le verbe « tolerare » signifie porter, supporter un poids, un fardeau physique ou moral.

Au sens étymologique, « tolérer » consiste donc à supporter, à laisser faire quelque chose, alors que l’on pourrait l’interdire. La tolérance peut alors être considérée comme une faiblesse : on tolère ce que l’on considère être une erreur.

Un deuxième sens, plus éloigné de l’étymologie, fait de la tolérance une acceptation de la différence. On admet que quelqu’un puisse penser ou agir de façon différente de soi.

Au XVIIe siècle en Europe, c’est la première définition qui prévaut. Lorsqu’un souverain est « tolérant », il supporte que certains de ses sujets pratiquent une autre religion que la sienne, bien que cette dernière soit à ses yeux la seule « vraie » religion. En somme, il accepte qu’ils se trompent. S’établit alors un rapport tolérant-toléré qui fait qu’à tout moment le tolérant peut supprimer la tolérance accordée. C’est ce qui s’est passé en France en 1685 lorsque, par l’Édit de Fontainebleau, Louis XIV révoque l’Édit de Nantes, accordé aux protestants par Henri IV en 1598... feuille

(l'article complet sera en ligne en février 2009)

Axel Kahn

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