Libéralisme, le mot est beau. Il évoque
à la fois la liberté et la générosité.
Et je me sentirais assez prêt à le revendiquer. Il incarne
à mes yeux une attitude de libre réflexion et sa vertu
est l’honnêteté intellectuelle. Pourtant, il ne recouvre
aujourd’hui qu’une partie du monde protestant, un courant
de sa théologie.
Tous ceux qui s’en revendiquent sont-ils à la hauteur de
ces principes ? Sans doute pas, mais ce n’est pas différent
dans les autres sensibilités protestantes. De l’extérieur,
il faut pourtant avouer qu’il ne donne pas l’impression d’avoir
le vent en poupe. C’est qu’il me semble s’épanouir
dans deux contextes différents qui ne sont ici et maintenant
guère d’actualité.
Il peut incarner la revendication de l’intelligence face à
une orthodoxie envahissante et sclérosée. Or, dans les
Églises où il se manifeste, cette situation est largement
dépassée. L’adversaire est ailleurs, peut-être
dans un fondamentalisme radical qui peut toujours se manifester, mais
on ne peut pas dire qu’il soit très virulent dans notre
pays.
Il peut aussi, en situation de chrétienté, permettre à
certains de rester dans l’Église malgré l’évolution
de leur pensée. Nous n’en sommes malheureusement (?) plus
là depuis déjà longtemps. On quitte facilement
les Églises et ceux qui veulent y entrer aspirent souvent à
des convictions fortes et plus précises. Le danger est alors
de le voir s’inventer des adversaires et des oppressions imaginaires
pour se trouver des raisons d’exister.
Si j’avoue volontiers une certaine sympathie pour l’attitude
libérale (même si ma théologie ne l’est sans
doute guère) et les questions qu’elle pose, le « parti
» libéral me semble dans l’Église un peu d’un
autre temps. Au fond, ce qui lui manque pour être en forme, c’est
peut-être une orthodoxie dynamique à laquelle il pourrait
se confronter. Retrouvant son vieil adversaire et son partenaire de
toujours, ils pourraient reprendre le débat qui – lorsqu’il
n’a pas été un dialogue de sourds – a su être
fécond et a donné sa forme à notre protestantisme.
Louis
Schweitzer