Lorsque la femme enfante, elle est dans l’affliction.
Puis, elle est toute à la joie d’avoir mis un homme au monde.
De même, en Christ ressuscité, Dieu donne une impulsion
de joie à notre vie, comme un refus de la mort. Mais qu’en
faisons-nous ?
Voici le temps des adieux de Jésus à ses
disciples. L’heure vient où il va mourir. Il les prépare
à cette épreuve. Ils sont abattus par cette nouvelle.
Comment vivre cette douleur de la séparation totale, radicale
de la mort ? Comment concevoir cette rupture de communication ? Il y
a de quoi être troublé, muet. Jésus explique par
cette image de maternité en quoi sa mort est signe de naissance
pour le monde. La femme qui donne naissance à un enfant souffre,
est accablée, se sépare violemment d’une partie d’elle-même,
qui a grandi et s’est nourrie en elle, d’une partie qui l’a
profondément modifiée en son être propre. En quelques
heures, voici qu’elle passe successivement du deuil de cette proximité
d’existence, avec toute la douleur de la séparation, à
la plénitude de la joie d’avoir participé à
la venue au monde d’un homme. Un don de Dieu, un être nouveau
mis au monde, avec la promesse de l’inattendu rencontré
en lui : voilà bien une bonne nouvelle effaçant l’affliction
d’avant.
Par sa mort inéluctable mais acceptée,
Jésus devient, à l’image du Père, une mère
qui enfante. Naissance d’un monde appelé à une vie
changée ; naissance de communautés créées
par une poignée d’hommes simples témoignant avec
autorité dans le pays, puis au-delà ; naissance d’une
dynamique qui continue, près de deux mille ans après,
de porter au monde un message d’humanité et d’espérance,
malgré les déficiences des porteurs de ce message. Ces
naissances authentifient la présence du crucifié ressuscité
dans les cœurs de ses amis et justifient cette joie que nul ne
peut leur ravir.
Jésus a apporté la joie
Le christianisme est, bien souvent, annoncé par
de sombres doctrines : il fallait que Jésus, Fils de Dieu, meure.
Le pardon de nos fautes, la réconciliation de Dieu avec chacun
de nous, notre salut ne peuvent se faire qu’à cette condition.
Sommes-nous donc coupables, dès notre naissance, de la mort de
Jésus ? Où se trouve la joie que la nouvelle de la résurrection
peut faire naître en nous ? Ne pouvons-nous pas imaginer, pour
nous aujourd’hui, de recevoir cette promesse de Jésus comme
un nouvel élan après l’heure de l’affliction
?
Jésus, le Christ, homme mortel, non divisé mais tout entier
donné à Dieu, est venu nous apprendre à vivre,
du mieux que nous le pouvons, loin de toute volonté de domination,
de puissance, ensemble les uns avec les autres, sans exclure ni rejeter
qui que ce soit. Vivre ! Uniquement apprendre à être !
Sans avoir un instant reculé devant ceux qui se heurtaient à
lui car il était le révélateur de leurs incohérences
et mettait en danger leurs pouvoirs. Sans avoir fui devant l’erreur
de leurs engagements religieux, il a donné sa vie en mettant
au monde une parole vivante en la personne de chacun de ses disciples.
Il a donné la joie de sa présence à leurs côtés
pour combattre les violences rencontrées, jusqu’à
la mort souvent, ayant l’amour pour seule arme. Leurs enseignements
sont parvenus jusqu’à nous : motif de joie.
À nous maintenant de la transmettre !
Notre responsabilité est maintenant de savoir
comment témoigner, avec quels mots et quelles doctrines, afin
de toucher le cœur de l’homme et de l’éveiller
à sa soif, à sa faim de Dieu. Ce sont des mots de joie,
d’espérance, de mise en route que nous aimerions voir courir
le monde, et non des phrases dogmatiques culpabilisantes. Il ne nous
faut pas ternir cette joie donnée par l’Ami, elle est promesse
pour toute vie. Dire notre foi, toujours tenter de l’expliquer,
ne doit pas forcément emprunter les catégories mentales
et les mots de ceux qui nous ont précédés depuis
des siècles. Notre devoir est au contraire de trouver les mots
de notre temps, ceux que peuvent entendre des oreilles nouvelles, des
cœurs vierges d’antiques savoirs. C’est ainsi que notre
joie d’annoncer et de vivre ce que nous annonçons sera totale,
en offrant au monde de nouveaux témoins de l’amour de Dieu.

Florence
Couprie