L’histoire nous
donne des leçons. L’histoire de la religion égyptienne
par exemple. De quoi est-elle morte ? Sans doute d’avoir trop accumulé
de concepts et de personnages. A chaque nouvelle question un nouveau
dieu ou un nouveau lieu… A force d’accumulation, on ne comprend
bientôt plus rien. Beaucoup plus tard, la science aristotélicienne
a suivi le même chemin, la même impasse, en ajoutant une
nouvelle « petite loi » pour répondre à chaque
nouvelle « petite question ». Il aura fallu des Giordano
Bruno, Copernic et Newton pour refonder la science à partir d’une
nouvelle logique, d’un nouveau système. Quelles leçons
tirons-nous de l’histoire ? Visiblement aucune.
Prenons un exemple : l’Eglise Réformée
de France réfléchit actuellement sur le ministère
pastoral. Notre journal s’en est fait l’écho. Que constate-t-on
dans ces débats ? Une série d’accumulations issues
de l’histoire. Au XVI° siècle, le pasteur était
un théologien-prédicateur ; au XVII° siècle,
on attend de lui une exemplarité de vie (c’est le siècle
des puritanismes) ; au XVIII° siècle, il devient un leader
quasi-prophétique ; au XIX° siècle, le grand siècle
bourgeois, le pasteur devient un aumônier-chapelain dont le rôle
principal est la visite ; au XX° siècle, il doit s’engager
socialement et être de surcroît un spécialiste de
l’animation. En cette aube de XXI° siècle, on attend
simplement du pasteur qu’il soit théologien, prédicateur,
exemplaire, prophète, visiteur, animateur, gestionnaire, voire
plombier, informaticien, journaliste, bricoleur et psychologue. C’est
tout ! Etonnez-vous après qu’il soit fatigué ou «
en crise »… A moins que le pasteur idéal soit quelqu’un
qui soit « moyen » partout. Motivant, non ?
Face à cette réalité, il existe
deux solutions, toutes deux radicales. La première consiste à
affirmer, comme les réformateurs, la prédominance de la
théologie sur tout le reste. Il faudrait alors approfondir la
question des ministères des laïcs, afin de satisfaire les
autres attentes. La seconde solution consiste à considérer
que les pasteurs doivent répondre à toutes ces demandes.
Ils ne sont pas surhumains. Cassons plutôt le modèle pastoral
classique « un pasteur – une paroisse » et constituons
des « équipes pastorales » où l’on n’attend
pas tout de chacun. Agissons sur la diversité des qualités,
et des défauts… Cela ferait évoluer l’ensemble
de l’Eglise dans une attitude moins « club » et plus
« témoignante ».
Dans les deux cas, il s’agit de refondation ou de
« réforme permanente » comme Calvin nous invitait
à le faire. Cela ne se fera pas sans douleur, mais avons-nous
le choix ? Alors, impasse historique ou refondation dynamique ?