Le théologien
catholique romain Louis Bouyer est mort le 23 octobre dernier. Bien
des journaux ont consacré un article important à sa disparition.
Pourquoi en parler à notre tour dans Évangile et liberté
? Parce que Louis Bouyer avait été pasteur après
avoir fait des études de théologie protestante dans les
facultés de Paris et de Strasbourg. C’est en 1944 qu’il
fut ordonné prêtre dans l’Église romaine. Et
alors ? C’était bien son droit de passer ainsi du protestantisme
à l’Église catholique. Assurément. Et l’on
s’est plu à citer le titre de l’un de ses très
nombreux livres : Du protestantisme à l’Église (Cerf,
1954). Voilà qui est clair pour tous ceux qui, hier comme aujourd’hui,
voient en Rome « l’unique Église », selon l’expression
insistante de Louis Bouyer.


Le Mur des Réformateurs
à Genève et le baldaquin de l’autel de la basilique
Saint-Pierre à Rome. D.R..
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Mais ce que l’on n’a (comme par hasard) nullement
rappelé, c’est que le pasteur Pierre Fath, ami et collaborateur
d’Évangile et Liberté, a publié une réponse
de plus de 250 pages au livre de Louis Bouyer. Bien sûr, ce qu’un
humble pasteur a pu écrire alors n’intéresse pas
la presse, surtout catholique. Ce silence n’est que trop éloquent,
hélas. Le titre choisi par Pierre Fath, qui, lui, avait fait
l’expérience inverse en allant du catholicisme au protestantisme,
était une magnifique réplique à celui de Louis
Bouyer : Du catholicisme romain au christianisme évangélique
(Berger-Levrault, 1957). On a bien tort d’ignorer ou feindre d’ignorer
l’importance d’une telle riposte. Elle reste d’une pertinence
parfaitement actuelle. À savoir, – et il faut sans cesse
le répéter –, que c’est le « romanisme
» surtout que nous dénonçons dans le système
doctrinal, institutionnel et hiérarchique de l’Église
catholique ; que c’est bien d’un christianisme purement et
simplement évangélique dont nous nous réclamons,
et non du seul protestantisme apparu au XVIe. Ce christianisme-là,
« non-confessionnel », comme l’appelait le pasteur
A.-N. Bertrand, le grand inspirateur du pasteur Fath, a toujours appartenu
à l’histoire des Églises et transcendé, par
ses fidélités fondamentales à l’esprit des
évangiles, les siècles et leurs bouleversements heureusement
réformateurs.
Laurent
Gagnebin