Y a-t-il un rapport
entre ce que l’homme pense et le réel, qui lui est extérieur
et lui résiste ? Ce qui m’entoure est-il le produit d’un
rêve que je fais ou bien est-il réel ?
Ces questions sont au préalable de notre rapport
au monde. Sans souvent s’en rendre compte, l’homme affirme
qu’il y a une réalité autour de lui et répond
donc à la seconde question : non je ne rêve pas ! La première
de ces deux questions demeure plus difficile. En effet, chacun est persuadé
qu’il a la capacité de penser et de comprendre ce qui l’entoure,
qu’il peut être lucide et libre dans son jugement. C’est
ainsi que l’histoire de la pensée occidentale est une longue
marche pour débusquer les illusions et rendre libre la pensée
humaine.
Dans le domaine économique et politique, le slogan
qui nous sert de titre exprime l’idée qu’il y a des
choses cachées, une logique secrète qu’il faut révéler
pour que chacun prenne conscience qu’une volonté extérieure
à la sienne le dirige et qu’il est donc aliéné.
Dans le domaine psychologique ce serait la même
chose. L’origine et le fondement de mes pensées et de mes
affects, seraient cachés à ma conscience. Pour être
vraiment moi-même, il me faudrait d’abord mettre au jour
ce qui aliène de l’intérieur ma liberté. Ai-je
d’ailleurs intérêt à le faire ? Ce n’est
pas si sûr, car je peux me complaire dans un discours qui, en
affirmant l’entrave de ma liberté, supprime ma responsabilité
et me rend ni responsable ni coupable. L’inconscient devient un
formidable outil contre la culpabilité, que ce soit celle que
j’éprouve ou celle dont on pourrait m’accuser.
Qu’en est-il du domaine religieux ? Là on
touche au génie ! S’il y a un réel, celui-ci est
défini comme l’œu-vre de quelque chose ou quelqu’un
qui échappe complètement à la connaissance, sur
lequel personne n’a de prise, et qui, dans le christianisme, choisit
d’être faible et de n’avoir prise sur personne. Cette
déconnexion totale exclut toute contrainte et fonde une véritable
liberté en rendant l’homme maître du réel.
Car si quelqu’un (disons « Dieu » pour faire court)
reste caché, il est en dehors du réel et donc toute possibilité
d’aliénation disparaît.
La question qui se pose néanmoins en ce début
de XXIe siècle demeure celle de savoir si la société
préfère vraiment la liberté au confort de l’aliénation
qui supprime toute responsabilité...
Jean-Claude
Deroche