Une seule appellation
désigne la cène dans le Nouveau Testament et c’est
sous la plume de Paul: «Le repas du Seigneur» (1 Co 11,20).
C’est peut-être par fidélité
à ce texte-là que Calvin, dans L’Institution de la
religion chrétienne (IV,17,1) et avant d’utiliser régulièrement
le mot cène, parle de «banquet spirituel».
Chez les protestants et surtout chez les anglicans, le
mot de communion est aussi en usage.
Quant à celui d’eucharistie, il n’a pas
vraiment la faveur des réformés qui trouvent qu’il
«fait catholique», même si on le rencontre parfois
chez Zwingli et Calvin. Il est certes employé par le catholicisme
et dans le monde œcuménique. Il a l’avantage de pouvoir
devenir un adjectif : eucharistique. Mais cela ne suffit pas, bien entendu,
à redorer son blason.
On peut alors rappeler qu’il correspond à
la première appellation donnée à la cène
dans la tradition grecque; c’est le cas dans la Didachè,
cette catéchèse qui suit de peu les témoignages
apostoliques. Mais c’est le sens d’eucharistie qui importe
ici: selon son étymologie grecque, ce substantif veut dire action
de grâces, remerciement. Il correspond à un verbe introduisant
le récit de la cène: Jésus rend grâces.
On a donc très tôt placé la cène
sous le signe fidèle d’une action de grâces et non
pas d’un sacrifice. Cène provient du latin et désigne
le dîner, ce qu’elle n’est vraiment pas dans le cadre
de nos assemblées du… matin!
Puisque la Réforme est dominée par la réalité
de la grâce, eucharistie convient, paradoxalement, bien mieux
à l’esprit du protestantisme qu’à celui du catholicisme!
Mais n’est-ce pas plutôt le culte tout entier
qui est eucharistie, puisqu’il est avant tout un chant de louange
et de reconnaissance, une action de grâces et un «À
Dieu seul la gloire!»? 
Laurent
Gagnebin