Oui, je viens dans
son Temple adorer l’Éternel...
Ces premiers vers d’Athalie, ma mère les
récitait, légèrement sarcastique, quand nous prenions
le métro afin de nous rendre à l’Oratoire du Louvre.
Et elle nous expliquait pourquoi ce « temple » n’en
était pas un à proprement parler.
Nous savions en effet, nous les enfants, que l’Éternel
n’était pas dans « son » temple. Que le Dieu
dont nous parlaient nos pasteurs était partout et peut-être
aussi enfoui dans notre cœur. Qu’il était présent
en tout lieu chaque fois que des fidèles se réunissaient
en son nom. Que ce terme se serait mieux appliqué à une
église catholique dont les membres révéraient en
effet dans l’hostie la présence mystérieuse, mais
réelle, de leur Dieu qui différait ainsi, apparemment,
du nôtre.
Nous apprenions aussi que du temps d’Athalie comme
au temps de Jésus, les juifs avaient à Jérusalem
leur « temple », lieu unique où ils adoraient l’Éternel
et où ils commémoraient, toujours selon Racine :
... la fameuse journée
Où, sur le mont Sina,
la loi nous fut donnée.
Sans doute est-ce dès le début de la Réforme
qu’on a employé, pour les assemblées réformées,
le terme de temple pour les distinguer des assemblées romaines
; les luthériens disent cependant toujours église, ce
qui désigne bien mieux l’endroit où s’assemblent
les croyants. Reconnaissons donc que ce terme de temple a été
bien mal choisi. Il a aujourd’hui pour lui, hélas, le poids
de l’ancienneté. Alors pourquoi le changerions-nous ? 
Bernard
Félix