Numéro 206
Février 2007
( sommaire )

Dans le monde et dans les églises

Pakistan

Une Bible œcuménique

Catholiques et protestants ont signé un accord pour une traduction commune de la Bible. Dans un pays très majoritairement musulman, les chrétiens confrontés à une version unique du Coran étaient interpellés sur leurs différentes versions de la Bible, le nombre de Livres qui variaient suivant l’origine catholique ou protestante des versions (les livres deutérocanoniques, Sagesse, Tobie, Judith, 1 et 2 Maccabées etc. qui figurent traditionnellement dans l’Ancien Testament des éditions catholiques ne sont reconnus ni par les juifs ni par les protestants), l’orthographe des noms propres, etc.

L’évêque protestant de Lahore, modérateur de l’Église du Pakistan qui regroupe les anglicans et diverses dénominations protestantes, a dit sa difficulté à faire comprendre à un intellectuel musulman que, au-delà des variations du texte, le message évangélique demeurait le même !

Un responsable de l’Alliance biblique universelle qui jouera le rôle de conseiller a proposé que les livres deutérocanoniques soient insérés entre l’Ancien et le Nouveau Testament. La traduction en ourdou, langue officielle du Pakistan, était prévue pour début 2007. Il existe déjà une traduction oecuménique de la Bible en parkari, autre langue pakistanaise, parue en 2001.

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Canada

Darwin ou la fermeture

Au Québec, les écoles protestantes privées, de tendance évangélique, devront enseigner la théorie de l’évolution de Darwin. Le ministre de l’Éducation de la province du Québec a rappelé à l’ordre ces établissements en leur demandant d’uniformiser leurs programmes avec ceux des écoles publiques. Sinon ? Il les a menacées de fermeture ! La directive du ministre a été provoquée par une plainte déposée contre l’une de ces écoles évangéliques qui refusait de suivre le programme scolaire officiel de l’État.

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Russie

On défend les traditions

Le patriarche orthodoxe russe Alexis II vient de critiquer durement les Églises protestantes (qui sont ses partenaires au sein du Conseil œcuménique !). Il leur reprochait leur laxisme et une ouverture excessive au sécularisme de la société occidentale. Alexis II s’est, en particulier, attaqué à l’ordination des femmes et des homosexuels, et à la bénédiction de couples du même sexe. Il a déclaré vouloir constituer un front commun avec l’Église catholique pour défendre les valeurs « chrétiennes » traditionnelles...

Évidemment, il est plus facile de s’en prendre au laxisme des protestants qu’à la misère du peuple russe et au délabrement moral de ses « élites ». Dans une nouvelle datée du 24 décembre, l’agence œcuménique ENI racontait la mort terrible d’un pope, de sa femme et de leurs trois jeunes enfants dans un village à quelques heures de route de Moscou. L’incendie de leur maison pourrait avoir été allumé par des villageois furieux que leur prêtre combatte l’alcoolisme, fléau de la Russie rurale, ou encore par des voleurs décidés à emporter les quelques trésors que contenait l’église du XIXe siècle. La maison précédente de ce pope avait déjà été incendiée et il avait déclaré que « desservir le village c’était comme faire la guerre »... Juste avant sa mort, il avait réclamé, sans succès, une protection contre les voleurs qui recherchent icônes, argenterie et autres objets de valeur dans ces églises rurales peu gardées. Le drame a mis en lumière la vie difficile et dangereuse que mène ce clergé orthodoxe, isolé et vulnérable, dans les villages russes, mais aussi le visage hideux de la barbarie.

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États-Unis

Il l’a fait !

Keith Ellison est un nouvel élu démocrate – du Minnesota – au Congrès américain. Il a fait une entrée remarquée en souhaitant prêter serment non pas sur la Bible, mais sur le Coran. Son souhait, finalement exaucé, a suscité une polémique lamentable. Certains, de la droite religieuse, ont dénoncé « un blasphème à la Constitution », d’autres ont affirmé qu’un serment sur le Coran « disqualifierait » (sic !) l’élu. Des voix ont même appelé à voter une loi contraignant tous les élus, quelle que soit leur appartenance religieuse, à jurer sur la Bible ! Faut-il rappeler que, malgré toutes les habitudes prises sous la pression de la droite religieuse, la Constitution américaine interdit au Congrès de voter une loi établissant une religion d’État et affirme qu’il n’y a pas de critère religieux qui tienne pour emplir une fonction élective... Un représentant de Virginie en a même profité pour prédire, sur la télévision conservatrice Fox News, qu’un jour il y aurait « une majorité d’élus musulmans au Congrès » si l’Amérique ne se « réveillait pas ». Mais les musulmans sont sept millions sur 300 millions d’Américains, ce qui laisse de la marge ! Finalement Keith Ellison qui interpellait le « pays de Dieu » en disant : « Que serait la valeur d’un serment prêté sur un livre saint qui n’est pas le mien ? » a pu poser sa main sur un Coran datant de 1764 et ayant appartenu à Thomas Jefferson, troisième président des États-Unis. La demande du nouvel élu musulman, le premier dans l’histoire du Congrès, aura eu le mérite de faire surgir la question de l’islam dans la société civile américaine encore largement traumatisée par le 11 septembre. Sa présence est tout un symbole, comme le fut l’élection, en 1960, du premier président catholique des États-Unis, un certain John Fitzgerald Kennedy.

Claudine Castelnau