Heureusement, le guetteur est là…
Quelle bonne nouvelle nous rapporte Ézéchiel !
Le guetteur a ce qu’il faut pour sonner l’alarme. S’il
le fait et que les habitants écoutent, beaucoup seront sauvés.
S’il ne le fait pas, c’est lui qui sera responsable du désastre,
il devra rendre des comptes. Mais s’il sonne, s’il alarme
et que les habitants ne veulent pas l’écouter, ils seront
responsables de leur propre désastre.
Et le guetteur doit veiller à ce que la trompette ne soit pas
trop vieillie, bouchée, hors d’usage. C’est aussi sa
responsabilité. L’heure est grave. Ce n’est pas le
moment de s’amuser, comme aux jours de Lot racontés par
Luc. Sur le navire, quand l’alarme sonne, ce n’est plus le
moment de jouer des airs de valses et de continuer à danser.
Normalement, le guetteur, c’est le pasteur. Il doit veiller et
avertir. C’est ce qu’on est en droit d’attendre de lui.
Mais cela peut être n’importe quel paroissien qui a le sens
des responsabilités. Une mère de famille, un journaliste,
un conseiller presbytéral ou municipal, un instituteur, un isolé
qui a pris la peine de s’informer avec soin et qui a compris la
responsabilité que Dieu lui confie. Mais c’est donc aussi
le pasteur. Avertir quand le désastre menace, c’est la priorité
des priorités de son ministère. Il doit être prophète.
C’est son principal « cahier des charges ». Et quand
il sonne l’alarme, lui ou quelqu’un d’autre, les paroissiens
doivent l’écouter.
Nous avons deux responsabilités :
- D’abord découvrir où sont les guetteurs aujourd’hui,
peut-être en train de s’époumoner dans leur coin.
Il serait bien étonnant que Dieu nous laisse sans prophètes.
- Et ensuite, les écouter, prendre au sérieux leurs
cris d’alarme. Ce n’est pas facultatif, le salut de tous
en dépend. Repérons les prophètes et écoutons-les
!
Il y a quarante ans, il y avait un grand prophète. Forcément,
on l’a assassiné. Il s’appelait le pasteur Martin Luther
King. Son nom était un bon programme. Il a sonné l’alarme
contre le racisme dans son pays et dans le monde. Et, miracle, il a
été entendu, après de rudes batailles. Mais il
a prophétisé aussi contre l’armement nucléaire.
Et là ce n’est pas encore gagné, pourtant sa voix
retentit encore. Dans un collège catholique, on a écrit
son slogan : « Si nous n’apprenons pas à vivre ensemble
comme des frères, nous mourrons ensemble comme des idiots. »
Il est encore temps de l’entendre, mais c’est urgent. Tous
les possesseurs de la bombe atomique sont mal placés pour interdire
à d’autres de la fabriquer. Merci M. L. King.
Aujourd’hui c’est notre prophète préféré
qui nous parle, qu’on a aussi assassiné, mais sa parole
reste vivante. Il nous dit dans son sermon sur la montagne (Mt 5) et
à nous qui sommes ici : « Recherche et trouve d’urgence
un accord avec ton adversaire, tant que tu es encore en chemin »,
sinon cela finira mal.
Écoutez la trompette qui sonne. C’est Jésus lui-même
qui nous avertit.
Nous avons beaucoup d’adversaires, nous les chrétiens
« occidentaux », tellement nous nous sommes mal conduits
pendant des siècles. Nous avons tendance à l’oublier,
ou pire, à le contester, mais c’est la vérité
historique. Écoutez l’avertissement : « Un accord
d’urgence, ou ça finira mal ». Réparer les
injustices, si c’est encore possible, les spoliations, les colonisations,
les mépris et beaucoup de choses semblables. Mais Jésus
prévient : « Sans cet accord, ça finira mal ».
Bien sûr, les adversaires ne sont pas parfaits, Il y a des pailles
dans leurs yeux. Mais il y a tant de poutres dans les nôtres.
Je pense au monde arabo-musulman, pour avoir longtemps vécu
au Maghreb. Beaucoup sont ulcérés, exaspérés.
Et de même au Liban, en Palestine, en Irak, en Afghanistan, en
Tchétchénie et tant d’autres lieux. Nous avons pris
de terribles risques en inspirant le partage de 1947, ou en l’approuvant.
On ne nous demande pas de trouver les autres parfaits. On nous demande
de les comprendre, de réparer, de trouver un accord. C’est
comme si Jésus rabâchait : « Trouve un accord, même
si c’est difficile. Tu ne sortiras pas tant que tu n’auras
pas payé jusqu’au dernier centime. »
Roger
Parmentier