
Numéro 174 - février 2004
( sommaire
)
Dans le monde et dans les Églises
USA
Dieu en Amérique
Il est loin le temps
où pour rassurer les électeurs, John Kennedy, candidat
à la présidence des États-Unis, déclarait
fermement : “Je crois en une Amérique où la séparation
des Églises et de l’État est absolue […] Je
crois en un président dont les opinions religieuses relèvent
de ses affaires privées.” On peut toujours faire remarquer
qu’à l’époque (1960) l’Amérique
avait encore du mal à imaginer un catholique autrement que comme
aux ordres du Vatican !
Or si depuis le milieu des années 70, les candidats
républicains d’abord ont proclamé leurs convictions
religieuses, promettant d’appliquer le programme de Dieu à
l’Amérique, accusant leurs adversaires démocrates,
comme le fît George Bush père en 1992, d’avoir “oublié
Dieu dans leur programme électoral”, les démocrates
ne sont plus en reste désormais, et l’on se souvient du
déferlement de proclamations religieuses du républicain
“born again” (conversion personnelle) George Bush junior auquel
répondit, le non moins fervent “born again” démocrate
Al Gore ou son colistier le juif orthodoxe Liebermann. Et il semble
que cette forte tonalité religieuse ressurgisse dans une campagne
qui n’en est qu’à ses débuts. Ainsi de Howard
Dean, l’un des démocrates actuellement les mieux en piste,
qui s’est fait manifestement violence pour adopter des accents
“religieusement corrects”. Médecin, ex-gouverneur du
Vermont, laïque déclaré, épiscopalien (anglican)
puis congrégationaliste et marié à une juive, il
semblait bien décidé à cantonner ses convictions
religieuses à sa vie privée et à sa maison. Sous
la pression sociale et particulièrement dans les Etats du Sud,
le voilà qui a fini par “laisser petit à petit le
Seigneur s’infiltrer dans sa campagne”, constate la presse
américaine. Un “God bless you” par ci, une citation
du Nouveau Testament par là et le voilà déclarant
qu’il a “beaucoup appris du Sud et de l’importance que
la foi y a”. Il veut charmer les oreilles des fondamentalistes
de la Bible Belt sudiste et prédit qu’on l’entendra
“mentionner Dieu de plus en plus dans les prochaines semaines”.
Même s’il affirme qu’il n’est pas plus religieux
qu’avant, il déclare publiquement prier chaque jour et être
de plus en plus à l’aise pour en parler, tout en précisant
qu’en Nouvelle-Angleterre, dont il est originaire, “on n’a
guère l’habitude d’afficher sa religion” (contrairement
aux Etats du Sud). Howard Dean ne sera peut-être plus dans la
course à la candidature démocrate lorsque paraîtront
ces lignes. Mais cet exemple illustre jusqu’à l’absurde
le poids du “religieux” dans la vie américaine. Voilà
un homme politique démocrate de gauche, c’est rare, opposant
déclaré à la guerre en Irak – ce qui nécessite
du courage dans l’Amérique de M. Bush –, candidat à
l’investiture démocrate et dont les médias relèvent
tout de suite qu’il est “le plus laïque des candidats
à la présidence dans l’histoire américaine
moderne” pour conclure qu’il a un “problème avec
la religion” ! On l’avertit même qu’il risque d’être
considéré comme un “alien” (un extraterrestre
? un non-Américain ?) par nombre de ses compatriotes. Au pays
de la liberté religieuse tellement vantée, faudra-t-il
prévoir un nouvel amendement à la Constitution pour le
droit à être laïque ? 
Claudine
Castelnau
haut 
Schisme chez les baptistes ?
On saura à la
prochaine assemblée de l’Alliance baptiste mondiale en juin
si la Convention baptiste du Sud des États-Unis (la Southern
Baptist Convention) se séparera définitivement de l’Alliance.
En décembre dernier, la SBC – forte de 16 millions de fidèles
sur les 44 millions de baptistes dans le monde – a déjà
annoncé qu’elle ne contribuerait plus aux finances à
partir d’octobre 2004. Des divergences théologiques et éthiques
sont avancées : l’Alliance baptiste mondiale remettrait
en question “l’inerrance biblique” (l’infaillibilité
de l’Écriture sainte), le fait que “le salut dépend
d’une adhésion volontaire à Jésus Christ”,
l’interdiction faite à la femme d’être pasteur
et prédicateur. Bref, l’Alliance baptiste mondiale se serait
ouverte à “un libéralisme théologique”
sans que ses membres aient leur mot à dire. Les dirigeants de
l’Alliance ont reçu avec amertume l’annonce du départ
de la SBC, extrêmement fondamentaliste et conservatrice, et y
voient “le triomphe de l’idéologie sur la doctrine”.
Ils dénoncent “une volonté de contrôle des
consciences contraire à la liberté de l’Évangile
et au respect de la diversité”. La SBC annonce que les 300
000 dollars de contribution annuelle à l’Alliance seront
utilisés pour “renforcer les relations entre chrétiens
évangéliques conservateurs dans le monde”. 
Claudine
Castelnau
haut 
Conseil œcuménique
Testament de Konrad Raiser
En quittant son poste
de Secrétaire général du Conseil œcuménique
des Églises (342 Églises), le pasteur Konrad Raiser a
voulu rappeler dans une interview au Service de nouvelles œcuméniques
(ENI) que le dialogue interreligieux lui paraissait le défi majeur
à relever par les Églises. Un “défi œcuménique
parce qu’il appelle toutes les Églises à réexaminer
leur conception de la place du christianisme dans un monde de pluralisme
religieux”. Les divisions traditionnelles entre les Églises
deviennent moins importantes”, a reconnu Konrad Raiser, mais à
leur place surgissent de nouvelles sources de controverses, comme la
question de l’homosexualité qui a divisé la communion
anglicane ces derniers mois, qui peuvent engendrer davantage de divisions
et développer plus de discorde que beaucoup de controverses doctrinales.
“Mais ce sont des controverses auxquelles les Églises doivent
faire face. Il n’existe aucune question qui puisse être considérée
comme close pour le dialogue futur, que ce soit l’ordination des
femmes, l’homosexualité, le génie génétique,
la recherche sur les cellules souches ou autres.” Konrad Raiser
constate aussi qu’avec l’Église catholique, qui bien
que non membre a des représentants dans deux commissions du COE,
“les avancées se sont ralenties au cours des dix dernières
années” et “un bon nombre de liens noués après
le Concile de Vatican II se sont défaits depuis”. D’où
son appel pour un mouvement œcuménique qui dépasserait
l’Église catholique et le COE. Et sa vision d’un “œcuménisme
du peuple”, au delà des cadres institutionnels qui absorbent
trop d’énergie et dont les leaders ne peuvent que recommander
la patience et la prière, “pour libérer le potentiel
qui existe parmi le peuple de Dieu”. 
Claudine
Castelnau
haut 
Merci de soutenir Évangile & liberté
en vous abonnant
:)
|

|
|