Il y a bien longtemps,
une divinité interpellait les hommes : Écoute… je
suis… le « dieu un ».
C’était une grande chose, il y avait un dieu
pour un peuple, un peuple unique pour un dieu unique. Ce fut un grand
progrès, une délivrance de la foule des dieux et des esprits
qui manipulaient les hommes qui eux, ne savaient à quel «
saint » se vouer. Ce fut aussi un grand progrès vers la
compréhension de l’unicité de l’humanité
au travers et malgré la diversité des langues, des cultures,
des religions.
Le un est en effet la base du monde. L’enfant commence
à apprendre un, puis deux, puis trois… Ensuite, mais bien
plus tard apparaît le zéro, tant il est difficile de comprendre
ce qu’il signifie, d’ailleurs l’adulte continuera longtemps
à s’interroger sur ce qu’est le zéro, le néant.
Bref, l’un est finalement bien accepté et
même devint un objectif, un but à atteindre. On cherchera
donc à unifier la société, unifier la langue, unifier
la monnaie… que sais-je encore.
C’est alors que tout bascula. Il y eut une frénésie
de recherche d’unité. Tout devait être unifié
sur la planète terre. Déjà un seul état
avait la puissance nécessaire pour penser pouvoir imposer sa
volonté partout. Déjà les échanges commerciaux
devaient se faire de la même manière partout. Déjà
on parlait d’une banque mondiale, d’un tribunal mondial.
Et pourtant les choses n’étaient toujours
pas satisfaisantes et même souvent franchement insupportables.
Que se passait-il donc ?
C’était assez simple en vérité,
mais ils n’en avaient pas pris conscience. Ils avaient cru que
dans le « dieu un », dieu était un nom et un, un
adjectif. Ils avaient cru que cela voulait dire que Dieu était
unique, ils s’étaient d’ailleurs battus pour imposer
aux autres leur « dieu unique ». En réalité
c’était exactement l’inverse, un était un nom
et dieu, un adjectif. Bref c’est l’un qui est dieu et donc
vouloir créer de l’un, de l’unique, est tout simplement
un blasphème. C’est vouloir créer du « dieu
» sur terre.
Seul donc le multiple est humain et porteur de vie, on
le voit bien a contrario, c’est la mort qui est l’unique partagé
par tous.
Jean-Claude
Deroche