Il est de bon ton de
refuser les « étiquettes » ou de les mélanger
(du genre « je suis un libéral évangélique,
ou un fondamentaliste éclairé »). Je voudrais, à
l’inverse, assumer et revendiquer ces éléments de
mon identité et de mes convictions.
Je suis protestant parce que je crois que l’individu
vaut mieux que l’Église. La foi est pour moi une donnée
fondamentalement personnelle, une « adhésion-communion
» librement décidée. Dire Dieu c’est reconnaître
son rôle dans les choix de ma vie, c’est regarder a posteriori
les traces de Sa présence. La foi ne se « transmet »
pas par l’Église : je refuse l’idée d’une
« foi de l’Église », lui préférant
celle de foi(s) des croyants. Elle ne se transmet pas non plus par la
famille, n’est pas héréditaire. Elle n’est pas
nécessairement définitive mais s’insère dans
le parcours d’une vie, en épousant ses méandres.
Elle est aussi une posture dans la société : faire primer
la liberté et le dialogue sur les dogmatismes et les replis.
Cela suppose une exigence forte, celle de se sentir acteur de la construction
de la société. Être protestant, c’est ouvrir
ses oreilles et ses yeux pour ensuite se salir les mains.
Je suis libéral, parce que je suis curieux de
nouvelles découvertes. Je revendique l’appartenance à
une Église intellectuelle (ou qui cherche à l’être),
c’est-à-dire à une Église où chacun
est invité à valoriser le « talent » de sa
raison. Être libéral suppose une ouverture à toutes
formes de pensée ou d’expression. Je me nourris de Botticelli,
de Platon, de Descartes, de Whitehead, de la Kabbale juive ou de certains
penseurs musulmans, en complément de ma lecture biblique. Du
coup, être libéral me fait découvrir une fraternité
à l’horizon planétaire. Il m’arrive bien souvent
de me sentir très proche d’un juif, d’un musulman,
ou même d’un athée, pour peu qu’il partage la
même curiosité du monde que moi. 
Jean-Marie
de Bourqueney