
Numéro 187
Mars 2005
Sommaire & Résumés
(
: permet d'aller au corps de l'article)
Éditorial
Pâques, ou l’extravagance de Dieu,
par Raphaël
Picon
Les évangiles sont proprement
stupéfiants ! Une pure folie les agite ! Ils nous racontent
tant et tant de miracles, ils sont pleins de guérisons sensationnelles
et même de résurrections qui défient l’imagination.
Jésus irradie d’une vie qui reprend sans cesse le dessus,
qui transperce la tombe, qui fait chavirer la mort ; il nous laisse
bouche bée, nous saisit par tant d’audace et nous sidère
par tant d’exagérations confondantes... 
Questionner
Lire les récits de Pâques aujourd’hui,
par Florence
Couprie
Lire la Bible risque d’éloigner
nos contemporains de la foi plutôt que de les y conduire,
à cause d’un littéralisme qui en masque le message,
voire le travestit. Ainsi les récits de Pâques ne racontent
pas une histoire fantastique de revenant. Ils appellent à
la liberté d’une vie nouvelle. 
Combattre
Pauvreté évangélique,
par Vincens Hubac
Jésus était-il pauvre
? Vincens Hubac prend position contre cette idée reçue
: la véritable pauvreté n’est pas choisie, elle
est subie. Elle n’est pas uniquement matérielle, elle
est totale. 
haut 
Ces mots qu'on n'aime pas
Luxe, par Florence
Taubmann
«Cachez donc
ce signe extérieur de richesse que je ne saurais voir ! »
Goût pour la simplicité ? Ou méfiance héréditaire
pour l’ordre du visible qui conduit à désirer
la transparence, et à choisir le gris, son succédané
? Heureusement aujourd’hui ces propos sont caricaturaux et
dépeignent plutôt l’image que les autres se font
encore parfois de la fameuse austérité protestante.
Il n’en reste pas moins que l’on préfère
investir dans le solide, ce qui fructifie, que dans le gracieux,
ce qui donne du plaisir. Pourtant... 
Carte Blanche
Debout les mots, par Michel
Leplay
L’abondance heureuse des publications
et la multiplication constante des imprimés pourraient conduire
à une banalisation de l’écrit. Même chez
les protestants, l’Écriture tellement sacrée
qu’on la dit « sainte » connaît une certaine
banalisation : les nombreuses traductions, souvent précieuses,
enrichissent certainement l’intelligence du lecteur, mais n’est-ce
pas au risque d’un affaiblissement de sa sensibilité?... 
Série : Foi et Science
3. Quand je dis «homme», j’embrasse
les femmes, par
J.-Claude Deroche
Les textes bibliques reflètent
le vocabulaire et la culture de l’époque qui les a vus
naître. C’est d’ailleurs le cas de tous les textes,
y compris celui-ci. Pour ce qui est de la Bible, il s’agit
de cultures qui distinguent très fortement la place de la
femme de celle de l’homme dans la société... 
Billet
Mieux vaut servir Jésus-Christ sans
le nommer que le nommer sans le servir, par Philippe
Vassaux
Il y a des titres qui font sourire
comme, sur une carte de visite : chef de fanfare de cavalerie en
retraite. On ne sait plus qui est à la retraite : le chef,
la fanfare ou la cavalerie. Jésus de Nazareth n’échappe
pas à cette constatation... 
Commenter
Au cœur du deuil, la vie. Évangiles
de la nativité, par James
Woody
Pourquoi avoir composé des
évangiles de la naissance ? Pourquoi ne pas avoir commencé
les récits néotestamentaires de la vie de Jésus
– qui ne prétendent pas au statut de biographie –
à la vie adulte, à ce qui constitue réellement
le début de son ministère ? 
haut 
Cahier : Relire le « Notre Père... »
Matthieu 6,9-13
Par Louis
Pernot 
La
prière du Notre Père a suscité de nombreux
commentaires, interprétations et reformulations. Les évan-giles
en donnent deux versions différentes, dans Matthieu et dans
Luc. La Didaché, manuel catéchétique, liturgique
et disciplinaire, datant de la fin du Ier siècle ou du début
du IIe, reprend de façon presque identique le texte de Matthieu
6,9 ; la structure de ce manuel montre, d’autre part, qu’à
cette époque la prière du Notre Père était
réservée aux seuls membres baptisés de l’Église
: c’était alors un privilège de pouvoir réciter
la prière enseignée par le Seigneur.
Cette prière qui, pour beaucoup de chrétiens, est
« La Prière », n’a pas été
donnée spontanément par Jésus, -d’après
Luc. Il s’agissait, sans doute, pour les disciples de Jésus
qui la lui ont demandée, d’avoir une prière qui
serait leur signe distinctif parce qu’elle exprimerait leur
lien particulier avec Dieu. Les divers groupes religieux de l’époque,
Pharisiens, Esséniens, disciples de Jean-Baptiste, se distinguaient
par l’utilisation d’une forme et d’une règle
particulière de prière. Cependant de nombreux commentateurs
ont remarqué que la formulation du Notre Père n’est
pas totalement originale ; elle reprend en partie des termes de
prières juives : Qaddish, bénédictions, liturgie
du Yom Kippour. L’ancienne prière araméenne du
Qaddish, qui terminait le service à la synagogue, était
sans doute familière à Jésus depuis son enfance.
Pourtant l’invocation de Dieu en tant que « Abba »
(appellation araméenne familière – mais respectueuse
– du père par son enfant), à elle seule, est
inouïe et fait éclater les limites du judaïsme.
Et cette dénomination est au cœur du message de Jésus.
Enfin, les problèmes de traduction et d’interprétation
sont aigus dans ces textes. Origène, fondateur de l’exégèse
biblique, s’interroge, dès le début du IIIe siècle,
sur le sens du pain « supersubstantiel » (epiousion),
et Saint Jérôme, au IVe siècle, offre un commentaire
complet de la prière. La présence de deux versions
différentes complique encore la recherche de « l’original
». L’orthodoxie n’accepta pas la traduction œcuménique
sur laquelle catholiques et protestants se sont mis d’accord
en 1966.
La compréhension des textes des évangiles, y compris
celui du Notre Père, n’est pas facile pour nous aujourd’hui,
et leur appropriation encore moins. Le vocabulaire, le sens des
mots, la pensée et la théologie ont beaucoup évolué
en deux mille ans. Les commentaires sont donc importants sinon indispensables.
Louis Pernot, pasteur de l’Église réformée
de l’Étoile et membre du comité de rédaction
d’Évangile et liberté, nous propose ici une réflexion
mettant en valeur la responsabilité de l’homme pour
rendre le monde conforme à l’action créatrice
de Dieu. Il propose aussi une reformulation de la doxo-logie finale
(« car c’est à toi qu’appartiennent le règne,
la puissance et la gloire ») correspondant mieux à
nos convictions profondes, et exprimée dans le langage et
avec les idées d’aujourd’hui.
M.-N. et J.-L. Duchêne
Par Louis
Pernot

haut 
Vivre
Régine est ressuscitée,
par Bernard Félix
Plusieurs pasteurs m’ont dit
avoir été demandés par des mourants afin de
préparer avec eux leurs funérailles : façon
d’affirmer leur foi à travers certains détails
choisis pour le rite, manière d’échapper à
la pensée de ce qui précède, ultime souci de
ceux qui vont rester et du message à leur délivrer
?
Un ami, président local de la Ligue contre le Cancer, me
signale Régine, isolée à proximité de
notre petit bourg, en traitement de chimiothérapie prolongé...

En Bref
Dans le monde et dans les Églises,
par Claudine
Castelnau
Italie, Non à la «
Pax mafiosa »... 
Grande-Bretagne, Vacances et religion... 
Méditer
J’apporte le salut à ceux contre
qui on souffle, par Florence
Taubmann 
Sauve, Eternel ! car c’en
est fini des hommes loyaux,
Les fidèles disparaissent parmi les humains.
Chacun dit des calomnies à son prochain.
On se parle avec des lèvres flatteuses,
Et un cœur double.
Que l’Eternel retranche toutes les lèvres flatteuses,
La langue qui discourt avec arrogance,
Ceux qui disent : nous sommes puissants par notre langue,
Nos lèvres sont avec nous ;
Qui serait notre Seigneur ?
Parce que les malheureux sont opprimés et que les pauvres
gémissent,
Maintenant, dit l’Eternel, je me lève,
J’apporte le salut à ceux contre qui on souffle .
Les paroles de l’Eternel sont des paroles pures ;
Un argent éprouvé au creuset de la terre,
Et sept fois épuré.
Psaume 12,1-7
haut 
Débattre
À propos du mal, par Raphaël
Picon
Depuis plusieurs années et
à son instigation, le pasteur Gilles Castelnau anime un atelier
mensuel composé d’une quinzaine de pasteurs. Les participants
recherchent ensemble et dans un esprit « libéral »
un langage renouvelé susceptible de dire Dieu et notre foi
sur un mode non fondamentaliste... 
Retrouver
« Foi et vérité »
une dogmatique libérale, par Bernard
Reymond
Les éditions de La Cause
viennent de republier Foi et vérité, l’importante
«dogmatique protestante» d’Auguste Lemaître
(1887-1970), précédée d’une préface
d’Henry Babel et d’une introduction d’André
Gounelle. Bernard Reymond met ici en évidence quelques aspects
dominants de la pensée et de l’attitude de ce théologien
qui enseigna à la Faculté de théologie protestante
de Genève.. 
Regarder, Écouter, Lire 
Livre
: Théodore Monod, une vie spirituelle (Nicole Vray,
Théodore Monod – Une vie spirituelle, Actes Sud, 2004,
21,90 €) 
Forum Laïcité : Paris, Salon
du livre, stand G181 Parc des Expositions, Porte de Versailles, 18-23
mars 2005. Programme. 
Cinéma : Sur quel pied danser
? (Charlie Chaplin, Le Pèlerin, DVD 2. Les Courts métrages.
MK2) 
Disque : Une Passion cubaine (Esteban
Salas : Passio Domini Nostri Jesu Christi, ensemble Ars Longa de La
Havane & Camerata Vocale Sine Nomine, dir. Teresa Paz, 1 CD K617161) 
Courrier des Lecteurs
Évangile
& liberté comprend une page entière
consacrée au Courrier des lecteurs. Nous voulons ainsi une
page vive, animée, publiant librement vos réactions
à tel ou tel article. 
Citation
La prière à Dieu la plus efficace,
c’est la gratitude.
Peter Handke,
Par le villages
Gallimard, 1983.
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haut 
En couverture : Arte y Simbolismo.
Illustration de Santiago Morilla © Santiago Morilla
Agencia Zegma, Madrid
www.zegma.com
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